Al-Jazeera 1, Canal+ 0. Le match qui opposera dorénavant le groupe qatari au bouquet satellitaire français s'annonce pour le moins serré. Et pour cause, c'est aujourd'hui que le groupe audiovisuel panarabe lance sa nouvelle chaîne sportive en français, baptisée BeIN Sport 1. La petite sœur de cette dernière, BeIN Sport 2, est prévue quant à elle pour le début du mois d'août. En principe payante, la nouvelle venue prévoit, pour ses débuts, trois tranches horaires CET (Central European Time) en clair, histoire d'attirer le chaland. Trois types d'aperçu qui devraient laisser le temps aux «futurs» abonnés, notamment francophones et européens, d'avoir un avant-goût des nouveaux produits sportifs de la chaîne. Et quels produits ! À travers cette nouvelle antenne francophone, Al-Jazeera s'attaque ouvertement au jusqu'ici champion européen de la retransmission sportive, à savoir Canal+ avec sa chaîne thématique Canal+ Sport. Pour convaincre ses futurs adeptes, que l'on imagine déjà nombreux, le groupe s'est payé l'intégralité des matchs de l'Euro 2012 (qui débute le 8 juin), ceux de la Ligue 1 (8 matchs en direct et 2 en différé), de la Ligue des Champions de France (133 directs et 13 différés), les championnats d'Espagne et d'Italie autrement dit tous ceux de l'Europa League. Les premiers chèques pour les droits de retransmission étaient estimés à pas moins de 400 M€, uniquement pour le ballon rond. «Ce choix symbolise l'esprit de ce que seront ces deux chaînes tournées vers la diffusion en direct et en exclusivité des plus grands événements», explique le président de la chaîne, Nasser al-Khelaïfi. Et ce n'est pas tout. On commence à en prendre l'habitude, surtout après la dernière Coupe du monde. Quand le «bulldozer médiatico-sportif» d'Al-Jazeera passe par là, il ne laisse pas grand-chose à ses concurrents. La preuve, la chaîne qatariote a récemment signé «quelques épreuves» des J.O. de Londres, notamment pour le basket et le tennis. Le tout, vendu au final pour à peine 11 € par mois. Avec une telle offre, et si la chaîne qatariote parvient à maintenir ses promesses, le choix des téléspectateurs sera vite fait. Autant dire que les opérateurs français qui avaient l'habitude de traiter avec le groupe, bien de chez eux, devraient d'ores et déjà se préparer à de nouvelles négociations avec la chaîne – désormais – multilingue. C'est pratiquement déjà le cas pour le groupe Orange, dont la chaîne Orange Sport devrait jeter l'éponge d'ici à la fin du mois de juin. En effet, al-Khelaïfi, devrait déjà se frotter les mains à l'idée de voir les 300.000 abonnés Orange rejoindre son antenne. Restant tout de même raisonnable, le président d'Al-Jazeera Sport a déclaré aux médias français qu'il «faudra beaucoup de travail, beaucoup d'humilité pour séduire les millions d'abonnés que nous voulons satisfaire». Et d'ajouter «Peut-être connaîtrons-nous des périodes de doute et – pourquoi pas ? – des échecs (...)». Cette hypothèse serait d'autant plus plausible si la chaîne n'avait à son actif l'expérience et les moyens qui lui ont permis jusqu'ici de coiffer ses concurrentes du marché arabe et moyen-oriental. Au Maroc, et en dépit de la forte concurrence du marché parallèle, rappelons que la chaîne arrive – selon la dernière étude intermétrique – troisième du classement des télévisions captées par nos antennes paraboliques. Si la chaîne qatariote décide donc de s'accaparer le ballon, même de l'autre côté du détroit, les concurrents désormais devront changer de jeux.