Printemps arabe, attentat de Marrakech, durée des vacances diminuée par le mois de Ramadan et le décalage de la date des examens, été électoral, effets tardifs de la crise financière, autant de facteurs qui menacent le secteur touristique national. À ce jour, le taux moyen de remplissage des hôtels nationaux est de 40% seulement alors que nous sommes au pic de la saison. Pour essayer de sauver les meubles, l'Office national marocain du tourisme (ONMT) mise sur le potentiel existant (et donc sûr), c'est-à-dire sur les touristes locaux. Pourtant, les professionnels, représentés par la Fédération nationale du tourisme (FNT), ne veulent pas considérer les touristes marocains comme une issue de secours. «Nous refusons de considérer le tourisme interne comme une bouée de sauvetage, c'est une cible à part entière avec ses propres spécificités, qui génère le quart de notre chiffre d'affaires, juste derrière le marché français», insiste Mohamed Saïd Tahiri, directeur général de la FNT. De toute façon, l'opération Kounouz Biladi a débuté hier, le 4 juillet. Elle est la mesure phare visant à encourager le tourisme interne en rendant plus attractifs (via des offres promotionnelles) les établissements hôteliers. Sur le papier, cette initiative est salutaire et représente une «chance» pour sauver cette saison touristique, sérieusement compromise. Cinq sur 35 «Les temps sont durs», déplore effectivement le DG de la fédération. Seulement voilà, l'opération ne semble pas faire les affaires des professionnels. Les hôteliers ne semblent pour le moins pas manifester un grand enthousiasme pour ce programme. Contacté à ce sujet, Hamid Addou, directeur général de l'ONMT, parle d'«une cinquantaine d'hôtels à travers tout le pays qui s'engagent à participer à Kounouz Biladi», soit à peine 10 % de l'ensemble des établissements susceptibles d'y adhérer. Addou nous a aussi fait part de sa vision de la réussite de ce programme : «en 2010, on a enregistré une hausse de 30 % des nuitées, liée directement à Kounouz Biladi. Pour cette année, on s'attend au moins à un pareil accroissement». Cependant, sur le terrain, les hôteliers ne le voient pas due cet œil. Certains parlent d'un bilan très mitigé pour les éditions précédentes, d'autres refusent catégoriquement de participer à l'opération. Et pour preuve, quand on se connecte sur le site de Kounouz Biladi pour consulter la liste des hôtels participants, seuls 5 sur les 35 concernés affichent clairement leur participation et proposent des offres concrètes. On est donc très loin de la cinquantaine d'hôtels recensés par l'ONMT. D'autres établissements parlent d'offres internes plus avantageuses que ce qui est proposé dans le cadre de Kounouz Biladi. Côté FNT, on assure que la Fédération nationale de l'industrie hôtelière (FNIH) a dressé une liste d'hôtels participants, qui se sont contractuellement engagés à proposer des produits s'inscrivant dans le cadre du programme. La FNT assure même que «des contrôles du respect de ces engagements sont effectués auprès des unités hôtelières». Publicité mensongère, s'insurgent plusieurs clients qui ne retrouvent pas les conditions affichées au moment de réserver pour leur séjour. D'autres vacanciers, dont certains ont «bénéficié» du programme en 2010 confient que «les engagements pris par les hôteliers ont été peu ou pas respectés, on dirait qu'ils préfèrent la clientèle étrangère». Des affirmations que Tahiri essuie d'un revers : «si un client ne peut accéder aux offres avantageuses du programme, c'est qu'il s'y est pris trop tard, après que les quotas prévus par l'hôtel se sont épuisés», explique-t-il pour justifier ces cas de figure. Quant au ministère du Tourisme, une source très proche du dossier déplore, sous couvert d'anonymat, que «pour cette année, le programme a été très mal diffusé». De tout ce remue-ménage, une chose est sûre, ce n'est pas en tirant la couverture, chacun de son côté, qu'on arrivera à redresser la barre d'un secteur déjà atteint.