Adil Rzal, vice-président de l'Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC) et directeur général d'Upline Alternative Investments. Dans cet entretien, le vice-président de l'Association marocaine des investisseurs en capital et directeur général d'Upline Alternative Investments, la société de gestion des fonds de Private Equity du Groupe Banque Populaire, dresse le bilan de l'activité de «Capital investissement» au Maroc. Les Inspirations ECO : Quel bilan faites-vous de l'activité du «Private Equity» au Maroc ? Adil Rzal : Au Maroc, l'activité du Capital investissement a vu le jour au début des années 90, mais ne s'est réellement développée qu'au début des années 2000. En 2016, les fonds levés auprès des investisseurs totalisent 305 MDH, pour un montant cumulé, à fin 2016, de 11,1 MMDH. Une vingtaine de sociétés de gestion, essentiellement marocaines, se partagent cette somme en constante progression. La taille des fonds sous gestion ne cesse de s'agrandir, notamment avec l'émergence des fonds transrégionaux qui ont représenté une part de 86% des fonds levés sur la période 2013-2016 et qui suscitent, de plus en plus, l'intérêt des organismes de développement internationaux (SFI, BERD, BEI, et autres). S'agissant des investissements, l'année 2016 a enregistré un record avec 786 MDH et un montant cumulé de 6,3 MMDH, investi, depuis le début des années 2000, dans 183 entreprises. Les désinvestissements ont atteint 205 MDH et un montant cumulé de 2,4 MMDH. Cette classe d'actif offre une bonne rentabilité, puisque les sorties réalisées, jusqu'à présent, enregistrent en moyenne un TRI (Taux de rendement interne) brut de 13% pour une durée moyenne de détention de 6 ans. Comment expliquez-vous la progression importante des investissements réalisés ces dernières années ? Nous constatons effectivement que les montants investis s'accroissent d'année en année. Le ticket moyen d'investissement a doublé entre la première et la troisième générations des fonds passant de 5 à 9 MDH pour les entreprises en démarrage, et de 24 à 50 MDH pour le reste des entreprises. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette évolution. La promulgation de la loi 18-14 relative aux Organismes de placement collectif en capital (OPCC) donne un nouvel élan à l'activité du Capital investissement et répond mieux aux attentes des investisseurs avec un meilleur cadre fiscal et une meilleure sécurité, grâce à la supervision de l'Autorité marocaine du marché des capitaux. En termes d'opportunités d'investissement, les chefs d'entreprises sont intéressés par cette formule puisqu'elle leur permet non seulement de financer le plan de développement sans se soucier de donner des garanties, mais également de profiter de l'accompagnement des équipes de gestion qui ont gagné en expérience. Enfin, nous assistons également à un durcissement des conditions de crédit de la part des banques, ce qui oriente certaines entreprises à recourir au Capital investissement pour renforcer les fonds propres et améliorer la gouvernance. Comment expliquer la prédominance des fonds étrangers et transrégionaux et quels sont les mécanismes pouvant séduire les investisseurs locaux ? En effet, le marché marocain du Capital investissement demeure sous-pénétré, offrant un potentiel de croissance certain, notamment dans des secteurs d'activité économique prometteurs (éducation, santé, énergie renouvelable, infrastructure, etc.). Les opérateurs dans ces secteurs sont en quête de fonds pour financer leurs projets de développement tant sur le plan local que régional. Les fonds transrégionaux basés au Maroc ont attiré les investisseurs étrangers du fait de l'expérience des équipes de gestion ayant développé des compétences sectorielles, du positionnement du Maroc comme hub pour l'Afrique donnant à ces fonds une vocation régionale, et du cadre réglementaire et fiscal du Maroc. Les investisseurs institutionnels marocains sont également présents dans les fonds. Jusqu'à présent, cela s'est limité aux fonds purement investis au Maroc. La baisse des rendements de taux au Maroc, la maturité des équipes de gestion, et l'existence d'opportunités d'investissement au Maroc et en Afrique seront les principales raisons d'investissement des institutionnels marocains dans des fonds à vocation régionale. Par ailleurs, pour séduire les investisseurs particuliers, il serait judicieux de mettre en place des mécanismes incitatifs qui encouragent le développement d'une épargne longue pour financer l'activité économique, à l'instar des pratiques internationales adoptées en la matière.