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À la reconquête du marché british
Publié dans Les ECO le 01 - 08 - 2012

Samedi 28 juillet, Kensington Gardens, Londres. Les officiels inaugurent un stand promotionnel marocain en plein coeur du village olympique. Cet espace de 150 m2 investira l'Africa Village jusqu'au 12 août prochain. Il s'agit de profiter de l'affluence qui marque les jeux olympiques, près de 10 millions de personnes à chaque édition, pour faire la promotion du royaume. Véritable attraction, ce stand met en avant les diverses potentialités du Maroc, aussi bien artisanales que touristiques, sans oublier les produits du terroir. Exposition de produits artisanaux, démonstrations culinaires, dégustation de mets gastronomiques marocains, défilés de caftans...tout y est pour dévoiler les atouts du Maroc aux visiteurs de l'Africa Village, dont le nombre est estimé à près de 140.000. Cette opération de charme n'est pas fortuite. Elle s'inscrit dans le cadre d'une stratégie bien définie. Le Maroc est déterminé à reconquérir les touristes britanniques, réputés exigeants en matière de sécurité et de qualité. Et l'effort en vaut la chandelle jugez-en vous mêmes. Le Royaume-Uni, est l'un des plus grand pays pourvoyeurs de touristes dans le monde, avec près de 60 millions de voyageurs par an. Seulement, il se trouve qu'à l'heure où la crise économique sévit en Europe, les Britanniques ont réduit leurs séjours à l'étranger y compris au Maroc. Cette crise a eu également des répercussions sur l'aérien avec la suppression de plusieurs connexions entre le Maroc et le Royaume-Uni, notamment des vols de la RAM et de Ryanair. De même que la crise géopolitique dans le monde arabe a rajouté son grain de sel à la situation. Une étude du portail britannique comparateur de prix TravelSupermarket place indique, en effet, que les pays maghrébins, figurent parmi les destinations les moins prisées des touristes britanniques en 2012. Le site, bien qu'il reconnaisse l'exception marocaine, explique cela par l'instabilité relative dans la région.
Toute l'importance est de pouvoir réduire les effets négatifs de la crise et regagner de l'intérêt aux yeux des touristes britanniques, tout en mettant l'accent sur les avantages comparatifs dont jouit le Maroc, en particulier sa proximité géographique par rapport au Royaume-Uni (moins de trois heures de vol), son héritage culturel et civilisationnel, ainsi que ses infrastructures touristiques. Actuellement, ils sont, en moyenne, 350.000 touristes anglais à visiter le Maroc chaque année. L'ambition est de porter ce nombre à 1 million par an, et ceci grâce à la multiplication des campagnes agressives de communication et de sensibilisation. Ces actions de promotion visent également les leaders d'opinion en Grande-Bretagne et les professionnels du secteur afin de les sensibiliser aux divers atouts touristiques du Maroc. De nouvelles conventions seraient, même, signées avec les Tours opérateurs britanniques dans le but d'approfondir les liens de partenariat et augmenter les flux des touristes britanniques vers le Maroc. D'ailleurs, durant le premier semestre de l'année 2012, l'ONMT a lancé une campagne institutionnelle au niveau des médias les plus porteurs (affichage urbain, presse écrite, publicité online, cinéma...). Plusieurs éductours ont été organisés (à Mazagan, Marrakech, Ouarzazate, Agadir, Essaouira) en faveur des agents de voyage britanniques pour les familiariser avec l'offre Maroc et les inciter à mieux vendre la destination. Ceci, en plus de l'organisation d'un roadshow sur le Maroc qui a couvert plusieurs villes britanniques (Gatwick, Birmingham, Manchester et Norwich) ainsi qu'un workshop Maroc à Londres. Autant d'actions de promotion, qui certes ont donné leurs fruits comme en témoigne la bonne tenue du marché britannique en mai 2012 avec une progression des nuitées de 2% sur une année, seulement, ils se heurtent à une problématique de taille, l'insuffisance des dessertes aériennes entre le Maroc et la Grande-Bretagne.
