Kevin Gormand, CEO et co-fondateur de Mubawab, livre son point de vue sur l'impact des décisions gouvernementales sur l'immobilier, en collaboration avec Maître Faical Lazrak, notaire à Casablanca. Nous vivons dans l'incertitude économique depuis le début de 2020. S'il est impossible de savoir quels changements se profilent à l'horizon 2021, il est, néanmoins, possible d'anticiper et d'introduire des mesures réparatrices visant à donner un coup de pouce aux maillons forts de l'économie nationale. Publiée le 18 décembre 2020 dans le Bulletin officiel, la loi de Finances 2021 se fixe comme objectif d'assurer le retour au niveau d'activité d'avant la crise et de remettre à flot plusieurs secteurs, dont l'immobilier. Les droits d'enregistrement : le grand élan Baisser la pression fiscale sur les acheteurs et encourager l'acte d'achat, tels étaient les objectifs derrière la réduction de 50% sur les droits d'enregistrement au profit des acquéreurs de logements et terrains destinés à un usage d'habitation, atteignant une valeur de 2,5 MDH jusqu'au 31 décembre 2020, décision prise en juillet dernier dans le cadre de la loi de Finances rectificative. La nouveauté dans la LF 2021 est la prolongation de cette mesure jusqu'au 30 juin 2021, avec une extension aux biens atteignant une valeur de 4 millions de dirhams. Elargir la valeur jusqu'à 4 MDH est un amendement qui favorise les transactions au niveau du Grand Casablanca. Cette mesure vise à inciter les consommateurs à acheter tout en permettant aux promoteurs d'écouler leur stock d'invendus, créant ainsi une dynamique dans le secteur de l'immobilier. Reste à espérer que cette mesure soit prolongée jusqu'à fin 2021 pour favoriser davantage les transactions et la relance du secteur. Le pouvoir réparateur des droits d'enregistrement va également s'appliquer aux chefs d'entreprise – dont les professionnels de l'immobilier – avec la suppression des droits d'enregistrement sur les obligations, reconnaissances de dettes et les avances en compte courant d'associés. Une mesure qui va permettre à plusieurs entreprises d'assurer un financement dans ce contexte exceptionnel. Bien que ces actes soient exonérés de l'enregistrement, l'obligation de les déposer au service de l'enregistrement demeure obligatoire, et ce, sous peine de pénalité et/ou majoration de retard. Des mesures en faveur des promoteurs immobiliers Les promoteurs immobiliers peuvent se réjouir de tous les changements apportés à la taxe sur les terrains urbains non-bâtis, dite TNB. En commençant par l'exonération de la TNB aux promoteurs construisant pendant une période maximum de trois ans des résidences et campus universitaires d'au moins 50 chambres dotées de deux lits, au lieu de 500 chambres auparavant. Autre bonne nouvelle, le nouveau délai d'exonération sur la TNB de 5 ans pour les 30 à 100 ha, 7 ans pour les 100 à 250 ha, 10 ans pour les 250 à 400 ha et 15 ans à partir de 400 ha. Cette mesure est importante pour encourager les professionnels de l'immobilier à acquérir du foncier pour construire des logements, notamment dans la région de Casablanca qui dispose de nombreux terrains. Toutes les parties prenantes mobilisées pour la relance La LF 2021 a introduit des mesures positives qu'il faut poursuivre. Toutefois, seules, ces mesures ne suffiront pas à redynamiser le secteur. Aussi, toutes les parties prenantes doivent s'unir en faveur de la relance, promoteurs immobiliers inclus. Les perspectives pour 2021 vont alors dépendre, d'une part, de l'effort réalisé par les promoteurs et, d'autre part, de leur capacité à s'adapter aux nouvelles attentes des Marocains face à leur logement, en termes de types de finitions, d'équipements et de quartiers, notamment. Pour être complète, la loi des Finances de l'année 2021 doit donc accompagner la mise en place de projets correspondants à cette nouvelle réalité et permettre ainsi à l'offre de répondre à la demande existante. En conclusion, la LF 2021 constitue un signal fort envoyé par le gouvernement au secteur immobilier et les différentes dispositions sont de bon augure. Cependant, les professionnels de l'immobilier et le gouvernement marocain doivent véritablement jouer le jeu afin de redresser le secteur, durement impacté par la crise sanitaire, et préparer tout l'écosystème aux défis de demain.