L'enseignement à distance ne remplacera pas l'enseignement présentiel, mais l'expérience démontre qu'il est indispensable de disposer d'un dispositif de télé-enseignement efficace pour non seulement faire face aux imprévus tels que la crise sanitaire actuelle mais aussi améliorer les acquis des élèves. Dans ce cas, où en est le Maroc ? Le ministre de l'Education nationale, de la formation professionnelle, de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Saaid Amzazi affiche son optimisme. Un projet complet de l'école numérique et de l'université numérique est fin prêt. Bientôt le Maroc disposera d'un système d'enseignement à distance. L'annonce a été faite, cette semaine après son premier passage chez les conseillers, par le ministre de tutelle aux députés de la commission de l'enseignement, de la culture et de la communication. Le dossier est de la plus haute importance et devra être discuté encore une fois au sein de la chambre basse, lundi prochain. En dépit des dysfonctionnements qui émaillent l'expérience actuelle, il a été constaté que le système d'enseignement national est capable de développer l'enseignement à distance et de tirer parti de ses multiples avantages. D'ailleurs ce qui a été fait en deux mois -et sous pression- dépasse de loin le bilan de plusieurs années en matière de digitalisation de l'enseignement, comme le souligne le ministre de tutelle. À titre d'exemple, les ressources numériques de l'enseignement fondamental (primaire, collège, lycée) sont passées de 600 avant la crise à plus de 6000 actuellement. Un record! Et pour la première fois, élèves et enseignants sont connectés à distance. L'ambition est de développer cette expérience et la rendre durable. Pour ce faire, il faudra mobilier des ressources financières supplémentaires. Certains parlementaires espèrent que la Loi de finances rectificative en vue permettra d'augmenter le budget du secteur de l'enseignement pour concrétiser cet objectif et mettre sur les rails la réforme éducative tant souhaitée. Financer les ambitions Confiant, le ministre de l'Education nationale est assuré de l'appui du gouvernement. Le ministre de l'Economie, des finances et de la réforme de l'administration, Mohamed Benchaâboun, a donné son accord pour financer l'enseignement à distance et valoriser l'expérience en cours, selon Amzazi. C'est l'occasion ou jamais de développer l'e-learning au Maroc à l'instar de ce qui est fait sous d'autres cieux. D'ailleurs, c'est l'une des dispositions de la loi-cadre de l'éducation et de la formation qui a été adoptée l'année dernière, comme le rappellent, à plusieurs reprises, le responsable gouvernemental et les députés. L'article 33 de ce texte stipule la nécessité de développer l'enseignement à distance qui est considéré comme complémentaire à l'enseignement présentiel et envisage l'intégration de l'enseignement électronique dans le système dans la perspective de sa généralisation de manière progressive. L'Etat est, tenu en vertu de l'article 49 de la loi cadre, de développer des programmes de partenariat dans le cadre de la coopération internationale pour promouvoir, entre autres, l'enseignement à distance. Plusieurs paramètres De grands efforts restent à déployer. La machine n'est pas encore bien huilée. Amzazi reconnait les failles du dispositif mis en place depuis la suspension des cours. Une amélioration s'impose pour atteindre non seulement la qualité de l'enseignement escomptée mais aussi pour ne laisser personne pour compte. Des milliers d'élèves ont été privés de l'apprentissage depuis le 16 mars surtout en milieu rural pour deux principales raisons : la difficulté d'accès à Internet et le manque d'encadrement pédagogique des familles. Plusieurs paramètres doivent être pris en considération pour donner un coup de fouet au télé-enseignement. Outre l'importance de la résolution des problèmes techniques et de l'accompagnement familial, les enseignants constituent un élément-clé dans la réussite de l'enseignement à distance. À cet égard, le département de tutelle dispose d'une vision de formation des enseignants aux techniques de l'enseignement à distance. Il faut dire que plusieurs enseignants n'ont pas pu s'adapter à l'enseignement à distance et se sont plaints des difficultés qu'ils rencontrent pour utiliser les nouvelles technologies de l'information et de la communication. Actuellement, l'enseignement à distance n'est pas obligatoire. En effet, rien dans la loi ne l'impose. La mise en place d'un système national d'e-learning imposera à tous les enseignants d'introduire les NTIC dans leur planning d'enseignement. La publication d'un décret réservé à l'obligation de l'usage des NTIC est érigée en priorité, comme l'a déjà souligné Amzazi aux Inspirations ECO. L'utilisation des supports numériques devra être une activité obligatoire au sein des classes pour favoriser «le travail collaboratif et développer le sens critique, l'esprit d'analyse...». La réforme reportée La réforme de l'enseignement supérieur que comptait mettre en place Saaid Amzazi dès la prochaine rentrée universitaire sera reportée à 2021. La conjoncture actuelle ne permet pas en effet de mettre en place la nouvelle architecture universitaire qui nécessite l'adhésion des enseignants. Actuellement, la priorité sera accordée à la gestion du reste de l'année et des examens. À l'instar des établissements l'enseignement fondamental, les universités n'ouvriront leurs portes qu'en septembre. Après coordination avec les départements de l'Intérieur et de la Santé, Amzazi annoncera bientôt la vision gouvernementale de gestion des examens au niveau de l'enseignement supérieur. L'opération d'enregistrement au niveau des universités qui se faisait en juillet sera reportée à septembre. Les concours, du moins ceux qui sont encore maintenus, seront aussi ajournés. Quant aux soutenances, elles peuvent se faire à distance à l'instar de ce qui a été fait par la Faculté de droit d'Agdal.