Après l'étape protocolaire, Benkirane peut enfin se mettre à la tâche. Il y met tous les moyens nécessaires. La déclaration de politique générale validée et le cabinet investi, Benkirane et son équipe s'activent à peaufiner les préalables à la mise en œuvre de leur programme, certainement pour ne pas être taxés de laxisme. Premier défi à relever, le projet de loi de finances pour l'année en cours, qui traîne toujours, mais aussi les nouvelles règles de gouvernance, qu'il faudrait adapter aux objectifs fixés par la coalition à la tête de l'Exécutif. Lueur d'espoir, le texte en question a été présenté et discuté hier au Conseil des ministres présidé par le roi à Rabat. C'est ainsi que Nizar Baraka, le ministre de l'Economie et des finances, a déroulé les orientations générales du projet de loi de finances. Aucune grande surprise par rapport à ce qui avait été présenté aux deux derniers Conseils de gouvernement ( le dernier en date a également été tenu hier). Pour autant, et dans l'attente de la version finale du budget, qui sera corrigée par les députés, les orientations générales de la copie de Baraka, telles qu'elles ont été validées, donnent la priorité aux secteurs sociaux, qui sont la cible prioritaire de la coalition et qui sont en leur dernière étape d'achèvement. Il s'agit de la Santé et l'Enseignement, où des plans d'urgence courent jusqu'à fin 2012, mais aussi de la généralisation de la RAMED, après l'expérience pilote réussie à Tadla Azilal. Parmi les mesures «sociales», donc, figurent en particulier, la création d'un Fonds dédié au soutien des populations démunies et l'extension du champ d'intervention du Fonds de développement rural aux zones montagneuses de même que le renforcement de ses moyens financiers. Le projet de texte, signalons-le, a parmi ses principaux objectifs , la promotion de la justice sociale, le rétablissement des équilibres macro-économiques, la promotion des programmes sociaux, et l'accès égal des citoyens aux services de base avec la consécration des principes de solidarité et d'égalité des chances. Hormis ces points, la déclaration finale devra aussi se focaliser sur la relance du tissu économique et l'encouragement des PME et TPE. Les quatre partis veulent que le projet de loi de finances 2012 reflète les promesses faites lors de la campagne électorale, y compris les incitations fiscales, l'accès aux marchés publics et l'accès à de nouvelles formules pour le financement bancaire. Aussi, et après avoir présenté les principaux indicateurs retenus par le projet de loi de finances, ainsi que son contexte national et mondial, le ministre de l'Economie et des finances a mis en relief le volet proposant l'instauration d'un dispositif d'incitation à l'emploi et l'auto-emploi, ainsi que la création de postes d'emploi répondant aux besoins de l'administration, de manière à lui permettre d'accompagner les différents chantiers de réforme et en matière d'investissement. Quant à l'investissement public, le projet en question prévoit des mesures visant la poursuite de l'effort public au niveau des programmes sectoriels et en matière d'investissements publics et de financement des grands chantiers. Maintenant, l'équation à résoudre est celle du montant que réservera le gouvernement Benkirane à ce poste. D'ailleurs, jusqu'à hier, ce montant était encore un secret d'alcôve. Ainsi, ceux qui s'attendaient à de grandes annonces à la suite de ce Conseil des ministres, notamment l'adoption finale du projet de loi de finances avant sa présentation au parlement, sont restés sur leur faim. A contrario, d'autres textes ont effectivement été validés. Il s'agit, notamment, de la loi organique relative à la liste des entreprises publiques dites «stratégiques», ainsi que sur les attributions du Conseil de gouvernement, notamment celle des nominations qui a été accordée au gouvernement, conformément à l'esprit de la nouvelle Constitution. Il est surtout question de mettre en place les mécanismes relatifs à la nomination des secrétaires généraux et des directeurs centraux des administrations publiques, des présidents d'université, des doyens et des directeurs des écoles et instituts supérieurs. La loi organique sur les établissements stratégiques complétera la liste des entreprises dont le président du gouvernement pourra nommer les PDG. Il détermine aussi les principes et les critères de nomination à ces différentes fonctions supérieures et ce, dans l'objectif de raffermir la bonne gouvernance et la moralisation de la vie publique, et de garantir l'égalité des chances, le mérite et la transparence dans l'accès aux emplois publics, ainsi que la non-discrimination et la mise en Âœuvre de la parité homme/femme, en tant que principe constitutionnel dont l'Etat œuvre à la réalisation. le Conseil a approuvé le projet de loi relatif aux garanties fondamentales accordées aux militaires relevant des FAR. Ce projet constitue une référence légale uniformisée et globale visant à définir, clarifier et consolider les garanties fondamentales accordées aux militaires, qu'il s'agisse des garanties à caractère juridique, de celles relatives aux droits matériels et sociaux dont ils bénéficient, ou encore de celles liées à leur carrière administrative, le but étant de renforcer la protection juridique dont ils jouissent, tout en prenant en considération la nature spécifique de leur travail et les obligations qui leur incombent. Il importe de préciser que la validation de ces deux lois organiques est motivée par l'accélération de l'agenda politique, la session parlementaire devant prendre fin ce 14 février. Pendant ce temps-là, au parlement... En même temps que la tenue des conseils de gouvernement et des ministres, s'est tenue hier une réunion du bureau de la Chambre des représentants qui s'apprête à clôturer sa session le 14 février. Les parlementaires écartent pour l'instant l'éventualité de la demande du tiers des députés d'une session extraordinaire et préfèrent que le décret de la session extraordinaire signé par Benkirane trace l'ordre du jour selon les priorités de l'agenda gouvernemental, qui est bousculé par le vote du budget. Du coup, cet ordre du jour sera composé d'un seul point, consacré au vote de la loi de finances. Pourtant, rien n'est encore acquis pour le gouvernement, puisque la Cour constitutionnelle n'a pas encore donné son feu vert pour l'activation des nouvelles structures du Parlement. Cela ne pourra que retarder davantage le vote du budget. Deux Conseils ? La double réunion du Conseil de gouvernement et de celui des ministres est motivée, notamment, par le projet de décret relatif aux garanties accordées aux militaires, qui tombe dans le champ de compétences du Conseil présidé par le roi. Le statut des militaires n'est pas par ailleurs le seul point où les deux conseils se croisent durant cette réunion consacrée à accélérer le dépôt du budget. Plusieurs autres compétences sont partagées entre le Conseil de gouvernement et celui des ministres. Une double délibération est en effet exigée pour les politiques publiques et les législations relatives à la famille et à l'état civil. Le gouvernement compte aussi activer une loi d'habilitation durant cette période, marquée par une forte activité législative. Cette loi permettra au gouvernement de participer au même titre que le Parlement à l'élaboration du nouveau cadre réglementaire, qui tracera avec précision les domaines qui seront accordés aux départements ministériels.