À l'occasion de son assemblée générale annuelle qui se tenait hier en Tanzanie, la Banque africaine de développement (BAD) a présenté son dernier rapport sur les «Perspectives économiques en Afrique». Et pour cette édition 2012 du rapport, la BAD a choisi de se focaliser sur l'emploi des jeunes. Un choix qui est loin d'être anodin, si l'on considère la forte proportion de jeunes sur le continent africain. La BAD considère ainsi qu'avec près de 200 millions d'habitants, âgés de 15 à 24 ans, l'Afrique possède la population la plus jeune du monde. «Le nombre de jeunes en Afrique aura doublé d'ici 2045. De 2000 à 2008, la population en âge de travailler (15-64 ans), est passée de 443 millions à 550 millions, soit une hausse de 25%. Si cette tendance se poursuit, la main-d'oeuvre du continent sera d'un milliard de personnes en 2040», précise ainsi le rapport. Et ce serait alors la plus nombreuse au monde, dépassant celle de la Chine et de l'Inde, comme l'avait déjà présenté McKinsey en 2010. Malgré ce constat, l'employabilité des jeunes en Afrique reste faible. Pour résumer, le rapport de la BAD évoque le fait que dans les pays pauvres, la plupart des jeunes travaillent, mais que dans les pays plus riches, les jeunes sont plus nombreux à être sans emploi qu'à travailler. Regroupés dans une même catégorie de marché du travail, le Maroc, la Tunisie et l'Egypte suivent une tendance générale analogue au groupe réunissant l'Algérie, l'Afrique du Sud et le Bostwana, avec un faible taux d'emploi précaire et un taux de jeunes, Not in Education, Employment or Training (NEET) relativement élevé. Néanmoins, les Maghrébins affichent globalement une meilleure mine, avec moins de NEET et davantage d'emplois salariés que le groupe réunissant l'Algérie, l'Afrique du Sud et le Bostwana. Les jeunes sont peu demandés Malgré cette forte proportion de jeunes en Afrique, les perspectives d'emploi pour ces jeunes restent peu encourageantes. Bien que le chômage ait fortement régressé au cours de la décennie qui a précédé la crise économique mondiale, cette progression de l'emploi a été loin d'être suffisante pour absorber une population active de plus en plus nombreuse. De plus, les secteurs informels et de l'agriculture ont limité l'impact de la crise sur l'Afrique. Pour la BAD, «la capacité d'emploi est simplement trop faible dans les secteurs privés et publics» . Et ce constat vaudrait surtout pour le secteur public. La proportion de jeunes exerçant dans le service public est bien moindre que celle des adultes. Ainsi, en Egypte, au Maroc et en Ouganda, la proportion de fonctionnaires parmi les jeunes ne représente qu'un tiers de celle des adultes. Du côté du privé, la croissance des emplois salariés de bonne qualité est encore plus limitée. Dans son rapport, la BAD fustige l'insuffisance de la demande de travailleurs jeunes. Les expertspays citent ainsi, «la discrimination à l'encontre de ceux qui recherchent un premier emploi, la nette préférence dont témoignent les employeurs pour l'expérience professionnelle, la nécessité de passer par des réseaux pour obtenir un emploi et la réglementation du travail, qui conduit à une partition du marché du travail, selon laquelle ceux qui ont un emploi (les adultes) sont protégés et ceux qui en cherchent un (les jeunes), pâtissent d'une forte réticence de la part des employeurs», comme principaux obstacles à l'employabilité des jeunes Africains. L'inadéquation des qualifications, le manque d'information sur le marché du travail et l'attitude des employeurs, ont été identifiés comme des obstacles majeurs dans moins de la moitié des pays de l'enquête. «En Afrique, le problème de l'emploi des jeunes est surtout de nature structurelle et appelle donc des solutions structurelles», conclut le rapport. Pour remédier à ces difficultés, la BAD recommande aux autorités de «remédier aux goulets d'étranglement qui compriment la demande de travail, tout en aidant les jeunes à se doter des compétences nécessaires pour réussir sur un marché du travail rude». Cela passe à la fois par une reconsidération du secteur informel et des zones rurales et par la promotion des études supérieures. Si la tendance actuelle se poursuit, d'ici 2030, 59% des 20-24 ans africains auront reçu un enseignement secondaire, contre 42% actuellement.