«Malgré les difficultés du secteur, le paiement électronique est en développement continu dans les pays du Maghreb et de l'Afrique francophone». C'est l'idée qui revient à l'unanimité lors de la conférence de la monnaie et du paiement électronique, organisée à Casablanca la semaine derinère sur le thème «Rôle des acteurs, enjeux et perspectives de développement». Etat des lieux, facteurs bloquants et perspectives du secteur, ce sont les points abordés lors d'un des panels au cours duquel différents pays ont exposé leurs expériences. Que faut-il en retenir? La Mauritanie a du mal Depuis 1994 et la date d'installation du premier DAB (distributeur de billets automatique), le Mauritanie souffre toujours de plusieurs blocages. Citons parmi eux : la mauvaise qualité des services, le faible taux de bancarisation, une offre commerciale inappropriée et surtout les habitudes de consommation du peuple mauritanien qui a tendance à favoriser le cash. Pour détourner les blocages, le GIMTEL (Groupement interbancaire de monétique et des transactions électroniques) a mis en place plusieurs procédures. Au niveau des commençants, il s'agit du lancement d'un réseau de TPE mobile, quasi-gratuit. Pour ce qui est des acteurs du secteur (banques, commerçants, etc.), le GIMTEL a favorisé la sensibilisation. En ce qui concerne les consommateurs, ils ont introduit un nouveau canal qui est le paiement mobile. En dépit de ces efforts, le pays fait face à une problématique importante, à savoir un taux de bancarisation qui reste toujours inférieur a 10%. Pour Amar Oueld Yaacoub, directeur général de GIMTEL, «il est plus difficile de changer les mœurs d'une société. La solution alors est de s'adapter aux habitudes du marché». La Tunisie, un marché scindé Chez nos voisins Tunisien, la place de la monétique dans le système de paiement est critique, mais elle est plus évoluée qu'en Mauritanie. Avec les différents moyens de paiement disponibles dans le pays, la carte bancaire reste l'outil utilisé pour les faibles montants de transfert avec une moyenne de 112TND (607.75MAD), contre 2.653TND (14.396MAD) pour les chèques. Pour les 10,5 millions d'habitants, la Tunisie compte seulement 2,2 millions de porteurs de cartes bancaires, dont 78% habitent la région du Grand Tunis. Cela n'explique pas seulement le faible taux de bancarisation, mais aussi une répartition qui n'est pas équilibrée, ce qui pousse la SMT (Société monétique tunisienne) à adopter différentes stratégies pour chaque région. Selon Khalid Benttaieb, DG de SMT «chaque région a ses propres besoins et ses propres spécificités. Alors, une solution globale ne résoudra pas le problème». C'est pourquoi la SMT a lancé des programmes de fidélité pour encourager les commerçants et les porteurs de cartes, et sensibiliser ces derniers à faire pression sur les commerçants pour payer par carte bancaire. Le Maroc ne s'en sort pas trop mal En 2012, la banque marocaine a émis 9,3 millions de cartes, dont 8,1 millions de cartes "Paiement et retrait", soit une croissance de paiement par carte de 21% par rapport à 2011. Aujourd'hui, près de 30.000 commerçants acceptent le paiement par carte, ce qui représente une croissance de 50% en une année, passant à 6.000 nouveaux affiliés en 2012 contre 4.000 en 2011. Le nombre de porteurs de cartes bancaires locales ne cesse d'augmenter. D'ailleurs, c'est à partir de 2009 que le nombre d'acquisitions par cartes bancaires locales a dépassé celui des cartes étrangères. Le marché marocain s'adapte de plus en plus à ce moyen de paiement et les commerçants sont de plus en plus demandeurs. Cela pousse le CMI (Centre monétique interbancaire) à évoluer et à diversifier son offre par la mise en place des solutions intégrées, des programmes de fidélisation et des services rémunérateur (virement, recharge, ....). Mickael Naciri, Directeur du CMI explique que «Notre premier concurrent aujourd'hui, ce sont les GAB». Par rapport au ratio Paiement/retrait, les Marocains utilisent plus souvent leur carte pour le retrait que pour le paiement. Les chiffres du CMI montrent ainsi une faible croissance et un faible taux de paiement, ce qui reste un défi à relever par le Centre monétique. Quant au m-paiement (paiement par téléphone mobile), plusieurs solutions ont été mises en place sauf que cela reste mono-bancaire. Ainsi et pour faire face à ces défis, le CMI prépare plusieurs plans d'actions pour développer son activité sur le marché marocain : élargissement du réseau de TPE, renforcement de la sécurité et lute contre les fraudes, participation aux projets e-gov (projet de compensation, trésorerie, santé,...). Selon Mickael Naciri, «pour que la monétique se développe, toutes les parties prenantes doivent y trouver leur compte ». Au moment où les pays de l'Afrique francophone connaissent une forte croissance accompagnée par le développement du paiement électronique à travers ses différents canaux, le Maroc semble bien s'en sortir par rapport à ses voisins du nord du continent. Toutefois, ce développement demeure insuffisant par rapport au potentiel supposé par les opérateurs des marchés précités.