L'émergence d'un nouvel ordre maghrébin en réponse au vent de changement démocratique qui souffle sur la région et dans lequel s'inscrit la dynamique actuelle de réformes portées par le Maroc, telle a été, en substance, l'essence du message à la nation adressé par Mohammed VI, dimanche dernier à l'occasion de la commémoration du 36e anniversaire de la Marche verte. Une commémoration qui prend un caractère particulier, cette année, comme a tenu à le souligner le souverain en mettant en exergue le contexte national «marqué par l'entrée de notre pays dans une ère constitutionnelle nouvelle qui consolide son esprit unitaire et renforce notre modèle spécifique en matière de démocratie et de développement». Pour le souverain, c'est fort de ces réformes profondes et de «la réactivité positive de notre pays aux mutations en cours» que le Maroc entend poursuivre «cette marche constamment renouvelée» qui permettra «de consolider l'intégrité territoriale de notre pays, de raffermir l'Etat de droit et des institutions et d'enraciner la bonne gouvernance, dans toutes les régions du royaume». Prochain défi, les législatives du 25 novembre prochain qui consolideront durablement le processus de réformes politiques après l'adoption d'une nouvelle Constitution, en juillet dernier. L'occasion, donc, pour le roi d'appeler à «la mobilisation nationale générale» qui reste le préalable essentiel pour relever le défi majeur consistant à assurer le succès des élections, afin qu'elles soient «libres, régulières et compétitives, s'articulant autour de programmes sociétaux clairs et novateurs, de nature à répondre aux attentes légitimes des citoyens». En clair, une prise de conscience responsable de tous les acteurs impliqués dans le processus, partis politiques, autorités et citoyens s'engageant pour le succès de ce scrutin, qui devra déboucher sur l'installation d'institutions législative et exécutive, lesquelles deviendront «une force motrice pour la démocratie et le développement, jouissant de la confiance populaire et assurant la réconciliation du citoyen avec les institutions élues». Pour Mohammed VI, la réussite de ce scrutin revêt une importance capitale, «non seulement du fait qu'il est le premier du genre à avoir lieu dans le cadre de la nouvelle Constitution, mais aussi parce qu'il constitue le principal indicateur à l'aune duquel se mesure la mise en œuvre démocratique de la nouvelle loi fondamentale». Il s'agit donc de permettre, à travers les élections du 25 novembre, l'émergence d'une «majorité gouvernementale assumant de façon cohérente, courageuse, audacieuse et résolument engagée, la responsabilité de gérer les affaires publiques et de rendre des comptes sur cette gestion devant une opposition constructive, agissant en force de proposition». Un défi de taille, en résumé, et dont l'ultime dessein «est d'édifier un véritable Etat des institutions, où tous les acteurs se conforment à la Constitution et à la loi, se dévouent au développement et au progrès de la patrie, et se mettent au service des citoyens, loin de toute instrumentalisation d'institutions formelles à des fins personnelles ou catégorielles étriquées». Un rappel clair, alors que les partis s'apprêtent à s'engager dans la bataille électorale et qui ne manquera pas d'accentuer la pression sur les partis et hommes politiques, qui auront la lourde responsabilité de traduire en acte concret les enjeux dont est porteur le processus de réformes qui a fait du Maroc un exemple dans la région. Décisions courageuses L'autre aspect important du discours royal s'inscrit dans le cadre de la même dynamique de réformes qui consacrent, enfin, une véritable sortie de crise du dossier du Sahara, lequel ne saurait survivre à ce qui est qualifié de «printemps arabe». Les réformes engagées par le Maroc s'accompagnent, en effet, d'une réponse concrète et saluée par une large partie de la communauté internationale sur le statu quo intenable sur cette question. Il s'agit, notamment, de la proposition d'autonomie accordé aux provinces sahariennes qui est désormais inscrite dans la Constitution et qui fait des populations sahraouies «les premiers bénéficiaires de ces avancées». Le souverain a, d'ailleurs, réaffirmé à ce sujet que «le Sahara marocain sera un véritable modèle de régionalisation avancée, impliquant une élection démocratique de ses instances et un large transfert des pouvoirs et des moyens, du centre vers les régions, et prévoyant des mécanismes de solidarité régionale et nationale, de mise à niveau sociale et de développement humain». Pour Mohammed VI, l'association des véritables habitants des provinces sahariennes est à cet égard «de nature à mettre un terme définitif aux allégations de ceux qui s'autoproclament représentants exclusifs des populations de la région». succès de cette dynamique, a ajouté le roi, «permettra à nos frères dans les camps de Tindouf de bénéficier des mêmes droits, opportunités, perspectives et espoirs que ceux qui sont aujourd'hui offerts à leurs frères dans nos provinces du Sud, dans le cadre d'un Maroc des régions, uni, jouissant de la démocratie et du progrès, accueillant, les bras ouverts, tous ses fils». Le message royal a été clair, d'ailleurs, sur ce point. «Le moment est venu pour chacun de prendre ses responsabilités», a ajouté Mohammed VI, qui a insisté sur le fait qu'il est impératif «de prendre des décisions inclusives, synergiques, prospectives et courageuses. Il importe de fructifier les nouvelles opportunités offertes par les mutations en cours dans la région arabe et maghrébine». Un contexte régional porteur de nouveaux espoirs et dans lequel le Maroc fait office de pionnier en étant «le premier à interagir avec ces mutations, à saisir les aspirations démocratiques légitimes des populations de la région et à leur témoigner sa solidarité, en gardant constamment à l'esprit la nécessité de préserver la stabilité, l'unité nationale et l'intégrité territoriale de leurs pays respectifs». Une accélération de l'histoire qui se traduit donc par de nouveaux défis, inaugurant des perspectives prometteuses pour les pays de la région et que le Maroc entend pleinement mettre à profit dans un effort collectif d'aller de l'avant. Un renouveau maghrébin Dans son message à la nation, le souverain a fait référence au processus de changement «sans précédent» qui caractérise la région. Pour Mohammed VI, c'est l'occasion, plus que jamais, d'œuvrer pour l'émergence d'un nouvel ordre maghrébin «qui transcende l'enfermement dans les postures figées et les antagonismes stériles, et qui ouvre la voie au dialogue, à la concertation, à la complémentarité, à la solidarité et au développement». Le roi a réitéré son appel et sa totale disponibilité, «notamment avec l'Algérie sœur», à tout mettre en œuvre pour la réussite de la dynamique constructive actuelle. L'enjeu principal, selon le roi, est «la concrétisation commune des attentes des générations présentes et à venir qui aspirent à l'avènement d'un ordre maghrébin nouveau». Un appel qui ne manquera pas de trouver écho au vu de l'engagement de plusieurs membres à revitaliser la coopération régionale, comme en témoignent les visites et échanges qui se multiplient entre les nouvelles autorités régionales conscientes de l'opportunité de la dynamique. C'est en tout cas le vœu exprimé par le Maroc, qui a été au premier plan lors des efforts engagés par la communauté internationale pour accompagner le vent de changement qui soufflait sur la région. Un Maghreb qui, fort des cinq pays qui le composent, serait un véritable moteur de l'unité arabe, un partenaire agissant de la coopération euro-méditerranéenne, un facteur de stabilisation et de sécurisation de la zone sahélo-saharienne, et un acteur structurant de l'intégration africaine, a conclu Mohammed VI.