Catherine A. Allen PDG de Santa Fe Group De plus en plus de femmes hautement qualifiées aspirent aujourd'hui à décrocher un siège au conseil d'administration des entreprises. Si la société marocaine n'a pas encore bien intégré cette tendance, l'exemple américain dresse déjà quelques pistes d'amélioration. Les ECO : Comment une femme peut-elle s'auto- évaluer avant de prétendre à un poste au conseil d'administration ? Catherine A. Allen : Il s'agit pour elle de penser avant tout à l'ensemble des compétences, des formations et des connaissances dont elle dispose; ceci, sans oublier d'évaluer son réseau de contacts et de réfléchir à la place qu'elle peut avoir dans le conseil d'administration. Une question doit se poser d'emblée, à savoir l'apport concret qu'elle peut présenter à la société en occupant un siège au conseil d'administration. Pour y répondre, une femme doit s'intéresser en premier lieu à la façon par laquelle elle pourrait faire partie de ce conseil d'administration, de comprendre, de savoir dans quelle mesure elle peut être une conseillère stratégique pour son PDG. Il faut également qu'elle puisse avoir toutes les compétences requises pour réaliser et accompagner des plans de succession, ou si elle dispose des compétences financières nécessaires afin de mettre son expertise au service de l'entreprise. Enfin, il s'agit aussi d'avoir des compétences et connaissances technologiques afin d'assurer une bonne gestion des risques et des impacts des nouvelles technologies sur le fonctionnement de la société. Pour le cas précis du Maroc, les femmes qui aspirent à décrocher un siège au conseil d'administration doivent impérativement maîtriser le rôle que le Maroc peut jouer en Afrique et aussi faire preuve d'innovation en présentant constamment de nouvelles idées de business. De nombreuses femmes occupant des postes à responsabilité témoignent de leur difficulté à concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle... Le plus important est de bien organiser sa vie. Il faut savoir décréter que les week-end sont un temps sacré consacré à la famille ou prendre du temps pour soi et marquer un temps d'arrêt parce que tout le monde en a besoin. Il est certes évident qu'une femme ayant un poste à responsabilité a des journées de travail de dix heures voire douze heures parce que le travail l'exige. Cependant, une fois rentrée à la maison, il est impératif qu'elle éteigne son smartphone afin de consacrer un peu de temps à sa famille. Il faut savoir se mettre des limites. Deuxièmement, il faut faire appel à une aide externe, à savoir des femmes de ménage ou encore une nounou pour les enfants, à moins que les enfants aient atteint un âge qui leur permette de faire preuve de plus d'indépendance. Troisièmement, il faut savoir qu'il n'est pas possible d'être parfait en tout. Les femmes sont-elles techniquement efficaces dans les conseils d'administration ? Une étude américaine a montré qu'une entreprise qui compte trois femmes au conseil d'administration présente une meilleure corrélation avec une meilleure performance. La raison est principalement liée à la diversité. L'homme peut avoir des prospectives différentes de celles de la femme. Dans un même ordre d'idées, les femmes perçoivent le risque différemment. Les femmes pensent à des conséquences imprévues, elles ont une approche plus efficace dans la gestion des risques. Elles ont tendance à être le principal consommateur de la famille et sont donc plus en contact avec les produits et les services du marché, et de ce fait plus à même de déterminer leur réputation. L'homme pense d'une manière plus linéaire. Les femmes ont tendance à réfléchir davantage aux employés, aux clients au moment où les hommes pensent exclusivement aux résultats financiers. Aux Etats-Unis, le régulateur choisit souvent des femmes pour siéger aux conseils d'administration, notamment en tant que conseillères financières dans le sens où, pendant la crise financière, elles ont fait preuve d'efficacité à ces postes. Qu'est-ce qui peut convaincre un patron de nommer des femmes au conseil d'administration ? Il y a parfois une pression externe qui oblige les PDG à intégrer les femmes au conseil. Aux Etats-Unis, il faut compter l'influence des grands investisseurs qui reste très importante. Ils sont principalement intéressés par la diversité dans l'entreprise. Ils exercent de ce fait une pression sur les comités pour nommer des femmes au conseil d'administration. Deuxièmement, vous pouvez dire qu'un conseil qui n'a pas de point de vue diversifié n'a pas d'avantage pour comprendre le marché de l'entreprise. Le conseil d'administration doit être aussi diversifié que le marché et les consommateurs le sont, d'où la place primordiale de la femme aux commandes des entreprises.