Jérôme Stoll: Directeur délégué à la performance et Directeur commercial du Groupe Renault Les ECO : Dans un contexte de sortie de crise en Europe, comment Renault s'est comporté durant ces derniers mois ? Jérôme Stoll : La conjoncture actuelle du marché automobile mondial vit un paradoxe, à savoir qu'il y a deux zones qui restent en croissance et qui sont la Chine et les Etats-Unis, puis le reste du monde qui s'est complètement inversé par rapport à la situation en 2013. Cette année là, nous avions des marchés émergents comme le Brésil, la Russie et l'Inde qui étaient tirés par la croissance, tandis que ceux de l'Europe étaient touchés par la récession. Or, en 2014, nous avons vécu le renversement de cette situation. Face à la baisse des ventes au Brésil, en Russie et en Inde, l'Europe a vécu un début de reprise. Du coup, le Groupe Renault qui est historiquement et fortement présent en Europe en a profité. D'abord par son implantation, ensuite grâce au renouvellement de ses produits qui connaissent un joli succès, qu'il s'agisse de la gamme Renault ou celle de Dacia. Finalement et à l'échelon européen, le Groupe Renault a été celui ayant le plus progressé en volume en 2014 et Dacia, la marque ayant le mieux amélioré sa part de marché. Le groupe s'est, donc, plutôt pas mal tiré de cette situation de crise l'an dernier. Entre les Captur, Kadjar, Koleos et Duster, que représentera le segment du SUV dans les ventes mondiales du Groupe Renault ? Si l'on prend en considération le Duster qui est le SUV le plus vendu du Groupe Renault, avec environ 400.000 ventes par an, le Koleos qui en fait 50.000 chaque année et le Captur qui s'est déjà écoulé à plus de 200.000 exemplaires, ce qui correspond à ce que devrait pouvoir faire le Kadjar, voire plus... je vous laisse faire le calcul. Jusqu'à quand le Groupe Renault va-t-il rester tributaire de la gamme Entry (Dacia) pour progresser en volume, comme en rentabilité ? Je ne vois pas ce que vous voulez dire par tributaire. Pour moi, Dacia est une marque du Groupe Renault et elle constitue l'un de ses éléments de croissance à l'échelon mondial. Donc nous nous appuyons sur la gamme dite Entry ou par extension Dacia, parce qu'il y a une vraie demande autour de ses produits, mais nous travaillons aussi sur la gamme Renault avec un certain nombre de nouveautés, dont fait partie Kadjar et qui incarne clairement la volonté du groupe d'être présent dans tous les segments avec des véhicules nouveaux, modernes, séduisants et attractifs. Vous ne prévoyez pas un renouvellement anticipé du Lodgy, suite à ses méventes ? Il n'y a pas de raison d'anticiper le renouvellement de Lodgy. Il faudrait faire la part des choses entre le segment et le véhicule lui-même. Dans son segment, Lodgy se vend plutôt bien, mais le marché du monospace, lui, a un peu chuté ces dernières années. En fait, ce que nous allons faire pour accroître les ventes de ce modèle, c'est lui chercher de nouveaux marchés en dehors de la zone classique européenne, comme par exemple l'Inde où il sera lancé prochainement. Les voitures de Renault devenant de plus en plus fiables, n'envisagez-vous pas d'étendre la garantie à 5 ans, ne serait-ce que pour vous aligner avec les coréens qui continuent à bien évoluer en Europe ? Renault a une image en Europe que n'ont pas encore les véhicules coréens aujourd'hui. Je pense que notre groupe doit surtout continuer à se focaliser sur la satisfaction de ses clients et c'est ce que l'on fait. Dans ce registre, je peux vous annoncer que nous avons un plan encore plus approfondi qu'auparavant sur les insatisfactions qu'ont les clients autour de nos véhicules. Le but final étant de faire en sorte que les clients soient de plus en plus satisfaits. Quel est le principal objectif de Renault pour 2015 ? Pour 2015, la stratégie de Renault est très claire : devenir la deuxième marque en Europe, alors qu'elle est troisième actuellement. Avec l'arrivée du nouvel Espace et du Kadjar, ainsi qu'une nouvelle Twingo évoluant en année pleine et un Captur qui continue sa constance, nous devrions pouvoir consolider cette ambition de devenir numéro 2 en Europe. Le groupe Renault pourra-t-il rester compétitif sans délocaliser ? Renault a pris des engagements de fabrication en France, comme dans un certain nombre de pays. Notre stratégie industrielle est arrêtée et elle est très claire, avec des pôles, que ce soit à Tanger, en Roumanie ou en Europe. Mais, il n'y a pas aujourd'hui de plan de délocalisation particulière ou complémentaire. Comment va s'opérer le retour d'Alpine et comment va se positionner cette marque face à la concurrence ? Alpine c'est une tentative de réutiliser un actif dormant de notre entreprise et d'en faire un business model qui fonctionne. À valeur aujourd'hui, nous avons une voiture quasiment finalisée, que l'on peut produire dans son usine, en l'occurrence celle de Dieppe. Maintenant, il faudrait trouver l'équation d'un bon business model et c'est sur cela que l'on travaille actuellement. Quant à son positionnement face à la concurrence, je pense qu'Alpine a une l'histoire et un ADN non négligeables, qui seront réinterprétés dans le premier véhicule que l'on sortira à l'occasion de la renaissance de la marque. On parle de plus en plus de la future Laguna comme étant une berline particulièrement séduisante, que pouvez-vous nous en dire ? Je le confirme et vous avez raison de le dire, c'est un très beau véhicule ! J'aurais même du mal à vous dire le contraire. Effectivement, dans ce modèle qui va remplacer à la fois la Laguna et la Latitude, vous allez retrouver la patte de Laurens van den Acker qui est un designer de grand talent. Pour l'instant, je ne peux rien vous dire, si ce n'est que cette berline sera révélée l'été prochain. Croyez-vous que le design soit suffisant pour rivaliser avec les modèles allemands ? Renault ne cherche pas à copier les allemands, mais à tracer sa propre voie. Renault a une histoire, un ADN et une culture. Nous voulons que nos voitures soient une alternative aux allemandes et correspondent mieux aux attentes des clients.