Avec des taux d'exclusion bancaire atteignant 90% dans certains pays et un désintérêt des banques pour les zones rurales et les populations à faible revenu, les postes, par des politiques adaptées, peuvent développer leur chiffre d'affaires tout en contribuant à l'inclusion des populations défavorisées. Ce constat est valable pour le continent africain qui, de ce fait, recèle d'importants gisements de croissance dont le secteur postal peut tirer profit. Certes, si la crise économique a impacté nombre de régions de par le monde y compris l'Afrique, celle-ci a connu une période de croissance et il n'y aucune raison que le secteur de la poste reste à la traîne de la croissance sur le continent, a estimé le directeur général de l'Union Postale Universelle (UPU), Edouard Dayan, qui prenait part au 2e Forum Postal Africain, tenu les 8 et 9 décembre à Marrakech, sous le thème «Nouveaux gisements de croissance pour la poste en Afrique». Dans ce contexte, le pari de la diversification est une opportunité réelle pour les postes africaines. «Les services financiers postaux sont, à cet égard, un autre atout et de nombreuses postes africaines sont déjà engagées dans cette voie», a-t-il expliqué. Ces derniers constituent l'une des principales opportunités de croissance à saisir par les postes en Afrique, mais aussi dans de nombreuses régions dans le monde. Ce mouvement est d'ailleurs largement entamé, puisque la moitié des postes africaines tirent déjà plus du quart de leurs revenus des services financiers postaux. L'UPU accompagne de nombreuses postes de la région dans ce domaine. Ainsi, en ce qui concerne les transferts d'argent des migrants, 24 pays africains utilisent à l'heure actuelle le réseau de paiements postaux électroniques de l'UPU. En 2010, un projet financé par le Fonds international de développements agricole (FIDA) a permis de connecter à ce réseau 355 bureaux situés dans les zones rurales de six pays de l'Afrique de l'Ouest. Selon le DG de l'UPU, «depuis le début de l'année 2011, des activités communes ont été lancées avec la Banque Mondiale pour soutenir le développement du réseau de l'UPU en Afrique». Enfin, un partenariat a été lancé au mois de mai 2011 avec la Fondation Bill et Melinda Gates afin d'aider les postes africaines à élargir leur offre de services financiers. Ce projet permet de soutenir les opérateurs qui souhaitent créer des services de paiement, d'épargne ou de crédit. Ce soutien des bailleurs de fonds internationaux est la preuve que le potentiel existe, que le réseau postal est considéré comme une infrastructure pour le développement et pour la lutte contre la pauvreté. L'enjeu est de faire face au manque d'investissement dans l'infrastructure postale en Afrique, insiste Dayan. La Poste Marocaine au diapason des changements Mounia Boucetta, secrétaire général du ministère du Commerce, de l'Industrie et des Nouvelles Technologies, a rappelé que la poste marocaine a connu une importante mutation, quand le gouvernement a décidé de séparer les secteurs «Postes et Télécommunications», notant qu'en dépit de cette séparation, Barid Al-Maghrib a gardé son statut d'établissement public doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, ce qui lui a permis de continuer à développer davantage l'activité postale et financière. Cependant, la vraie révolution qu'a connue le secteur postal remonte à 2004, avec l'adoption d'un plan stratégique de développement de Barid Al-Maghrib. Celui-ci a donné lieu à une refonte profonde de cet établissement. «Ce changement va de l'identité visuelle à la stratégie de développement, en passant par une nouvelle charte d'aménagement pour les bureaux de poste», a-t-elle poursuivi. Une réforme a été aussi lancée à partir de 2009 afin d'introduire une libéralisation progressive des services postaux et de renforcer les capacités concurrentielles de l'opérateur public, tout en tenant compte des spécificités du Maroc et des orientations postales à l'échelle internationale. Par ailleurs, en vue d'améliorer la gouvernance et de clarifier les relations entre l'Etat et Barid Al-Maghrib, un contrat-programme au titre de la période 2010-2012 a été conclu entre les deux parties, prévoyant la création de la filiale bancaire «Barid Banque» et un volume d'investissement de 2,1 milliards de DH étalé sur trois ans. «En 2010, Barid Al-Maghrib a réalisé un chiffre d'affaires hors produits financiers de près de 1,5 milliard de DH et emploie aujourd'hui 7.900 collaborateurs avec un réseau de 1.800 points de contacts, dont 54% en milieu rural», a précisé Amin Benjelloun Touimi, DG de Poste Maroc. Actuellement, grâce aux évolutions qu'a connues le secteur, une plus grande ouverture à la concurrence pourra être progressivement mise en œuvre. En effet, l'obligation du service universel est la question centrale de l'ouverture des services postaux à la concurrence. La suppression progressive du domaine réservé pose la question du financement du service universel dans ses aspects les moins rentables, tels que la couverture de zones périphériques ou faiblement peuplées. «C'est pour cette raison qu'une étude est en cours de lancement, qui s'articule en particulier sur la définition du service postal universel, son étendue, son financement et les missions à assigner à l'opérateur chargé de ce service», estime Boucetta. Et d'ajouter qu'en vue de donner plus de visibilité aux acteurs du secteur, «il est prévu la mise en place d'un nouveau cadre juridique et réglementaire régissant le secteur postal qui portera notamment sur la définition du cadre juridique général de l'exercice de l'activité postale et la définition des missions de la régulation postale». D'une manière générale, l'objectif de cette mesure est de rendre le secteur plus compétitif et efficace à travers un processus progressif de libéralisation. Fruit d'un partenariat entre i-conférences et Poste Maroc, le 2e Forum Postal Africain a servi de plateforme pour se focaliser sur nombre de thématiques d'actualité telles que «les réformes engagées pour le développement du secteur de la poste», «les nouveaux gisements de croissance», et «l'intégration des NTIC et leur rôle dans la réduction de la fracture numérique».