Mesures d'un autre temps, à vocation populiste et ouvertement protectionnistes. Les professionnels marocains de la relation client sont révoltés et fustigent les récentes déclarations du secrétaire d'Etat français à l'Emploi, Laurent Wauquiez. Ce dernier annonçait, en ce début de semaine, des mesures anti-délocalisations des centres d'appels, actuellement à l'étude par le gouvernement français. On parle de taxation des appels gérés en offshore, de mise en place d'un code de bonne conduite pour les entreprises publiques en vue de les contraindre à faire appel à des prestataires de centres d'appels en France, de dispositif d'incitation à la relocalisation des centres en France et, enfin, de mise en place d'une liste des mauvais élèves faisant appel à des prestataires offshore. Au lendemain de ces déclarations, l'Association marocaine de la relation client (AMRC) s'est fendue d'un communiqué où son président, Youssef Chraibi, indiquait que la sortie du secrétaire d'Etat à l'emploi intervient dans un contexte particulier de «crise économique en France, de climat social très tendu, et dans un climat politique agité par des scandales en série». Selon l'association, qui regroupe 16 acteurs majeurs des métiers des centres d'appels au Maroc, le secteur de la relation client en France est encore à ce jour créateur net d'emploi malgré le phénomène de l'externalisation offshore (10.000 nouveaux emplois créés en 2009, selon l'AMRC). «Ces mesures auront de toute façon un effet temporaire et très limité sur la tendance lourde de l'offshoring, un secteur où le Maroc bénéficie d'atouts structurels indéniables», minimise-t-on du côté de l'AMRC. Du côté français, on annonce la tenue d'assises autour de la question à la rentrée prochaine pour examiner les possibilités de redynamiser le secteur en France. À savoir que ce créneau, dans l'Hexagone, emploie près de 240.000 personnes, contre près de 50.000 postes localisés essentiellement au Maroc, en Tunisie, Sénégal, Egypte...Officiellement, l'Etat marocain n'a pas encore fait de commentaires en réaction aux déclarations du secrétaire d'Etat français. Néanmoins, des sources au ministère du Commerce, de l'industrie et des nouvelles technologies indiquent, en aparté, qu'au fond le secteur de l'offshoring au Maroc risque d'être ébranlé par d'autres facteurs plutôt que par les «déclarations d'intention». On parle de la crise économique, de l'évolution de la législation du télémarketing, des facteurs internes aux centres d'appels... Pas d'impact sur le Maroc ? De l'avis de plusieurs témoignages de professionnels du secteur, le secrétaire d'Etat français vise avant tout à équilibrer les créations d'emplois, entre l'offshore et le marché local. Selon leur lecture, cela ne restera qu'un «appel aux bonnes volontés». «Aucune mesure contraire aux intérêts économiques du secteur ne peut être prise dans la mondialisation de nos jours», explique cet observateur. Il est légitime que les responsables d'un pays se posent la question de la création d'emploi et les mesures pour l'encourager», estime pour sa part cette source au ministère de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies. Sauf que faire appel au patriotisme économique est toujours à «double tranchant», prévient ce professionnel. «Seuls les chasseurs de primes sont les premiers à répondre à l'appel de leur gouvernement pour utiliser des subventions, et fermer boutique dès que celles-ci sont épuisées», poursuit-il. Pour rappel, les centres d'appels au Maroc emploient 30.000 personnes et réalisent un chiffre d'affaires de 6 milliards de DH, avec un taux de croissance qui oscille entre les 10 et 30%. C'est dire les enjeux économiques en place. Valeur aujourd'hui, des statistiques précises concernant les centres d'appels tournés exclusivement vers le marché français ne sont pas disponibles. Mais les estimations des professionnels parlent d'environ 70% des positions de centres d'appels au Maroc qui dépendent directement du marché français. Sur le terrain, on identifie trois types de centres d'appels liés au marché français : des filiales à 100% d'entités françaises, des PME indépendantes au capital marocain et des entreprises à participation française.