Le 19 avril dernier, Fatym Layachi présentait son nouveau spectacle dirigé par Mehdi El Kindi et mise en scène par Zineb Andress Arraki autour de l'Andalousie. «Rallumer les étoiles – Kane ya makan» raconte l'histoire, la culture, la vie à travers la musique et à travers la rencontre d'artistes de différents horizons. Coulisses d'une aventure humaine, avant tout. Lorsque Fatym Layachi et Mehdi El Kindi raconte «Rallumer les étoiles – Kane ya makan», ils parlent d'un bout de leur être et laisse facilement transparaître leur âme et leur passion. Un projet musical qui leur tient à cœur et qu'ils ont minutieusement préparé pendant des mois en allant à la rencontre de l'histoire, de la musique d'autrefois, sur les traces du passé pour mieux comprendre un présent pas toujours cohérent et un avenir presque incertain. «J'avais envie de raconter cette histoire sans faire une reconstitution historique parce que nous ne sommes pas historiens, mais pour s'offrir le luxe de faire cela, il a fallu maîtriser l'histoire, la chronologie, les faits marquants, les guerres, l'histoire musicale. Il y a eu beaucoup de travail en amont pour pouvoir nous permettre de nous dire : voilà, maintenait je raconte mon histoire. C'est quelque chose qui me faisait rêver car l'Andalousie, c'est la musique, l'architecture, la poésie, la cuisine et l'art de vivre», confie l'actrice, chroniqueuse, qui trouve son bonheur dans l'écriture et les mots : «Ma fascination première, c'est l'Andalousie, c'est en même temps un endroit et un moment de l'histoire qui me fascinent. L'Andalousie habite les conscients collectifs de tous les peuples de la Méditerranée, une sorte d'âge d'or». Cette ruée vers l'art leur a permis de raconter de la meilleure façon qui soit pour passer le message de la manière la plus touchante possible via la musique. Une tâche difficile, un travail de recherche et d'intelligence musicale que Mehdi El Kindi, directeur artistique et percussionniste pour le trio Jamal Nouman Trio, a su réaliser avec beaucoup de passion et d'amour pour une musique qu'il connaît bien et qu'il côtoie beaucoup. «Avant tout, il y avait une histoire à raconter donc cela facilite les choses. Après, il faut remplir les cases, des prémices de ce que l'on raconte jusqu'à la chute de Grenade. L'idée est d'aller chercher dans la musique médiévale et ensuite dans un répertoire plus large comme la musique algérienne du 20e siècle, aux poèmes à mettre en musique, trouver des thèmes musicaux qui collent à l'histoire puisqu'on est dans un travail d'ambiance. Du moment qu'un texte ou un poème collait à l'histoire, il fallait créer la musique», rappelle l'artiste qui, à l'aide de son acolyte, a choisi minutieusement les artistes du projet. «On a vraiment contacté les artistes qui nous faisaient rêver !», s'enthousiasme Fatym Layachi et cela se ressent. «Kane ya makan» est une sorte de premier tome de l'aventure «Rallumer les étoiles», qui sera présentée en 2015. Le premier volet sur l'Andalousie regroupe des pointures, des artistes confirmés et des virtuoses qui avaient une réelle envie de travailler ensemble, de partager des connaissances outre-Méditerranée et surtout d'apprendre des uns et des autres. C'est ainsi que pour raconter la grande histoire de l'Andalousie : sa naissance, son apogée et sa chute, le trio regroupe les nationalités, les parcours, les âges, les cultures pour réinterpréter un répertoire choisi de musique andalouse grâce à la guitare de Nino Josele et le luth de P'tit Moh, soutenus par quatre autres musiciens : Rachid Zeroual pour le Ney, Mohamed El Ouahabi aux percus, Alberto Garcia et Jamal Nouman au chant. Un voyage outre-mer qui en dit long sur cette histoire partagée avec le Maroc, symbole de tolérance et de diversité, lequel voyage s'est préparé en 5 jours seulement lors d'une résidence artistique qui s'est tenue du 14 au 19 avril au Studio Coda à Casablanca. Une occasion de découvrir le talent inné du jeune percussionniste Mohamed El Ouahabi, qui a enregistré son premier album à l'âge de 7 ans sous la protection de Jamal Nouman, fascinant dans ce projet puisqu'il passe du flamenco au Melhoun avec une facilité déconcertante. Symbole du meltingpot musical, il chante même en berbère, en arabe et en espagnol sans transition aucune. Nino Josele a été imaginé pour ce projet, rêvé presque naïvement par Fatym Layachi et Mehdi El Kindi, sans aucune certitude qu'il accepte de faire partie du projet fou, mais il a dit oui car impossible de dire «non» à Fatym Layachi. Le spectacle sera présenté dans plusieurs autres villes et ne s'arrête pas là puisque le Maroc pluriel a d'autres histoires à raconter. «Rallumer les étoiles est un projet ambitieux prévu pour 2015. Le squelette de tout cela, c'est «Kane ya makane», la trame narrative, une métaphore musicale de l'Andalousie du luth qui vient à la rencontre de la guitare, depuis la fondation jusqu'à la chute de Grenade en 1492. Le sang de ce squelette, c'est «Alegria» que l'on présentera au mois de juin à Fès pour explorer l'arabe, l'hébreu, le sépharade et l'espagnol en partant de ce répertoire musical riche du gharnati». Après «Kane ya makan» et «Alegria», le trio gagnant formé par Fatym Layachi, Mehdi El Kindi et Zineb Andress Arraki s'attaqueront à l'«identité» en mettant en avant les femmes et la musique avec la rencontre des flamencas et des chikhates. Un projet dit plus terrien et organique sans instruments de musique. En somme, l'initiative est belle, habitée et cohérente en racontant les racines et en rappelant notre pluralité et le pouvoir de la tolérance, oubliés par les nouvelles générations. En attendant, un avant-goût de «Rallumer les étoiles» avec «Kane ya makan» se déroulera le 16 mai à Chefchaouen dans le cadre du Festival Alegria, puis le 30 mai à Rabat, dans le cadre du Festival Mawazine avant d'entamer une tournée à travers tout le Maroc. Pour faire de cette épopée naissante une odyssée qui marque puisque selon Mehdi El Kindi, la seule ambition pour son «bébé» et pas des moindres est «qu'il apprenne à marcher et qu'il se mette à courir»...