Malgré les mesures prises avant le début de l'opération Marhaba 2022, les prix des billets flambent, pour le plus grand bénéfice des compagnies maritimes étrangères qui profitent de la quasi-inexistence d'une flotte marocaine. Le chiffre d'affaires généré par cette opération devrait avoisiner les 10 MMDH. Décidément, tout ne roule pas comme prévu dans l'opération Marhaba 2022 ! En témoigne, l'interpellation du gouvernement par des parlementaires, sur la cherté des billets de la traversée maritime, notamment entre les ports espagnols et ceux du Nord du Maroc. Ainsi, la députée de l'USFP, Aïcha El Gourgi a abordé la question devant la ministre du Tourisme, de l'artisanat et de l'économie sociale et solidaire, Fatim-Zahra Ammor. Des élus d'autres formations, notamment du Mouvement populaire, se préoccupent, également, du sujet et promettent de continuer à s'en ouvrir à l'Exécutif en vue d'obtenir une réaction sur la hausse vertigineuse des prix des billets. Des billets dont les tarifs suivent le marché de l'offre et de la demande, puisqu'ils s'établissent au prix de la haute saison. À la date du 12 juin, il faut débourser au bas mot 227 euros (soit près de 2.500 DH) pour rallier, par exemple, Tarifa à Tanger pour un véhicule avec un seul passager. Si le véhicule est occupé par 5 passagers, comme c'est souvent le cas pour une famille qui rentre ensemble, le tarif dépasse les 400 euros, soit plus de 4.000 DH. Au finish, il faut être un passager simple, sans voiture, pour obtenir un tarif de 43 euros (430 DH), ce qui est déjà au-delà des 32 euros annoncés avant le début de l'Opération Marhaba 2022. 1 milliard de dollars Il faut rappeler que la plupart des compagnies qui opèrent sur les traversées de Marhaba 2022 ne sont pas marocaines, mais presque toutes espagnoles. «À cela, il faut ajouter qu'en raison des réservations systématiques des billets, décidées pour la présente opération, quasiment aucune rentrée financière n'est possible pour notre économie sur ce segment», se désole un expert maritime, qui comprend toutefois que c'est pour des raisons pratiques que cela a été décidé. Globalement, selon les calculs du spécialiste du secteur portuaire et maritime, «l'opération Marhaba 2022 devrait générer au bas mot 1 milliard de dollars de chiffre d'affaires pour les compagnies concernées. Quant au Maroc «maritime», il devrait récolter 100 millions de dollars». Ces chiffres sont d'autant plus raisonnables que la partie espagnole avait accusé, à elle seule, un manque à gagner de plus de 1 milliard d'euros durant son exclusion, l'année dernière, de l'Opération Marhaba. Rush avec l'Aïd Al Adha 32 navires sont officiellement mobilisés pour l'Opération «Marhaba», en vue d'assurer 572 rotations hebdomadaires, ce qui représente une capacité totale de 471.000 passagers et 124.000 véhicules par semaine. Près de la moitié des navires, soit 14, sont mobilisés sur l'axe principal Tanger Med-Algésiras, ce qui leur permet d'effectuer jusqu'à 47 rotations par jour. Depuis le lancement officiel de l'opération le 5 juin dernier, tout semble se dérouler normalement, même si ce n'est pas encore le grand rush, qui se fera certainement à l'approche de la fête de l'Aïd Al Adha. Pour ce qui est des compagnies actuellement engagées, la majorité d'entre elles, comme souligné plus haut, sont espagnoles. Il s'agit de «Baléaria», «Armas Trasmed», «FRS», qui opèrent, notamment, avec le Port Tanger Ville et Tarifa, «GNV», ou encore «Meridionale». Navires marocains Cette flotte étrangère, avec son armada de navires, se place bien loin de la flotte marocaine, qui ne dispose, en tout, que de 6 navires à fin 2021. Quant à sa capacité globale, elle se décline en seulement 5.397 passagers et 1.448 voitures. La moyenne d'âge de ces ferries est de 29 ans avec 40 ans pour Morocco sun (Le Rif), 24 ans pour Tanger express, 40 ans pour Morocco Star, 34 ans pour Med Star, 20 ans pour Bissat, et enfin 20 ans pour Boraq. La conduite des navires sous pavillon marocain est assurée à 94% par les nationaux. Ainsi, le personnel navigant se compose de 335 marins dont 147 officiers. Transport maritime : Zoom sur les compagnies marocaines Africa Morocco Link «AML» est créée en 2016 par BMCE Bank of Africa (51%) et par le grec Attica holdings (49%) pour exploiter des services de ferry réguliers du Maroc vers l'Europe. En 2016, AML démarre avec le Morocco star, renforcé par l'affrètement du Diagoras. En 2020, BMCE Bank of Africa crée la société en nom collectif «TangerMorocco maritime» pour y domicilier le Morocco star. Autrement dit, AML a cessé d'être armateur pour se consacrer à l'exploitation des navires. On peut aussi compter, parmi les opérateurs marocains, Detroit world logistic maritime, propriété de l'homme d'affaires Hakim Rahmouni, qui a été créée en 2016, dans le cadre du rachat aux enchères du ferry Le Rif, rebaptisé Morocco sun en 2019. Il faut enfin noter que l'allemand Förde reederei seetouristik (FRS) a créé et domicilié au Maroc, en 2017, Tanger express. Pour sa part, «Inter shipping», armement marocain, fondé en 2012, couvre le Détroit de Gibraltar. Abdellah Benahmed / Les Inspirations ECO