Le port de la ville du détroit s'est hissé au rang des principales infrastructures portuaires au monde, donnant un véritable coup d'accélérateur à l'activité économique du royaume. Les autres ports de la région sont appelés à lui emboîter le pas. Inauguré en 2007, le port Tanger Med, profitant de sa situation géographique stratégique à l'orée du détroit de Gibraltar, a pu attirer les majors mondiaux de l'industrie et du transport maritime. «L'année dernière, pas moins de 220.000 véhicules fabriqués dans l'usine de Renault ont transité vers l'Europe à partir de Tanger Med», annonce fièrement Rachid Houari, directeur du port Tanger Med I. Près de huit ans après, un laps de temps très court pour la vie d'un port, Tanger Med est arrivé à sa capacité maximum en termes de trafic conteneurisé. Les deux opérateurs qui gèrent les terminaux, Eurogate et APM Terminals, traitent pas moins de 3 millions de conteneurs de 20 pieds chaque année. Grâce à cette performance, le port de la ville du détroit, qui relie pas moins de 160 ports au monde chaque semaine, a permis au Maroc de se hisser à la 16e place dans le classement de la CNUCED sur la connectivité maritime. Et ce n'est pas tout: l'extension de la capacité du port avec Tanger Med II devrait propulser le Maroc dans le top 20 des ports mondiaux. «L'on parle d'une capacité supplémentaire de 5,2 millions de conteneurs. Pour saisir la grandeur de ce chiffre, il faut garder à l'esprit que près de 500 ports traitent le trafic de conteneurs dans le monde. Et fort de sa capacité de 8,2 millions de conteneurs, le Maroc y sera classé parmi les 20 premiers», avance le directeur de Tanger Med I. Affluence Le trafic des conteneurs n'est qu'une 1partie des 7 autres activités du port de Tanger Med. Transport de marchandises, passagers et rouliers, hydrocarbures... le port est multiservices. Mais deux composantes principales contribuent à faire tourner celui-ci à plein régime: Renault et la zone franche logistique. «Les opérateurs de l'import-export sont très soucieux de la fluidité du trafic. Il est indéniable que si Tanger Med n'était pas là, Renault n'aurait pas jeté son dévolu sur le Maroc et, ce qui est intéressant, c'est que ce port a créé tout un écosystème autour de lui», affirme Najlaa Diouri, directrice générale de Tanger Med Port Authority. Le constructeur français dispose d'ailleurs d'un terminal qui est dédié exclusivement à l'export de ses voitures. «L'on compte aussi un autre terminal multi-usagers pour le trafic import/export et le transbordement de véhicules neufs. Plus de 10 autres marques de voitures nous ont fait confiance pour le transbordement de leurs voitures», renchérit Rachid Houari. Depuis l'arrivée de Renault, nombre d'opérateurs -équipementiers en particulier- lui ont emboîté le pas pour profiter de la sous-traitance dont il aura besoin. «Il est clair que l'implantation de Renault a donné un coup d'accélérateur à l'installation de plusieurs sous-traitants», confirme Mohamed Fennassi, directeur général-adjoint de SJL Maghreb, qui opère dans le transport international. L'autre raison qui explique le rush sur la zone franche Tanger Med Hub est «le choix stratégique de disposer d'un hub logistique qui permette une grande flexibilité dans la livraison de plusieurs régions, notamment l'Afrique», poursuit Fennassi. À ce jour, «la zone franche adossée au complexe portuaire compte pas moins de 50 clients, comme Timar ou encore San José Lopez, qui louent des entrepôts et autres terrains sur place. Et les entreprises continuent à affluer. Le dernier poids lourd à avoir choisi la zone est Decathlon qui veut faire du Maroc un hub pour le continent. Le deal consiste à mettre à sa disposition un entrepôt de 20.000 m2, extensible à 40.000 m2», précise Rachid Houari. Réglages Mais le tableau n'est pas tout rose pour autant. La montée en puissance de Tanger Med se traduit par un flux de trafic qu'il faut gérer sans faute. «Le temps étant de l'argent», les opérateurs ne tolèrent aucun retard dans les traversées entre les deux rives. «Les délais de transit ne sont pas optimaux. En moyenne, il faut compter entre 4h et 4h30 pour traverser les frontières, ce qui est beaucoup. Et parfois, la situation est pire encore quand il y un arrêt du scanner ou des équipements de contrôle. Dans ce sens, l'on parle de deux à trois jours», déplore le DGA de SJL Maghreb. Les autorités portuaires mettent les bouchées doubles pour relever le défi. Et il faut dire qu'elles ont du pain sur la planche: 496.400 tonnes de marchandises, 2, 35 millions de passagers avec une croissance de 6%, 237.000 unités TIR, 5,28 millions de tonnes d'hydrocarbures... «C'est dire que les flux connaissent une forte augmentation, ce qui exige de gros efforts pour répondre à la demande», indique Najlaa Diouri, qui met en avant plusieurs actions mises en place pour être à la hauteur de ces défis. «Il y a eu une baisse importante du coût de la traversée qui est passé de 600 euros, du temps de Tanger ville, à moins de 200 euros. L'évolution est également importante en termes de délais. Alors que ce dernier se comptait en jours avant, on est arrivé à près de 2 heures avec toutes les formalités qu'il faut accomplir», explique la patronne de Tanger Med Port Authority. Des efforts non négligeables, certes, mais les opérateurs ne peuvent pas s'empêcher de faire la comparaison avec d'autres ports. Lors de la première édition du Tangier Logistics Day, tenue à Tanger le 28 janvier dernier, les responsables maritimes et douaniers de plusieurs pays étaient de la partie pour échanger autour du sujet. En intervenant, Arnaud Delmulle, adjoint au directeur régional des douanes de Dunkerque, a jeté un véritable pavé dans la mare en expliquant que plus de 90% des déclarations douanières se font en moins de 4 minutes! La magie de la dématérialisation permet en effet des gains de temps et d'argent conséquents. Les autorités portuaires marocaines seraient sur la même voie. «Nous sommes en train de mettre en place un système d'information intégré qui permettra une dématérialisation des procédures avec une grande capacité de gestion des flux de camions TIR et de conteneurs», indique Najlaa Diouri.