Ilham Bennis. Directrice générale de la BritCham Le 1er janvier, l'Accord d'association liant le Maroc au Royaume-Uni est entré dans sa phase d'application provisoire. Quel est le sentiment qui se dégage de cette actualité ? En quittant l'UE, le grand défi du Royaume-Uni a été de redéfinir ses relations commerciales et de rechercher de nouveaux partenaires avantageux en dehors du bloc européen, notamment sur le continent africain, afin de limiter les pertes causées par ce divorce. Ainsi, le Maroc, au vu de sa place géostratégique, constitue pour le Royaume-Uni un hub et une porte d'entrée vers le marché africain pour renforcer ses investissements et ses exportations. L'accord d'association signé le 26 octobre 2019 est un accord primordial pour les relations bilatérales qui souligne une importance croissante pour les deux parties et assure une transition harmonieuse, qui maintient la fluidité des échanges et garantit leur sécurité après la sortie du Royaume-Uni de l'UE. Pour la BritCham, cet accord est une grande opportunité de renforcer les relations bilatérales et d'augmenter le volume d'échanges et d'investissements entre les deux pays. Quels sont les aspects qui, selon vous, doivent être changés ou consolidés ? L'accord signé entre le Maroc et le Royaume-Uni est un accord qui remplace plus ou moins l'Accord de libre-échange Maroc-UE. C'est donc une continuité, mais avec quelques changements, comme l'augmentation des quotas des exportations de tomates, de fruits, de sardines et autres. Le but n'étant pas seulement de remplacer les anciens accords, mais d'utiliser celui-ci afin de développer les relations déjà existantes et d'augmenter les échanges dans tous les secteurs d'activité. La période à venir sera donc une période transitoire afin d'améliorer et d'amplifier cet accord. Cette transition visera à explorer toutes les possibilités et à trouver le meilleur équilibre qui réponde aux besoins des deux pays. Le rôle de la BritCham durant cette période consistera donc à surveiller, recevoir et être à l'écoute de toutes les données et problèmes que rencontreront les entreprises marocaines et britanniques afin d'avoir une bonne base pour améliorer cet accord d'ici fin 2021. En juin dernier, la Britcham s'est engagée à aller voir ses partenaires britanniques et à reprendre tout le volet des missions commerciales, dès la réouverture des frontières. Où en êtes-vous ? À la BritCham, nous avons une vision simple et claire : intensifier les partenariats bilatéraux et offrir le maximum de visibilité au Maroc afin d'avoir le maximum d'investissements britanniques. Ainsi, toute une nouvelle stratégie a été mise en place afin de déterminer les vrais besoins des deux pays dans différents secteurs d'activité. Cette stratégie, qui fait partie d'un plan triennal, nous permettra non seulement de déterminer les points à améliorer dans l'accord de partenariat mais aussi de «booster» les échanges entre les deux pays et de tirer un avantage maximal du Brexit. Un premier grand chantier a déjà été entamé du côté marocain, et nous sommes maintenant dans la deuxième phase où beaucoup de rencontres et de missions sont prévues au Royaume-Uni, après la réouverture des frontières. Quelles sont les opportunités d'alliance, sachant que tout est à faire et à repenser sur le plan des négociations ? Le Maroc est un pays stable politiquement, économiquement et financièrement parlant. C'est la première chose qu'il faut comprendre. Ces 15 dernières années, l'économie marocaine a changé de visage. L'automobile, l'aérien, le tourisme et l'agro-alimentaire sont devenus des moteurs de croissance. Malgré la pandémie, le Maroc est confiant dans sa capacité à reprendre une croissance économique encore plus importante qu'au cours des cinq dernières années, et le pays est régulièrement dans le top 3 des pays africains attirant le plus d'investissements directs étrangers. Des politiques fiscales très attrayantes ont été mises en place, notamment dans l'industrie. De plus, le climat des affaires s'améliore très significativement. Il ressort du rapport Doing Business 2020 que le Maroc a amélioré son classement de 7 places. Il est classé 1er en Afrique du Nord et 3e dans la région MENA. Il occupe le 1er rang en Afrique de l'Ouest et le 3e dans le continent. Le Royaume-Uni l'a bien compris : l'Afrique passe par le Maroc. Que faut-il faire pour doper les investissements britanniques au Maroc ? Le 20 janvier prochain, le ministère britannique du Commerce international organisera virtuellement, avec le soutien d'Africa Investors Group (groupement des plus grands investisseurs britanniques en Afrique), une conférence sur l'investissement dans le continent. Cet événement marque le premier anniversaire du sommet historique sur l'investissement entre le Royaume-Uni et l'Afrique, organisé par le Premier ministre, Boris Johnson, à Londres en 2020. Nous avons besoin de plus d'initiatives de cette envergure afin de communiquer davantage sur les opportunités d'affaires et d'investissement au Maroc et en Afrique. Au-delà de l'énergie et de la finance, quels sont les secteurs pour lesquels les investisseurs britanniques manifestent le plus d'intérêt ? Le Maroc a fait le choix du développement par l'industrialisation et s'est lancé dans un vaste plan de développement de métiers mondiaux dont l'automobile et l'aérien. L'industrie marocaine représentait environ 15% du PIB en 2000. Elle représente aujourd'hui près de 30% du PIB. Parmi les plus grands succès figurent les implantations de Renault ou encore de Bombardier. En ce moment, PSA et le géant chinois de la voiture électrique BYD construisent leurs usines. L'implantation d'un constructeur britannique est même évoquée au Maroc. Il y a d'immenses opportunités dans ces secteurs où l'Etat accompagne les investisseurs. Autres secteurs porteurs, l'agriculture et l'agro-alimentaire. Le Maroc s'est engagé en 2008 dans un plan de modernisation du secteur agricole. La croissance économique repose encore largement sur ce secteur qui emploie près de 40% de la population active et contribue à près de 15% du PIB. Les Marocains veulent monter en grade dans l'agro-industrie. Modeste Kouame / Les Inspirations Eco