«La réforme de la retraite sera pour 2012». C'est là l'espoir nourri par Khalid Cheddadi, président directeur général de la Caisse interprofessionnelle marocaine de retraite (CIMR). Certes, de tous les régimes de retraite au Maroc, la CIMR est incontestablement la seule à tirer son épingle du jeu quant aux menaces qui pèsent sur leur viabilité. Cependant, cela n'empêche pas le patron du régime de rappeler l'urgence que nécessite la réforme. «Les études ont démarré en 2004 et nous sommes aujourd'hui en 2012, sans qu'aucune décision n'ait été prise. Si nous avions été plus rapides, ceux qui n'avaient pas de retraite, auraient facilement pu gagner six ans de couverture», déplore-t-il. Pourquoi donc tout ce retard ? Qu'est-ce qui fait penser à Cheddadi que la réforme sera bien pour 2012? Pour ce dernier, il ne faut pas aller bien loin pour comprendre ce qui bloque cette réforme. Manque de courage politique En effet, la commission technique chargée de cette réforme est constituée à la fois de représentants des régimes de retraite de l'Etat et des représentants sociaux des salariés marocains. Or, tous n'ont pas aujourd'hui suffisamment de «courage» pour prendre des décisions impopulaires certes, mais qui sont indispensables pour sauver le système des retraites au Maroc. «Il ne peut y avoir que de mauvaises nouvelles dans cette réforme», ajoute Cheddadi. Il s'agit par exemple du relèvement de l'âge de la retraite. Récemment, le ministre des Finances, Nizar Baraka, avait écarté, lors des récentes sorties médiatiques, le recours à un relèvement de l'âge de la retraite (à 62 ans). Cependant, la situation est telle aujourd'hui, que si l'âge de la retraite est maintenu à 60 ans, il sera indispensable soit de relever la base des cotisations, soit de faire adhérer davantage de personnes et cela passerait par des recrutements massifs. C'est dire que le choix n'est pas aussi évident, c'est d'ailleurs là l'une des raisons qui pousserait les partenaires sociaux participant à la commission technique chargée de la réforme à ne pas prendre des décisions trop hâtives. «Pour les syndicalistes, la situation est complexe et il est donc normal qu'ils aient du mal à trancher sur des questions ayant des conséquences directes sur les travailleurs, qui demain pourraient leur demander des comptes», reconnaît Cheddadi. 2012, un échancier critique En parallèle, le gouvernement qui promet de militer pour la création d'emplois, risquerait d'être freiné par un quelconque relèvement de l'âge de la retraite. Cela-dit, c'est la raison qui pousse Cheddadi à croire en une réforme dès cette année. Le gouvernement a clairement placé la réforme de la retraite en priorité de ses déclarations gouvernementales. De plus, pour certaines Caisses, l'échéancier 2012 est critique et nul n'oserait risquer la faillite du système de retraite au Maroc, même si les décisions à prendre sont impopulaires. En attendant de voir si les espérances de Cheddadi se concrétiseront, le patron de la CIMR peut au moins être rassuré quant à la santé du régime de retraite qu'il chapeaute. Selon les derniers calculs prévisionnels établis, la CIMR est en effet viable au-delà des 60 prochaines années. En prime, les prévisions établies font que non seulement la CIMR ne va pas toucher à ses réserves pour rembourser les prestations sur les 60 ans à venir, mais verra au contraire ses réserves augmenter davantage. Autorégulation, clé de la réussite C'est ce qui rassure Cheddadi quant à la réussite de la stratégie du top management de la Caisse. Pour lui, «la clé de succès de la CIMR se situe dans son système de gouvernance et dans son organisation, lui permettant d'être très réactive». Le Conseil d'administration de la CIMR inclut en effet des administrateurs qui ont fait leurs preuves dans le management des plus grandes entreprises adhérentes au régime. Ceci permet donc à la CIMR de disposer d'une expérience managériale qui lui permet de mieux résister aux chocs externes. «Les problèmes de la retraite au Maroc ont été évoqués par la Banque mondiale, à la fin des années 90. À l'époque, nous n'avions pas attendu pour réagir et c'est ce qui fait de nous l'exception des systèmes de retraite au Maroc», se réjouit Cheddadi, qui déplore que «les autres régimes disposent d'une organisation qui ne leur permet pas d'être réactifs. Il faut notamment faire valider les décisions par plusieurs comités et conseils avant de proposer des textes de loi et c'est une procédures lourde». La CIMR est une Caisse de retraite autonome, qui dispose d'une grande pro-activité décisionnelle. De là provient la recommandation de Cheddadi «d'accorder aux autres Caisses de retraite des outils nécessaires leur permettant de s'autoréguler». Certes, en cas de réforme systémique, il faut bien recourir à la loi. Cependant, pour le régime en lui-même, il faut être capable de se réajuster rapidement, sans pour autant dépendre d'un système législatif.