Destiné à être l'une des locomotives de la région, le chantier Renault-Tanger a donné bien des sueurs froides aux acteurs concernés. Notamment après le retrait provisoire de Nissan, partie prenante initiale du projet, «pour cause de plan d'austérité destiné à surmonter la crise économique mondiale», selon les termes officiels du constructeur nippon, annoncés en février dernier. Les professionnels avaient exprimé de vives inquiétudes quant à la finalisation du projet. Plus de peur que de mal A l'époque, Carlos Ghosn, PDG du groupe au losange avait même déclaré que «nous sommes frappés par trois difficultés en même temps: crise du crédit, récession économique et renforcement du yen», en ajoutant que «les pires scénarios possibles se sont systématiquement réalisés». Mais cela aurait pu être pire. Un arrêt du processus aurait été un coup dur pour le département d'Ahmed Chami, qui avait employé les grands moyens pour sa réalisation. D'autant plus que Renault-Tanger devait être la pierre angulaire du plan Emergence, avec l'espérance d'attirer d'autres investisseurs d'envergure. En novembre dernier, le constructeur automobile français avait lancé les travaux de construction de sa nouvelle usine sur le site de Melloussa. Un accouchement au forceps pour cette unité de production, qui a nécessité un montage financier des plus acrobatiques, à quelques semaines de l'inauguration. La CDG est devenue actionnaire du projet à hauteur de 48%, avant que la BEI ne consente à son tour de débloquer la somme de 200 millions d'euros au profit de Renault. In fine, ce dernier n'aura puisé dans ses propres deniers que pour des investissements «accessoires». Mais d'ici 2012, le constructeur aura encore 700 millions d'euros à miser, sur le 1,1 milliard que nécessite l'ensemble de l'usine. Celle-ci est couplée au Centre de formation aux métiers de l'automobile Tanger-Med. Ce dernier, d'un coût de 7,5 millions d'euros, est destiné à fournir du personnel qualifié pour l'usine Renault à Tanger. La capacité d'accueil du centre est de 250 stagiaires par jour, avec mission d'assurer au personnel composé d'opérateurs, de techniciens et de cadres, des formations à l'embauche et des formations continues. Le centre de formation sera composé de 22 écoles de dextérité et de 8 ateliers de formation en maintenance, en plus de locaux pour la formation tertiaire et administrative. Sur les 314 hectares du site de l'usine, 1,5 ha sera dédié aux locaux du centre. Le site, qui devrait être opérationnel début 2012, est prévu pour une capacité de production de 30 véhicules par heure, soit 170.000 véhicules par an, pour atteindre à terme à une capacité de 400.000 véhicules annuellement, créant de ce fait 6.000 emplois directs et 30.000 emplois indirects. Selon Jacques Chauvet, président de la région Euromed chez Renault, le groupe mise également sur la compétitivité du site en termes de coût de production et de positionnement stratégique, afin d'investir les marchés internationaux. Il ajoute que l'usine de Tanger est destinée à être «le site le plus compétitif du groupe». 85% de la production sera destinée à l'export, notamment vers l'Europe de l'Ouest et de l'Est, l'Asie et l'Afrique. Synergies Mis à part Snop et Denso, Renault-Tanger a déjà un partenaire avec l'indien Steel Strips Wheel Ltd. Celui-ci a, en effet, remporté un marché de 28 millions d'euros pour la fourniture de jantes. Le contrat prévoit la production pour le compte de Renault-Tanger de plus de 3 millions de jantes sur 5 ans, avec une livraison effective à partir de 2011. Le constructeur devrait également faire jouer les synergies de groupe. En effet, au sein du groupe, les responsables ne seraient pas contre le fait que certaines de leurs unités soient sélectionnées comme fournisseurs de Renault Maroc. L'usine de San Jeronimo, en Espagne est l'une de ces candidates que possède le groupe. Elle est spécialisée dans les boîtes à vitesses. D'autres équipementiers installés en Espagne espèrent bien pouvoir eux aussi être sélectionnés pour fournir Renault Maroc à Melloussa. D'autant que la plupart sont déjà des fournisseurs de Renault Espagne. Les premiers à s'être manifestés sont les opérateurs Catalans, qui avaient fait moult requêtes auprès de leur gouvernement régional pour analyser les formules d'intégration au projet Renault à Melloussa.