Tahar Ben Jelloun ne mâche pas ses mots. Cet écrivain n'a pas apprécié le dernier Michel Houellebecq et il ne le cache pas. Ce membre de l'Académie Goncourt a publié ses propos, le jeudi 19 août dans le célèbre quotidien italien la «Reppublica». Son objectif était de dire tout haut ce qu'il pense tout bas de «la carte et le territoire» de Houellebecq, édité chez Flammarion et dont la sortie est prévue pour le 8 septembre. Le cas Houellebecq est le titre de son article sur une pleine page. Pour cet auteur la carte et le territoire est une série de «bavardages sur la condition humaine, une écriture affectée qui prétend à l'épure». Tahar Ben Jelloun a affirmé avoir lu «crayon à la main» les 427 pages du livre. Il avouera également que c'est un peu par obligation qu'il a lu ce roman. Il vient de lire 25 livres de la rentrée, celui de Houellebecq parmi d'autres. «Je dois dire que pour ma part, je ne l'aurais pas lu, si je n'y avais été obligé par mon appartenance à l'Académie Goncourt» dira t-il dans des propos à la presse française. Tahar Ben Jelloun précise aussi avoir perdu trois jours pour lire l'intégralité du roman. «Aucun livre ne m'a fait perdre autant de temps que Houellebecq. Quel est l'enjeu de ce livre ? Je n'aime pas ce style, je n'aime pas cette écriture», souligne l'écrivain. Parmi les éléments qui ont dérangé Tahar Ben Jelloun, c'est entre autres, sa lecture sociologique de la Police et ses jugements jugés excessifs sur les modèles Mercedes et Audi. La presse française s'interroge néanmoins pourquoi l'écrivain franco-marocain a préféré publier cet article dans un quotidien italien plutôt que dans un journal français. Du côté de l'intéressé la réponse est claire : « je suis collaborateur régulier avec la Repubblica, je fais très peu de critiques depuis que je ne suis plus au monde, mais ce livre m'a agacé et je voulais réagir» justifie Tahar Benjelloun. Sans le vouloir, ce dernier participe au buzz autour du livre, même s'il refuse de l'admettre. Dans son texte, le romancier pointe le sens du marketing avéré de Teresa Cremisi, l'éditrice du livre, PDG de Flammarion et, soit dit en passant, propriétaire de la maison d'édition, l'italien RCS Media group où sont édités Ben Jelloun et Houellebecq en Italie. Michel Houellebecq n'a pas encore réagi à l'article de Tahar Ben Jelloun. Contactées par téléphone par le Soir échos, les éditions Flammarion déclarent que l'auteur ne souhaite pas donner d'interview pour le moment. «Nous recevons d'énormes demandes de la part de la presse, mais pour l'instant, l'auteur ne souhaite pas encore s'exprimer», déclare une source du service presse chez Flammarion. Par ailleurs, sur le net le fan club de Houellebecq n'a pas hésité à réagir avec des propos souvent hostiles à l'encontre de Tahar Ben Jelloun. «Je reçois des articles, je découvre que Houellebecq a un fan club très puissant, je ne m'y attendais pas. On dirait que j'ai tué le gourou» déclare Tahar Ben Jelloun a un quotidien français. «La carte et le territoire» qui a tant déplu à Tahar Ben Jelloun pourrait être éligible au Goncourt 2010. La presse française se demande est-ce que c'est une façon pour Tahar Ben Jelloun de miner les débats. Le secrétaire général de l'Académie Goncourt, Didier Decoin contredit cette thèse. «Vous savez, on est avant tout une bande de copains. Nous parlons, nous argumentons. Ce genre de texte n'a aucune influence sur nous. Ce qui aura de l'influence, ce seront les arguments de Ben Jelloun. Je n'ai pas lu son article, mais ce qui est déclaré confirme que les débats vont être chauds».