L'aérien, point noir au tableau
Le ministre du Tourisme Lahcen Haddad ne cesse de rassurer les opérateurs par rapport à ce point qui noircit le tableau de la destination Maroc. Le grand défi aujourd'hui est de réussir à inciter les compagnies aériennes à augmenter les fréquences de leurs vols sur le Maroc, en particulier sur les destinations matures comme Agadir et Marrakech. À ce jour, British Midland International (BMI) et British Airways sont les deux compagnies régulières britanniques qui desservent ces deux villes. Pour l'automne 2012, British Airways a annoncé il y a quelques semaines, des modifications de sa desserte du Maroc, remplaçant en partie sa filiale BMI sur les vols vers Marrakech et Agadir. Ainsi, à compter du 28 octobre 2012, la compagnie nationale britannique proposera, sous son nom, 7 vols par semaine au lieu de 3 entre l'aéroport de Londres-Gatwick et Marrakech, les vols opérés par BMI au départ d'Heathrow passant en revanche de 5 à 3, compensant exactement l'annonce de la low cost Ryanair qui en supprimera autant entre Luton et Marrakech au 1er octobre. Du côté d'Agadir, British Airways remplacera les 2 vols par semaine de BMI (mardi et samedi cet été) par les siens, qui seront alors décalés au samedi et dimanche avec départ d'Heathrow. Pour rappel, British Airways propose une 3e destination au Maroc, Casablanca (opérée par BMI). S'agissant des compagnies low cost qui assurent des lignes entre le Maroc et la Grande-Bretagne, elles sont deux. Easy Jet, qui a annoncé dernièrement la suppression de lignes en provenance et à destination du Maroc et Ryanair qui supprimera ses vols vers le Maroc à partir du 1er octobre prochain, et ceci suite à la hausse des taxes d'utilisation des aéroports marocains. Un coup dur pour la destination Maroc qui ambitionne d'atteindre 20 millions de touristes par an à l'horizon 2020.
Ali Kasmi,
Ex-délégué de l'ONMT à Londres, DG de Travel Link et président de la commission Marchés au CRT Marrakech.
«La clé du succès réside dans l'aérien»
Les Echos quotidien : est-il facile de convaincre le touriste britannique de l'offre touristique du Maroc ?
Ali Kasmi : Le marché britannique offre un gros potentiel pour le Maroc. Il a été développé ces dernières années grâce, d'une part, à l'accord de l'Open Sky qui a permis l'arrivée des compagnies low cost et d'autre part, à l'agressivité des stratégies marketing lancées par l'ONMT. De gros moyens étaient engagés pour inclure la Grande Bretagne parmi les marchés prioritaires du Maroc. Une stratégie qui a donné d'excellents résultats. À fin 2011, le Maroc a drainé 1,5 million de touristes anglais. Un nombre qui demeure limité vu que le marché britannique est le deuxième marché pourvoyeur de touristes dans le monde après l'Allemagne. Le Maroc peut éventuellement attirer cette clientèle particulière s'il continue à agir de manière à adapter le produit marocain à la demande de ces touristes qui ont des exigences différentes de celles des espagnols et des français.
Est-ce que l'offre est adaptée à la demande du touriste britannique ?
On a le produit adapté au marché britannique. D'autant que, de plus en plus, les touristes britanniques ont un penchant pour le culturel, l'historique et le tourisme durable plutôt que pour le balnéaire. Cela fait près de six ans que le marché connaît ce revirement de tendances. Une évolution favorable pour le Maroc. En effet, on ne peut pas concurrencer des destinations comme la Turquie, la Tunisie et l'Egypte sur le balnéaire. Nous avons une offre trop limitée sur ce produit. Par contre, le Maroc développe un produit culturel fort, en plus du tourisme responsable, des produits de niche avec le golf et le spa par exemple. C'est ce qui explique d'ailleurs, le nombre plus important des arrivées de touristes britanniques sur Marrakech plutôt que sur Agadir. Même le nombre de liaisons aériennes en provenance de Londres est plus élevé avec Marrakech qu'avec Agadir. Il faut donc juste se donner les bons moyens pour réussir.
Quel est selon vous le principal handicap ?
L'aérien est le grand problème si on le ramène à la particularité du marché britannique. Le Maroc a travaillé cet handicap en établissant des liens entre Londres et Marrakech, mais cela reste en deçà des aspirations et ne répond pas aux exigences en matière de voyage du touriste anglais. Ceci étant, il sera même difficile d'atteindre le million de touristes britanniques par an. Cet objectif ne pourra être atteint que si on arrive à résoudre la problématique de l'aérien. Il faut savoir que tous les aéroports anglais sont reliés à toutes les destinations mondiales, alors que le Maroc se contente de quelques lignes.
Or, les britanniques cherchent le point à point et les vols directs sur le reste du monde. La clé du succès de l'offre Maroc réside dans l'aérien.
Une destination populaire
Pour les britanniques, le Maroc est essentiellement une destination populaire. C'est dans cet esprit qu'une campagne de sensibilisation et d'information des visiteurs et des résidents britanniques sur les spécificités et la particularité du mois sacré du Ramadan au Maroc, a été lancée début juillet dernier, à Marrakech, à l'initiative de la section consulaire de la Grande-Bretagne à Rabat. L'objectif de cette initiative est d'encourager ces touristes à se rendre nombreux au Royaume pendant le mois de Ramadan. Il s'agit en fait de mettre un terme à certains préjugés et idées «stéréotypées» et «fausses» véhiculées sur le Ramadan et surtout d'accompagner les efforts visant la promotion de la destination Maroc durant ce mois sacré où l'activité touristique est au ralenti car, même les nationaux, qui sont au secours du tourisme marocain en ces temps de crise, préfèrent passer le mois de ramadan en famille. Les offres alléchantes de kounouz Biladi qui arrivent avec des packages dédiés au mois sacré arriveront-elles à leur faire changer d'habitudes ? Wait an see.


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