Les pharmaciens emboîtent le pas aux médecins résidents et internes des CHU et appellent à un mouvement de grève. Un sit-in aura lieu également le jeudi 9 juin devant la tutelle. Après les médecins internes et résidents, qui ont observé plusieurs jours de grève, paralysant du coup l'activité dans les CHU du pays, c'est au tour des pharmaciens d'entrer en scène. Ces derniers ont décidé de mener un mouvement de protestation de grande ampleur. Ils justifient cette décision par le « manque de transparence du ministère de la Santé ». Dans un communiqué, la Fédération nationale des syndicats des pharmaciens du Maroc (FNSP) appelle tous les pharmaciens à se mobiliser pour défendre leurs «revendications légitimes». Pour commencer, les pharmaciens décident « l'annulation de la suspension du mot d'ordre de grève » et appelle à trois jours de grève au mois de juin. Les dates ne sont pas encore fixées. « Nous allons arrêter les dates la semaine prochaine lors d'une réunion avec les professionnels », précise le président de la Fédération nationale des syndicats des pharmaciens du Maroc, Kamal Belhaj Soulami. Et de poursuivre : « Depuis deux mois, nous n'avons aucune nouvelle du ministère de la Santé concernant nos revendications. Les responsables du ministère se réunissent et décident, seuls, de l'avenir de la profession en l'absence des concernés. Nous ne sommes plus partenaires ». Le président de la FNSP déplore le manque de dialogue avec le département de Yasmina Baddou. Les pharmaciens décident également d'organiser un sit-in pacifiste le jeudi 9 juin devant la tutelle. « Nous vivons une crise au quotidien. Les maux de la profession sont nombreux dont le monopole en peau de chagrin, la vente directe illicite des médicaments, des magasins vendant illégalement les dispositifs médicaux, conventions illicites, pharmacies illégalement ouvertes (CNOPS)… ). Le tout nécessite des mesures d'accompagnement que la loi 17-04 nous concède et qui ne coûte pas un centime au ministère mais qui tardent toujours à voir le jour », regrette Kamal Belhaj Soulami. Outre l'application de la loi 17-04 portant code du médicament et de la pharmacie promulguée en 2006, les pharmaciens revendiquent également une couverture médicale et une sécurité sociale. Or, la transformation de la pharmacie en SARL (passage de statut de personne physique à celui de personne morale) le permet. De 2006 jusqu'à ce jour, aucun pharmacien n'a osé faire le pas pour bénéficier de ces avantages qu'ils réclament. La proposition de Yasmina Baddou concernant la marge dégressive lissée suscite le plus de polémique. Devenue la bête noire des pharmaciens, cette mesure, disent-ils, va coûter cher au pharmacien. Ils brandissent même la menace de la faillite. « La marge dégressive lissée est un échec en France, ne cessent-ils de marteler. Pour mémoire, le rapport de la mission parlementaire sur le prix du médicament avait souligné que la cherté du médicament est dû notamment à la marge bénéficiaire élevée des pharmaciens. Cette conclusion a été même confirmée par les experts du cabinet du Boston Consulting Group (BCG) qui ont proposé cette mesure de marche dégressive lissée pour faire baisser le prix des médicaments. « Les pharmaciens ne sont pas riches. Nombreux sont ceux qui, parmi nous, souffrent de difficultés financières », martèlent les professionnels à chaque sortie médiatique. « Nous ne savons pas si le ministère de la Santé va appliquer ou non cette mesure. Mais, nos sources confirment que la mesure est maintenue », dit Kamal Belhaj Soulami. Du côté du ministère de la Santé, c'est le black out. Depuis 2009, date à laquelle le rapport de la mission parlementaire a publié son rapport, aucune mesure n'a été prise par rapport à la baisse de la marge des pharmaciens. Par ailleurs, à l'exception de quelques médicaments, qui ont subi une petite réduction, la majorité des médicaments demeure très cher. Yasmina Baddou n'a pas réussi à faire face au lobbying des industriels pharmaceutiques.