Le jazz n'irait pas très bien. La plupart de ses maîtres sont morts et son identité s'est diluée dans les musiques du monde ou le courant électro. Ce constat, pas totalement faux, pas complètement vrai, date de quelques années déjà. Depuis mercredi, le jazz se porte pourtant à merveille à Tanger. Le festival Tanjazz qui souffle cette année sa 12e bougie a réussi encore une fois à gagner son pari, celui d'offrir au public de grandes soirées. Les artistes invités par la Fondation Lorin qui organise cet événement, pour animer les soirées de cette nouvelle édition ont développé une musique qui ne cède sur rien, bourrée d'idées d'arrangements. Le Gros Tube (big band déjanté), WAB (human beat box), les Divinas (un trio féminin de choc), Les Pommes de ma douche (swing manouche) et Witchcraft (trois musiciennes issues d'horizons différents) ont donné le ton à cette édition 2011, avec un public comme on en souhaite, précis dans son écoute, poussant souvent les musiciens au dépassement. Le scénario produit mercredi et jeudi, sera indubitablement valable pour ce week end. Aujourd'hui, les deux scènes principales du festival, en l'occurrence BMCI Palais et Renault Palace seront investies par des artistes de renoms : le Roy Hargrove Quintet et Sarah Lenka et son quartet. «Roy Hargrove est une énorme vedette dans le monde du jazz, un chouchou d'Universal Music que nous avons pu avoir grâce à tout le bien que Montly Alexander (ndlr : tête d'affiche de l'édition 2010) lui a dit de notre festival», avait déclaré le fondateur de Tanjazz Philippe Lorin en le présentant. Trompettiste hors pair, ce musicien américain a été découvert en 1987 par le maître Wynton Marsalis. Depuis, Roy Hargrove et sa trompette feutrée sillonnent le monde, déployant une brillance d'idée, une intensité émotionnelle et une générosité technique. Tant de talent mis au service des plus grandes figures, «autant dans le respect du patrimoine, l'ouverture à l'afro-cubain, au funk ou au hip hop, que dans son style perso, ancré dans la nu soul». Un programme riche et varié Souvent comparée à Billie Holiday, à Bessie Smith ou à Dinah Washington, Sarah Lenka, avec sa voix intimiste et ses arrangements très contemporains fait partie des grands invités de Tanjazz. Un vrai régal pour le public tangérois, qui se targue annuellement de recevoir des stars du jazz connues à travers le monde. Demain samedi, c'est la grande Lillian Boutté & The Gigolos qui se produiront devant les Tangérois, Casablancais, Rbatis... Nommée «Ambassadrice musicale de la Nouvelle Orléans», Lillian Boutté détient la recette unique du «Mint julep», un cocktail local haut en couleurs. Toutefois, la tête d'affiche de ce Saturday night, ne sera autre que l'Italienne Roberta Gambarini. Vedette d'Universal Music, elle a réussi à avoir la bénédiction des professionnels et de la presse en un temps record. En deux albums exquis, «Easy in Love» et «So in Love», elle a mis les States à ses pieds ! «Best new jazz vocalist to come along in fifty years !» avait même déclaré le légendaire pianiste Hank Jones. Enfin, les enfants auront rendez-vous dimanche avec des spectacles animés par Roger Cactus et Muzicaloustiks. Cette initiative lancée l'année dernière a été très bien accueillie par les familles et les enfants qui découvrent ainsi l'univers de ce genre musical. Philippe Lorin et son équipe précisent par ailleurs que l'accès à ces spectacles nécessite un pass journalier dont le prix varie entre 100 et 300 DH. Mais détrompez-vous, Tanjazz est loin d'être un festival élitiste. Les concerts mis en place gratuitement sont là pour le prouver. «Les artistes qui se produisent sur les scènes gratuites ne sont pas moins bons que les autres invités», a tenu à souligne Lorin. En effet, durant Tanjazz, la musique est dans toute la ville. Sur la place des Nations-Unies, aux hôtels Rif, Andalucia, Husa Solazur et au Palais des institutions italiennes, qui reste le cœur battant du festival, le public savoure la musique. On vous l'a déjà annoncé : le jazz se porte à merveille, à Tanger !