● Après une année difficile, le secteur s'offre d'autres ambitions ● La mise en oeuvre de la nouvelle stratégie sectorielle et l'environnement national et international augurent de perspectives prometteuses pour la croissance Surfant sur la vague de la reprise économique, certes encore en dents de scie, dans la zone européenne, l'industrie marocaine du textile et de l'habillement entame la nouvelle année sous de bons auspices. Après plusieurs années de vaches maigres, l'ère est dorénavant à l'optimisme pour les professionnels du secteur qui tablent sur la mise en œuvre du nouveau plan stratégique 2010-2012 pour doper leurs performances industrielles et commerciales afin de mieux se positionner à l'international malgré la rude concurrence qui affecte le marché. Présentée le 16 décembre dernier à l'occasion de l'assemblée générale de l'Association marocaine des industries du textile et de l'habillement (AMITH), la nouvelle politique nationale sectorielle décline les ambitions majeures de ce maillon important de l'économie nationale. Les différents chantiers et programmes qui constituent l'ossature de la stratégie ont été orientés plus vers l'accompagnement des entreprises nationales vers la compétitivité et un meilleur positionnement dans la chaîne de valeur textile afin de mieux tirer profit des opportunités de développement qu'offre le marché international sans pour autant négliger la demande intérieure. À terme, la stratégie devrait permettre un réaménagement des fondamentaux du secteur afin de la positionner au rang d'une filière intégrée et ainsi gagner en valeur ajoutée, notamment par une hausse des gains de compétitivité additionnelle. Conjoncture favorable Ce dynamisme qu'affiche l'industrie marocaine du textile et de l'habillement s'explique principalement par un contexte national et international qui offre des perspectives prometteuses pour le secteur. D'abord au niveau international et principalement celui du marché européen de textile qui connaît ces derniers mois un regain de reprise. Selon les chiffres publiés par Eurostat, les exportations européennes de produits textiles au cours des neufs premiers mois de 2010 ont progressé de près de 10% par rapport à 2009. Les marchés de délocalisation vers lesquels l'Europe exporte temporairement des tissus destinés à la production de vêtements en sous-traitance, selon la procédure d'admission temporaire, ont conséquemment connu une hausse de leurs activités. Selon les chiffres rapportés par le dernier bulletin du Cercle euro-méditerranéen des dirigeants de textile-habillement (CEDITH), cette reprise de consommation vestimentaire en Europe s'est traduite par une hausse de l'ordre de 10,4% pour le Maroc en termes d'exportations à septembre 2010. Le royaume profite d'ailleurs mieux que la Tunisie avec ses 7,7% et même la Turquie, premier fournisseur européen en la matière qui ne récolte que 8,7%. Quoique sur le plan de l'habillement la reprise n'ait pas connu le même élan, la tendance a impacté positivement l'industrie nationale comparativement au début de l'année 2010 qui a été marqué par une baisse considérable des exportations pour le secteur. Selon les chiffres de l'Office des changes, les performances ont relativement été médiocres sur le premier semestre de 2010, puisqu'elles affichaient une baisse de 15,7% par rapport à leur niveau de 2009 sur la même période avec un pic au niveau des exportations des vêtements qui ont régressé de 16,8%. Autre facteur à prendre en compte, le marché intérieur en pleine restructuration et porté par une demande en hausse en raison d'un développement planifié des réseaux de distribution et la promotion des marques locales qui prend progressivement son envol (voir encadré). À cela s'ajoute la stratégie de lutte contre l'informel qui permettra d'assainir le secteur. Selon la CEDITH, une étude en cours de finalisation estime le marché intérieur à près de 40 milliards de DH. Une manne non encore exploitée comme il se doit et qui apportera également un plus dans la perspective de développement du secteur. Défis à relever Cependant, une chose est de fixer des objectifs à tous points de vue ambitieux, et une autre de les réaliser, car il faudrait bien y mettre les moyens. Surtout que pour le cas de l'industrie marocaine, les défis n'en manquent pas. En dépit des avantages compétitifs qu'offre le royaume pour le développement du secteur, des leviers restent à activer pour permettre à l'activité de rebondir à un niveau qui permettra de porter le secteur à sa vitesse de croisière. Des mesures d'accompagnement sont donc nécessaires surtout de la part du gouvernement pour permettre aux industriels de jouer le rôle qui est le leur dans la concurrence internationale. À ce niveau, l'assouplissement des règles préférentielles de l'Union européenne et la fluidification des procédures douanières devront être un préalable à la mise en œuvre de tous les chantiers prévus dans le cadre de la stratégie nationale. De leur côté, les professionnels devront également se mobiliser pour améliorer le niveau d'industrialisation du secteur avec un intérêt plus accru pour la créativité et l'innovation en vue de gagner plus en compétitivité. Ce qui selon la note de la CEDITH devra se traduire par une diversification de l'offre marocaine à travers la recherche et l'exploitation de nouveaux débouchés commerciaux. Des perspectives tout à l'avantage du Maroc qui pourrait faire de ce pilier important de l'économie nationale, fort de près de 200.000 salariés, un levier pour le développement économique et social. Promouvoir le «made in Morocco» L'un des points faibles de l'industrie marocaine de textile et de l'habillement est sa forte propension à s'appuyer sur son rôle de «sous-traitant» au détriment de l'affirmation de sa propre identité. Alors que la promotion de la marque «Maroc» est devenue un thème récurrent dans la politique nationale de développement de l'exportation, le secteur peine à se positionner comme vecteur du potentiel national. Un constat des plus amers que n'a pas manqué de relever l'ancien ministre du Tourisme, Adil Douiri, qui a présidé le jury de la dernière édition des Morocco Awards. Pour preuve, aucune marque nationale provenant du secteur n'était en compétition lors de la deuxième édition en dépit de la place qu'il occupe dans l'industrie nationale. Pourtant, certaines expériences menées par des marques locales (Marwa, Diamantine, Keito..) devraient servir de leçon pour attirer les investisseurs à s'engager sur ce chemin. Le retour des investisseurs étrangers, qui s'étaient un temps redirigés vers d'autres marchés (Chine, Turquie...), est une opportunité pour les industriels marocains d'exploiter le créneau afin de l'étendre à de nouveaux marchés dont l'intérêt pour les produits nationaux ne se dément pas. Un défi de taille qui attend encore d'être valorisé et sûr que les premiers arrivés seront les premiers servis...