Grâce à un nouvel appareil, baptisé l'Intrabeam, la patiente atteinte d'une tumeur a beaucoup plus d'espoir. Au lieu de la trentaine de séances d'irradiations prévues pour traiter ce type de cancer, les malades n'en subiront que quelques unes, dont la première directement après l'ablation de la tumeur, avant que la zone soit remodelée et le sein refermé. Se remettre d'un cancer en quelques semaines, bien des malades en rêveraient. Trois Françaises ont déjà profité de la nouvelle technologie pratiquée au centre de lutte contre le cancer René-Gauducheau, dans la périphérie nantaise. Dans le meilleur des cas, l'utilisation de l'Intrabeam leur a permis de troquer 30 à 33 séances d'irradiation après l'ablation du sein contre une seule pendant l'opération. Au pire, si l'analyse de la tumeur rend malgré tout nécessaire une irradiation de la glande mammaire, ce traitement leur épargne au moins les cinq à huit dernières séances. «Quand on sait que les malades parcourent chaque jour plusieurs dizaines de kilomètres pour recevoir ces rayons, ce confort n'est pas négligeable, estime le Pr David Azria, cancérologue radiothérapeute au centre montpelliérain Val-d'Aurelle – Paul-Lamarque, auteur d'un article consacré à cette nouvelle technique dans la revue médicale The Lancet, en juin dernier. J'ai croisé des patientes qui refusaient la radiothérapie ou se faisaient enlever le sein simplement pour éviter ces allers-retours.» Grâce à ce nouveau système de radiothérapie «peropératoire», c'est-à-dire pratiquée au bloc à l'intérieur du sein et non plus en consultation externe, un tel dilemme ne devrait bientôt plus se poser. Un progrès immense, dont l'outil n'a pourtant rien de spectaculaire. Le fameux appareil, un «accélérateur linéaire mobile à rayons X», est commercialisé depuis plus de dix ans par l'entreprise allemande Carl Zeiss Meditec, mais seulement depuis mars 2009 en France. Il se présente comme une sphère fixée au bout d'un bras articulé. La boule vient se poser dans le sein ouvert, s'adaptant à la taille de la cavité opératoire. «On ne peut pas être plus précis», explique le Dr Magali Le Blanc-Onfroy, oncologue-radiothérapeute, qui chapeaute le dossier au centre René-Gauducheau. Difficile, aussi, d'être plus précoce dans le traitement du cancer. En irradiant à l'intérieur du sein dès l'ablation de la tumeur, on limite le plus tôt possible le risque de développement des cellules cancéreuses autour. Et c'est essentiel: «Dans 80 à 85 % des cas, la récidive est observée sur cette zone opératoire», précise le spécialiste. Pendant l'opération, l'équipe médicale sort du bloc et commande l'Intrabeam à distance. Une caméra reste braquée sur la patiente, une autre sur les écrans de réanimation. De l'applicateur jaillissent 20 grays (unité de mesure de la puissance des rayons): dix fois plus qu'en une séance de radiothérapie classique, mais près de trois fois moins qu'en 30 séances… L'irradiation est aussi moins toxique, évite la zone du coeur, des poumons, de l'oesophage et préserve les tissus sains. cependant si la technique marque une avancée incontestable, en l'état actuel du protocole, le traitement n'est aujourd'hui proposé qu'aux femmes présentant un faible risque de récidive. «La tumeur doit vraiment être de petite taille», précise le Pr David Azria, à Montpellier. Et si l'étude sur l'efficacité de l'Intrabeam réserve son accès aux plus de 45 ans, en pratique, «l'âge médian des patientes de l'échantillon est de 63 ans». A Nantes où la technique a été mise au point, la barre est d'ailleurs d'office placée à 60 ans. Au final, elles seront cinq ou six femmes éligibles chaque mois, soit moins de 20 % des patientes opérées pour un cancer du sein, avec irradiation subséquente, au centre René-Gauducheau. «Un deuxième essai international devrait être lancé pour les malades à haut risque dans le courant de l'année prochaine, indique le Dr Le Blanc-Onfroy. La technique pourra être proposée à un panel plus large de patientes, dont les moins de 60 ans. Pour le moment, on reste prudent: « c'est un début, et un bon début.»