Elle aura pour rôle de mieux appréhender les profits générés par la délinquance et le crime organisé et ce faisant de renforcer l'effet dissuasif de la sanction pénale. Elle sera intégrée dans le Code de procédure pénale où sera prévue une procédure de saisie pénale spéciale aux fins de confiscation, plus adaptée que les procédures civiles d'exécution complexes et coûteuses. Dans le cadre de sa visite en France, le ministre de la Justice Mohamed Aujjar a rencontré son homologue française Nicole Belloubet, avec qui il a assuré vouloir «renforcer les liens de coopération judiciaire». Et outre un appui de l'Hexagone en matière d'informatisation des procédures et de formation des greffiers, Aujjar compte s'inspirer de l'expérience française en matière de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués. Dans une déclaration à la presse, le ministre a ainsi indiqué la création prochaine d'une structure visant à «faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale». Celle-ci sera dirigée par un magistrat de l'ordre judiciaire, dotée d'un conseil d'administration et sous la tutelle de son département ainsi que de celui de l'Economie et des finances. Cette institution aura pour but de mieux appréhender les profits générés par la délinquance et le crime organisé et, ce faisant, de renforcer l'effet dissuasif de la sanction pénale. Elle sera intégrée dans le Code de procédure pénale où sera prévue une procédure de saisie pénale spéciale aux fins de confiscation, plus adaptée que les procédures civiles d'exécution, complexes et coûteuses. Le principal rôle de cette agence sera d'assurer la gestion centralisée sur un compte qu'elle aura ouvert dans un établissement de crédit désigné dans la loi instituant la structure (l'on s'oriente principalement vers la Caisse de dépôt et de gestion) de toutes les sommes saisies, c'est-à-dire appréhendées dans l'attente d'un jugement définitif, en vue d'une éventuelle confiscation, lors de procédures pénales. Elle devra également procéder à l'ensemble des ventes avant jugement de biens meubles saisis, décidées par les magistrats lorsque ces biens meubles ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité et qu'ils sont susceptibles de dépréciation. Dans ce cas, la somme issue de la vente sera consignée sur le compte tenu par ladite agence et restituée au propriétaire du bien si celui-ci bénéficie d'un acquittement, d'un non-lieu ou d'une relaxe ou si le bien ne lui est pas confisqué. Elle sera également chargée de l'aliénation ou de la destruction des véhicules confisqués après avoir été immobilisés et mis en fourrière, de procéder à l'ensemble des publications auprès de la Conservation foncière, des saisies pénales immobilières et de la publication. Un mandat de justice lui sera donné pour gérer tous les biens complexes qui lui sont confiés, c'est-à-dire tous les biens qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d'administration. «Il s'agit aujourd'hui d'un besoin urgent qu'une agence centralise les très nombreuses saisies (de numéraires, de comptes bancaires, d'immeubles, etc.) et qu'elle s'assure tant de la bonne gestion de ces biens saisis que, une fois ces biens confisqués par une décision définitive, du versement du produit de leur vente au budget général de l'Etat», conclut Aujjar. En effet, la Cour des comptes n'a cessé de pointer du doigt les dysfonctionnements administratifs à même d'entraver le recouvrement des frais de justice et biens saisis. Ils sont payés d'avance par le Trésor qui les récupère suite à la condamnation d'un justiciable. Or, ces frais déboursés du budget de l'Etat ne sont pas remboursés. Ce manquement est justifié par la non-transmission par les services du Trésor des états des paiements effectués aux greffiers. Un grave manque de coordination assimilable à la dilapidation des deniers publics. La délimitation des responsabilités en matière de recouvrement, entre le ministère de la Justice et la Trésorerie générale du Royaume (TGR), souffre depuis 21 ans d'une absence de dispositions réglementaires et législatives. Enfin, l'absence manifeste d'harmonisation entre les dispositions du Code de recouvrement des créances publiques, du Code de procédure pénale et du Code pénal. Cette zizanie législative retentit par exemple sur la date d'exigibilité d'une amende ou d'une condamnation pécuniaire et sur leur délai de prescription. Ainsi, le Code pénal n'associe les amendes qu'aux peines délictuelles et contraventionnelles. Or, les délais de prescription de ces dernières (4 ans et 1 ans) sont différents des peines criminelles (15 ans). Une incompatibilité qui affecte durablement l'efficacité de la procédure de recouvrement.