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Immobilier, la rentabilité s'effrite
Publié dans Les ECO le 29 - 04 - 2013

La marge opérationnelle des immobilières s'est dégradée de -1,5 point entre 2010 et 2011. Les immobilières n'arrivent plus à atteindre le niveau de marge nette de 2008. Les nouvelles mesures en faveur du logement de moyen standing introduites par la loi de finances 2013, n'emballent pas les promoteurs immobiliers.
Moteur de croissance de l'économie marocaine depuis quelques années, le secteur immobilier génère un effet d'entraînement positif stimulant aussi bien pour le marché de l'emploi que les secteurs bancaire et des matériaux de construction (ciment, acier, béton, céramique, etc). Toutefois, le secteur fait face à plusieurs contraintes, à commencer par un recul de la demande en 2012. Les dernières statistiques du ministère de l'Habitat laissent en effet apparaître un tassement de la demande au titre de l'année 2012 qui se matérialise par une baisse de 4,9% de la production en habitat à 259.115 unités, dont 122.000 logements sociaux (-10,1% par rapport à 2011), et un repli de 11,5% des mises en chantier à 419.362 unités, dont 268.000 logements sociaux (-19,4% par rapport à 2011). De plus, les IDE dédiés à l'immobilier ont reculé de 17,7% pour s'établir à 3,67 MMDH au terme du premier semestre 2012. Le secteur affiche certes depuis 2009 un fort tassement de la demande, principalement du haut standing, en raison des effets induits de la crise économique mondiale sur le Maroc. Mais l'introduction de mesures incitatives dans la loi de finances 2010 pour une durée de dix années avait permis de relancer le segment du logement social qui commençait à présenter des signes d'essoufflement en raison notamment du renchérissement des intrants. Le rythme de production avait ainsi affiché une baisse de 30,2% en 2009 comparativement à une année auparavant, tandis que les mises en chantier ont commencé à ralentir à partir de 2008, enregistrant un repli de 3,6% par rapport à 2007 avant de diminuer de 26,5% en 2009.
Toutefois, la mise en place de nouvelles incitations fiscales plus avantageuses dans la loi de finances 2010 pour une durée de dix années a insufflé une dynamique nouvelle au marché : 588 accords représentant 1,38 million de logements ont été signés par le ministère de l'Habitat et celui des Finances entre janvier 2010 et fin 2012. Les mises en chantier des unités sociales augmentent ainsi de 35% en 2010 et de 57,2% en 2011 par rapport à une année auparavant. Dans cette lignée et face aux signes annonciateurs des difficultés de commercialisation du haut standing, la part des unités sociales dans le total des unités mises en chantier se renforce à 56% en 2010 puis à 70% en 2011 contre 43% en 2009. La relance de ce segment a été salvatrice pour la plupart des promoteurs immobiliers. Le chiffre d'affaires cumulé par les entreprises du secteur s'établit à 58,4 MMDH en 2011, affichant une croissance de 17,7% par rapport à 2010. À noter que sur la période 2008-2011, le chiffre d'affaires sectoriel a augmenté de 11% en moyenne par an, soit un niveau de croissance annuelle supérieur à celui du PIB marocain.
Les marges également menacées
Toutefois, après une année 2011 euphorique (marquée par la production de 135.442 unités sociales), le secteur immobilier clôture l'exercice 2012 sur une baisse. Cet essoufflement du logement social (hors axe Casablanca-Rabat) s'est d'ailleurs traduit par un effet d'entraînement négatif sur l'activité commerciale des promoteurs, reflété par la stagnation (+0,5%) à 16,4 MMDH du chiffre d'affaires 2012 des trois premières sociétés du secteur, à savoir Addoha, CGI et Alliances, qui détiennent près de 22% des parts du marché de l'immobilier. La situation est plus grave. Longtemps attendues, les nouvelles mesures en faveur du logement de moyen standing introduites par la loi de finances 2013 ne semblent pas ravir les promoteurs immobiliers. En effet, aucune exonération ne leur a été accordée. Seule une exonération des droits d'enregistrement et de timbre et des droits d'inscription sur les titres fonciers serait concédée aux acquéreurs (dont le revenu mensuel n'excède pas 20.000 DH) de logement dont la surface oscille entre 80 et 120 m2 au prix de 6.000 dirhams/m2. «Nous avons attiré l'attention du gouvernement lors de l'élaboration de la loi de finances sur le caractère irréaliste et irréalisable de la formule proposée. Pour les opérateurs, se lancer dans ce produit, surtout dans la conjoncture actuelle, revient à naviguer à vue», déclare aux ECO Youssef Iben Mansour, président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI). De ce fait, le logement intermédiaire ne sera pas le relais de croissance du secteur. Par ailleurs, d'autres dispositions contenues dans la loi de finances 2013 seraient également en défaveur des promoteurs immobiliers.
