Les plats préparés made in Morocco ont la cote. Si les Marocains sont encore frileux à l'idée de «cuisiner» un tajine en cinq minutes grâce à une sauce prête à réchauffer, le marché à l'export peut révéler un potentiel non négligeable pour les industriels nationaux, et Jamil Benhassain l'a bien compris. En 2009, cet ancien entrepreneur lançait la marque Tajini. Au «menu», figurent quatre sauces pour tajines. Fabriquées sans conservateurs, ces sauces contiennent des ingrédients principalement d'origine marocaine. Préférant garder le processus de fabrication secret, Jamil Benhassain avoue seulement qu'il «industrialise ce que l'on fait à la maison». Raisins secs, poisson, olives-citrons confits et tomates-oignons... les recettes ont été élaborées par le directeur général en personne, un ancien professionnel de l'impression d'étiquettes qui traitait d'ailleurs souvent avec des professionnels de l'agroalimentaire. «J'entretenais alors le virus de la cuisine marocaine», explique Benhassain, aujourd'hui fier DG de sa propre marque. «Je suis parti du constat que la cuisine marocaine n'était pas assez présente dans les grandes surfaces. J'ai alors eu l'idée de lancer des sauces pour tajines comme il existe des sauces chinoises, italiennes, indiennes, etc.», poursuit-il. À ses débuts, et surtout pour limiter ses investissements, l'entrepreneur est d'abord passé par un sous-traitant opérant dans la conserverie. «J'ai préféré travailler avec un partenaire, le temps de lancer le produit avant d'investir dans un outil industriel et de devenir ainsi autonome», explique-t-il, mais depuis 2011 et cette participation entérinée avec des fonds d'investissement locaux, Tajini est prête à passer à la vitesse supérieure. L'unité de production, installée dans la zone industrielle de Salé, sera ainsi opérationnelle dans les prochaines semaines. Elle aura nécessité un investissement de plus de 10 MDH, correspondant à l'équipement, Tajini n'étant que locataire des lieux. Celle-ci permettra à la marque de doubler sa production, à l'image de l'évolution enregistrée entre 2010 et 2011. Une trentaine de salariés s'y affaireront. Au final, Jamil Benhassain a joué la carte de la prudence sur tous les tableaux. La marque a ainsi d'abord été testée sur le marché de l'export. Ce n'est qu'un an plus tard, en 2010 donc, que les produits Tajini ont été disponibles sur les étals marocains. Aujourd'hui encore, l'export domine les ventes : 90% du chiffre d'affaires est issu de l'export. L'Europe, les Etats-Unis et le Moyen-Orient, avec Dubaï pour plateforme, se partagent à parts égales les importations de Tajini. Présent à l'occasion du Sial de Montréal, Tajini ne devrait pas tarder à être également disponible au Canada. Réseau moderne pour cuisine marocaine modernisée Une étude de marché a révélé que les Marocains appréciaient également le produit. Bien sûr, la clientèle actuelle est fortement composée de citadins et de catégories socioprofessionnelles supérieure et intermédiaire. «Le marché est loin d'être mûr, et cela va être difficile de développer ce créneau au Maroc», avoue Jamil Benhassain. Néanmoins, Tajini compte bien se démocratiser auprès de l'ensemble des consommateurs. «On ne cuisine déjà plus comme avant. Avec Tajini, l'idée est de créer le même réflexe que l'on peut avoir pour les pâtes que l'on accompagne de sauces italiennes préparées», argumente le DG. L'une des façons d'y parvenir sera d'élargir le réseau de distribution. Pour l'heure, Tajini mise essentiellement sur les grandes et moyennes surfaces, qu'il s'agisse d'ailleurs du marché de l'export ou du local. C'est ainsi qu'au Maroc, les produits Tajini sont pour l'instant disponibles dans le réseau des Carrefour. Idem en France où la marque est commercialisée dans les Carrefour, les Cora, les E.Leclerc et les Casino. En disposant de sa propre usine, Tajini compte bien accélérer sa production et s'ouvrir ainsi à l'ensemble des GMS au niveau national. Un partenariat avec un transporteur national est ainsi en cours de négociation pour assurer les besoins logistiques. Avec sa propre usine, Tajini compte également jouer sur les prix, puisqu'elle pourra désormais mieux maîtriser ses coûts. Grâce à l'ouverture de son capital à des partenaires locaux, et à l'évolution satisfaisante du chiffre d'affaires (+50% entre 2010 et 2011), Tajini peut se permettre l'élaboration d'un plan de développement pour les cinq prochaines années, incluant le lancement de nouveaux concepts et nouveaux produits afin de mieux répondre à la demande. En 2011 déjà, des sauces dédiées à la préparation du couscous étaient lancées pour le marché de l'export. 80% de l'investissement nécessaire pour la R&D est pris en charge par Jamil Benhassain lui-même. En 2012, Tajini aura un calendrier chargé, de la mise en place d'un nouveau packaging à l'obtention très probable des certifications habituelles dans le domaine de l'agroalimentaire.