Le Conseil économique social et environnemental s'est saisi de la question de la violence faite aux femmes en élaborant un avis qu'il vient de rendre public, le 16 décembre, lors d'une table ronde virtuelle, organisée avec ONU Femmes sur le thème «Ensemble, pour faire de l'élimination des violences à l'égard des filles et des femmes une priorité nationale». Après le Haut commissariat au plan (HCP), qui a constaté que la violence faite aux femmes s'est exacerbée lors de la période de confinement, le Conseil économique social et environnemental (CESE) s'est saisi de la question à travers l'élaboration d'un avis qui a fait l'unanimité sur l'urgence de stopper ce fléau, le 26 novembre dernier. Cet avis vient d'être rendu public. Cela s'est notamment passé, lors d'une table ronde virtuelle, conjointement organisée par le CESE et ONU Femmes, le 16 décembre, sur le thème «Ensemble, pour faire de l'élimination des violences à l'égard des filles et des femmes une priorité nationale». La rencontre a notamment été l'occasion de mettre en exergue les avancées et les défis rencontrés par le Maroc dans le domaine, et de dégager des recommandations concrètes susceptibles de renforcer l'impact des politiques publiques sur la prévention et l'élimination des violences faites aux filles et aux femmes dans notre pays. Dans son allocution d'ouverture, Ahmed Réda Chami, Président du CESE, a souligné la difficulté de lutter efficacement contre les violences faites aux femmes en l'absence d'une véritable autonomie économique et financière de celles-ci. Selon lui, un changement implique nécessairement de changer les mentalités et de lever les contraintes culturelles qui peuvent être handicapantes pour les femmes en quête d'autonomie, d'émancipation, de citoyenneté pleine et entière et de participation au progrès de la société. Les appels aux numéros d'urgence multipliés par cinq dans certains pays Abondant dans le même sens, Leila Rhiwi, représentante du Bureau Multi-pays d'ONU- Femmes pour le Maghreb, a mis le doigt sur les chiffres effarants de « l'autre pandémie » avant de détailler les recommandations d'ONU Femmes en matière de normes internationales et de bonnes pratiques pour mettre fin aux violences faites aux femmes et aux filles. Les appels aux numéros d'urgence ont été multipliés par cinq dans certains pays du fait de l'augmentation du signalement de violences de la part du partenaire intime liées à la pandémie de Covid-19. C'est ainsi qu'en septembre dernier, 48 pays avaient intégré la prévention et la réponse à la violence à l'égard des femmes et des filles à leurs plans de lutte contre la Covid-19. Revenant sur l'avis du CESE intitulé « Eliminer la violence à l'égard des filles et des femmes : une urgence nationale», Abdemaksoud Rachdi, rapporteur de l'équipe du CESE a d'abord rappelé que l'étude, qui a été adoptée à l'unanimité, le 26 novembre dernier, constate que les différents efforts déployés en vue de contrer la violence à l'égard des femmes, peinent toujours à avoir les effets escomptés. Selon lui, les difficultés rencontrées sont liées à plusieurs facteurs : la place accordée à la question de lutte contre la violence faites aux filles et aux femmes dans les politiques publiques, le faible impact des actions de prévention, le manque de coordination entre les différentes parties prenantes ou encore les nombreuses insuffisances et lacunes qui caractérisent la loi sur la violence faite aux femmes. Ce n'est pas tout, l'avis pointe aussi du doigt l'absence d'un dispositif institutionnalisé de protection territoriale à même d'assurer une détection précoce et une prise en charge efficace et pluridisciplinaire des filles et femmes victimes de violence selon un parcours codifié des victimes. 6 orientations stratégiques et 36 mesures opérationnelles L'avis s'est également arrêté sur les catégories les plus vulnérables. Parmi elles, figurent les filles et femmes handicapées, les femmes migrantes en situation irrégulière, les mères célibataires, ainsi que le personnel de maison. Ces franges de la société sont peu prises en considération au niveau des politiques, programmes et structures mises en place pour lutter contre la violence fondée sur le genre et ne bénéficient pas de programmes et mesures dédiées. Face à ces entraves, le CESE a émis une batterie de recommandations traduites en 6 orientations stratégiques et 36 mesures opérationnelles. Il s'agit notamment d'ériger la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles et la promotion de l'égalité en une cause d'intérêt national prioritaire traduite dans une politique publique globale et transversale s'appuyant sur un budget clairement identifié et sanctuarisé, tout en mettant à profit la coopération internationale en la matière, un cadre normatif conforme aux conventions internationales ratifiées par notre pays, qui promeut et protège, sans aucune discrimination, les droits fondamentaux de chaque individu au sein de la société et qui remédie aux insuffisances de la loi n°103-13 relevées lors de son application. Le CESE a également appelé à promouvoir la culture de l'égalité et de «tolérance zéro » à la violence à travers la mise en place d'une politique globale préventive contre la violence faite aux filles et aux femmes, à éliminer les différents obstacles entravant le droit d'accès des femmes à la justice et mettre en place un dispositif opérationnel territorial et intégré de protection des filles et femmes victimes de violence ou encore à adopter des mesures adaptées aux situations des personnes les plus vulnérables. En plus de ces recommandations, 10 pistes d'amélioration ont été également proposées pour apporter une réponse à la violence contre les filles et les femmes en situation d'urgence. Aziz Diouf / Les Inspirations Eco