Celui que tout le monde présentait en tant que repreneur potentiel du plus grand groupe de presse français n'aura finalement pas eu la main assez lourde pour faire pencher la balance de son côté. Avec onze voix sur vingt, dont neuf abstentions, c'est au trio baptisé «BNP», pour «Bergé, Niel et Pigasse», que reviendront 64,65% du capital du journal, faisant ainsi de Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse, les nouveaux maîtres du Monde. Un trio de tête plein d'ambitions 110 millions d'euros, c'est le montant qu'apportera le trio «BNP» pour doper les finances du groupe et lui éviter le pire. Selon des sources sûres, c'est Louis Schweitzer, qui a fait la différence, lundi 28 juin, lors de la séance de vote organisée au siège du quotidien. Conscient de la gravité de la situation financière actuelle, le président du conseil de surveillance du Monde, a apporté sa voix ainsi que celle que lui avait confiée Claude Perdriel, patron du Nouvel Obs et également candidat à la reprise du journal de l'après-midi. Un geste salué dans les médias français par Gilles Van Kote, président de la Société des rédacteurs (SRM). Si le rachat du Monde signe le début d'un nouveau chapitre dans l'histoire du paysage médiatique français, il est également synonyme de nombreux bouleversements au cœur de l'entreprise de presse. Pour la première fois depuis son lancement en 1944, les salariés devront abandonner la majorité du capital et le contrôle du groupe. Le journal n'est plus entre les mains de ceux qui le font, mais entre celles de ceux qui le font vivre. Toutefois, le trio de tête est bien conscient que ce qui a fait du Monde ce qu'il est aujourd'hui est la force de ses propos et l'indépendance de son équipe de rédaction. Aussi, BNP ont pris la mesure de l'importance de cette décision et ont insisté sur la préservation de l'indépendance éditoriale des publications du groupe de manière générale. Les trois mousquetaires du Monde iront même plus loin. Pour preuve de bonne fois, ils décident de créer une fondation des salariés, au capital de départ de 10 millions d'euros. L'objectif de cette opération de mécénat serait, selon Pierre Bergé, de permettre aux employés du Monde de remonter progressivement leur part du capital à 33%. C'est surtout pour les anciens actionnaires que la pilule est la plus dure à avaler. Le groupe espagnol Prisa, qui avait également des vues sur le journal s'en sortira, lui, avec à peine 5,1% du capital. Pourtant bien partie pour renforcer sa position au sein du groupe français, il apparaît que ses prises de position en faveur d'une parution du quotidien le matin ont fragilisé son offre. Lagardère de son côté qui se retrouvera avec 5,86% du capital, aurait pu toucher 40 millions d'euros si un autre trio avait remporté les négociations : Perdriel, Prisa, Orange. Selon Le Figaro, le groupe d'entreprises industrielles Lagardère, était déjà en négociation avec eux pour le rachat de sa participation dans le holding et dans Le Monde interactif.