Mener une carrière peut souvent ressembler à la conduite d'une voiture. À certains moments, en effet, la nécessité d'avoir une bonne visibilité impose qu'on ait de bons essuie-glaces. Et, autant qu'il est important de changer ponctuellement ces essuie-glaces, il est également nécessaire d'examiner de temps à autre ses repères et de repréciser la trajectoire de la carrière que l'on mène. Le bilan de compétences, plus que toutes les autres formes d'évaluation, répond mieux à cette nécessité. Les professionnels des ressources humaines le considèrent comme l'un des meilleurs outils de gestion de carrières et de garantie d'une employabilité continuelle. Les individus étant de plus en plus appelés à prendre en main leur carrière et son évolution, les experts en ressources humaines conseillent de ne plus attendre que l'initiative du «bilan» soit de l'unique ressort de l'entreprise. Selon Khadija Boughaba, directrice générale d'Invest RH, un bilan de compétences équivaut à un projet professionnel. Il s'impose à des moments clés de la carrière. De ce fait, souligne-t-elle, le bilan permet de faire une analyse approfondie en passant en revue le parcours professionnel, pour établir les forces et les faiblesses des choix opérés et de déterminer les origines des succès et des échecs connus le long du parcours. La personne accompagnée apprend, ainsi, à définir ses propres motivations et à identifier la nouvelle trajectoire professionnelle dans laquelle elle souhaite s'engager ainsi que les ressources qu'il lui faudrait pour réussir. Le facteur déclencheur d'un bilan peut être une promotion, une reconversion, un reclassement ou une recherche d'emploi... Mais quoi qu'il en soit, un bilan de compétences doit être un exercice profond. Nouveau cap et processus Pour Assia Aiouch, directrice générale d'Optimum conseil, en fonction des types de profil et des projets auxquels l'on s'attaque, le bilan de compétences peut prendre différentes formes. On parle , par exemple, de bilan de transition lorsque celui-ci concerne des managers et des cadres à haut potentiel qui doivent donner un nouvel élan à leur carrière (nouveaux défis à relever, mutation...). Au Maroc, dans l'état actuel du marché, c'est surtout sur ce créneau que la demande est forte, souligne Assia Aiouch. Le deuxième type de bilan est, quant à lui, lié à l'adéquation poste-profil. Il intervient lors des recrutements (promotion) et concerne surtout les cadres. Le troisième type de bilan est celui que les professionnels des RH ont baptisé l'aide au reclassement ou outplacement. C'est une opération plutôt rare mais d'une importance capitale, car intervenant essentiellement lors des grandes structurations ou réorganisations occasionnant des départs négociés. Selon les types de bilan, le processus d'accompagnement et le coût varient. Un bilan de transition de carrière est facturé entre 10.000 à 15.000 dirhams et s'effectue dans un délai de deux à trois semaines en raison de deux heures par séance. Pour l'outplacement, il faut compter entre 30.000 à 50.000 dirhams, avec un délai moyen de trois mois. Les consultants expliquent ce délai du fait qu'en matière de reclassement, le bilan est assorti d'un suivi et de l'accompagnement à la mise en place du nouveau projet dans lequel la personne s'engage. Ce projet concerne généralement la création d'une entreprise ou la recherche d'un nouvel emploi. Evénement décisif Dans le cas où c'est l'entreprise qui demande que ce type de bilans soit mené, il est bien fréquent que ce processus intervienne à des moments clés de la vie de l'organisation, ayant des conséquents décisifs sur la carrière de ses collaborateurs. Il peut s'agir de restructuration, de réorganisation, de création ou de suppression d'activités. Du côté des grandes structures, les exemples sont nombreux. En 2004, lorsqu'Altadis déclenchait les opérations de départ volontaire dédommagé (DVD), l'entreprise a massivement commandé des bilans de compétences pour ses collaborateurs. Lafarge en a fait de même, au moment du transfert de son unité de production de Tétouan I vers Tétouan II. Pour les consultants RH, dans la réussite de leur processus de restructuration et les changements structurels que cela a occasionnés, le recours au bilan de compétences a été un élément décisif. Témoignant à ce propos, Assia Aiouch explique que «plusieurs collaborateurs de ces entreprises ayant bénéficié d'un bilan et d'un accompagnement en outplacement, ont pu soit se reconvertir soit créer leur propre entreprise par la suite».