Après les déclarations, les actes! Aussitôt la date des législatives anticipées connue, la dynamique des réformes politiques est montée d'un cran, avec l'entrée en scène de tous les acteurs engagés dans le processus électoral. L'échéancier électoral s'éclaircit un peu plus et le rythme des concertations entre le ministère de l'Intérieur et les partis politiques s'accélère. De sources partisanes, on annonce même la convocation extraordinaire du Parlement dans les tout prochains jours. «Au courant de la semaine prochaine», confie un membre d'un parti politique de la majorité qui a requis l'anonymat sans toutefois donner plus de précision sur la date. Un délai qui laisse dubitatif puisque la question ne figure pas sur la liste des points inscrits à l'ordre du jour du prochain gouvernement. Mais ce n'est qu'une question de temps puisque les services de Taieb Cherkaoui ont reçu depuis la semaine précédente les propositions des différents partis politiques par rapport aux cinq projets de lois électorales qui leur ont été soumis préalablement. En principe, c'est au courant de cette semaine que les mêmes partis politiques recevront les détails des aménagements apportés par l'Intérieur sur la base des consultations menées depuis plusieurs semaines. C'est ce que nous confirme un responsable d'un parti de gauche, qui affirme qu'une réunion est programmée avant la fin de cette semaine pour discuter sur ces deux sujets qui n'ont pas été tranchés. Comme tous ses semblables qui excellent dans l'art de garder l'anonymat en raison du contexte actuel où rien n'est sûr et définitif, il ajoute qu'«il y a une feuille de route stratégique qui a été adoptée et un consensus a été trouvé sur la priorité qui va être accordée à la Chambre des représentants, par laquelle le changement va commencer», avant de conclure que la prochaine réunion sera consacrée à l'examen des suggestions que fera l'Intérieur qui va permettre «de trancher entre les trois avis qui sont actuellement sur la table des discussions». S'il est difficile de parier sur l'atteinte d'un consensus au regard des divergences assez profondes sur certains points entre les différents partis, il n'en demeure pas moins que la détermination d'accélérer le processus est palpable à tous les niveaux. De toute façon, et dans un cas comme dans l'autre, les projets de lois seront incessamment au menu du Conseil du gouvernement puis des ministres avant d'atterrir au niveau du Parlement où se dérouleront les vrais débats. En attendant, le ministre de l'Intérieur a tenu à bien préciser que les concertations se poursuivent, mais jusqu'à quand ? Faux départ ? Les raisons de cette véritable course contre la montre sont évidemment à chercher du côté de la date du scrutin. Il reste, en effet, moins de trois mois avant le 25 novembre et les détails qui restent à solutionner pour garantir les conditions d'un scrutin sain et régulier demeurent encore énormes. Pourtant, la date même du 25 novembre semble ne pas faire l'unanimité en dépit de l'explication donnée par le ministère de l'Intérieur qui dans son communiqué a souligné que le choix de cette échéance faisait suite aux conclaves menés avec les représentants des partis politiques. Le premier à monter au créneau est le RNI de Salaheddine Mezouar pour qui «la date du 25 novembre porte préjudice à son parti». Et au niveau des RNIstes, il y a de quoi. Le président du parti n'est autre que le ministre de l'Economie et des finances en exercice qui sera âprement sollicité à partir du 20 octobre prochain, date de l'ouverture de la session budgétaire, soit un mois presque avant la tenue des élections législatives. Si l'on tient compte du fait que les discussions risquent de s'étaler sur au moins une trentaine de jours, on comprend les raisons qui ont poussé le RNI à préférer une échéance plus brève, «au plus tard le 4 novembre» pour le premier responsable du parti, c'est-à-dire quelques jours avant l'ouverture de la campagne électorale. Pour Mezouar, qui réagissait à chaud et en exclusivité sur nos colonnes (Les Echos quotidien du 17 août), l'échéancier actuel est de nature à priver le président du RNI de se présenter aux élections et, pire, «en tant que président du RNI, je n'aurai pas la possibilité de soutenir les candidats de mon parti dans leur campagne électorale», a souligné Mezouar pour qui l'équation est des plus compliquées puisqu'il faudrait opérer un choix entre l'intérêt de la nation et ceux de son parti. Le RNI s'est, d'ailleurs, engagé «à étudier les recours possibles», avant que le décret qui devrait entériner la date définitive des élections ne soit publié, chose qui ne saurait tarder à en croire certaines sources. En dépit de la légitimité des arguments sur lesquels table le parti pour rejeter la date du 25 novembre, certains observateurs estiment néanmoins minces les chances de voir la requête aboutir, le parti étant d'ailleurs le seul à s'agiter véritablement par rapport à cette option. Au Parti travailliste par exemple, on soutient que «la date du 25 novembre ne dérange nullement le vote normal de la loi de finances 2012, car elle sera proposée au vote de la Chambre des conseillers». Selon Mohamed El Ouchari, membre fondateur du parti qui précise, à juste titre, «que la loi de finances 2011 a été votée par 10 députés en commission, ce qui est loin d'être un sérieux obstacle pour la bonne préparation des élections». Ce qui est par contre sûr, c'est que l'adoption de la loi de finances 2012 risque d'être sérieusement compromise. Il est vrai que l'une des alternatives qui reste est de faire passer le texte devant la Chambre des conseillers, en attendant l'installation de celle des représentants qui n'auront, dans ce cas, que le mois de décembre pour y statuer. C'est l'un des scénarios qui a été mis en avant par le porte-parole du gouvernement, Khalid Naciri, faisant référence à l'ouverture de la session d'octobre avec la deuxième Chambre du Parlement. À moins qu'elle ne soit validée, selon une procédure des plus expresses, chose qui n'arrange pas les choses à l'heure où tous les regards sont tournés vers les grandes orientations qui sortiront du texte afin d'apaiser les inquiétudes sur la santé de l'économie nationale en proie à plusieurs difficultés. Dans les deux cas, d'ailleurs, Mezouar sera amené à décider pour le prochain gouvernement, ce qui pourrait lui servir d'argument de campagne même si jusque-là le RNI se pose en victime première du 25 novembre. La bataille électorale semble bien partie... Lire aussi: Législatives : Le jeu des alliances peut commencer