Il s'agit notamment de l'institution d'une taxe spéciale sur le fer à béton de 0,1 dirham/kg et les sables des dunes littorales, de dragage et des cours d'eau de 50 dirhams le mètre cube et les sables de concassage de 20 dirhams le mètre cube. Pour rappel, une première augmentation de 0,05 dirhams/kg a été appliquée dans le cadre de la loi de finances 2012 sur la taxe spéciale sur le ciment pour s'établir à 0,15 dirham/kg. La loi de finances 2013 a apporté deux mauvaises nouvelles pour les propriétaires de terrains comme pour les promoteurs immobiliers. Une première mesure décrète l'augmentation du taux d'impôt sur les profits immobiliers et fonciers en fonction de la durée de détention. Celui-ci passe à 25%, si la durée est supérieure ou égale à 4 ans et inférieure à 6 ans (contre 20% auparavant), à 30%, si cette durée est supérieure ou égale à 6 ans (contre 20% auparavant). À noter que le montant de l'impôt ne peut, même en l'absence de profit, être inférieur à 3% du prix de cession. La seconde, quant à elle, concerne l'harmonisation du mode de détermination du prix d'acquisition à considérer en cas de cession d'immeubles acquis par héritage par rapport à celui acquis par donation. Désormais, la détermination de la valeur d'un bien sera fixée sur sa valeur historique et non sur sa valeur vénale et ce, au lendemain de l'avènement d'un décès.
Un secteur lourdement endetté
À noter que le secteur a déjà connu une dégradation de son résultat d'exploitation entre 2010 et 2011. En effet, la marge opérationnelle des immobilières s'est dégradée de -1,5 point pour se situer à 13,1% en 2011 contre 14,6% en 2010. La marge opérationnelle est ainsi vouée à se dégrader en 2013. En effet, les nouvelles mesures censées réduire la spéculation sur le foncier et l'inadéquation entre l'offre et la demande pourraient plutôt freiner la relance tant escomptée du logement dédié à la classe moyenne, entraînant par la même occasion dans les mois à venir la cherté du foncier et un renchérissement du coût de revient des biens immobiliers. La rentabilité nette du secteur immobilier est également en dégradation depuis quelques années. Bien qu'elle soit restée positive, la marge des entreprises de promotion immobilière est en baisse depuis 2008 où elle se situait à 12,4%. Pire encore, ces dernières n'arrivent plus à atteindre ce niveau de marge nette et se maintiennent dans une fourchette comprise entre 5,2% et 7,9%. Cette situation s'explique par le fort accroissement de l'endettement moyen-long termes du secteur (+94% entre 2008 et 2011), générant ainsi des charges financières supplémentaires et donc impactant à la baisse le résultat net sectoriel. À l'origine de cette situation, un alourdissement du BFR sectoriel, sous l'effet d'un allongement très important des délais de paiement. En effet, le délai client du secteur s'est allongé de 28 jours entre 2010 et 2011.
Depuis 2008, il a quasiment doublé passant de 75 jours (2,5 mois) en 2008 à 148 jours (4,9 mois) en 2011. À noter que de la même manière, le délai de paiement fournisseur a explosé, augmentant de 37 jours entre 2010 et 2011. Depuis 2008, le délai fournisseur est passé de 140 jours (4,7 mois) à 264 jours en 2011 (8,8 mois). Les entreprises du secteur ont quasiment atteint leur capacité maximale d'endettement. Le niveau d'endettement du secteur se situe à 88% en 2011, après avoir atteint un pic en 2010 (99%). Elles se trouvent donc aujourd'hui dans une situation difficile. Les banques ont en effet décidé de durcir davantage leurs conditions d'octroi de crédits, exigeant plus de garanties et augmentant les primes de risques spécifiques. «Cette situation est confirmée par le dernier rapport de la politique monétaire de Bank Al-Maghrib du mois de mars 2013». Selon ce dernier, les prêts aux promoteurs ont connu un recul de 4,6%.


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