En vérité, je ne devrais pas m'amuser avec ça, ne serait-ce que pour ne pas déconcentrer les candidats. Ceci dit, je suis sûr qu'à l'heure où je commets ces délires, ils doivent avoir la tête ailleurs, en train d'essayer de chercher où pourrait bien se trouver les réponses et les solutions, ce qui est un dur labeur, aussi bien pour les bûcheurs que pour les copieurs. D'ailleurs, bosseurs ou tricheurs, je n'en connais pas beaucoup qui lisent les journaux, même quand ils ne sont pas en train de souffrir le martyre à cause du bachot. Et il n'y a pas que les journaux qu'ils ne lisent pas. La lecture des livres n'est pas non plus leur activité favorite. Même le dictionnaire, ils ne l'ouvrent jamais, sauf parfois pour vérifier, par exemple, si « je t'aime » s'écrit avec un ou 2 m. (On me souffle à l'oreille que personne n'ouvre plus de dictionnaire depuis l'arrivée de tonton Google, le mec qui sait tout sur tout). Je parle, je parle, mais, en fait, je ne me souviens plus de ce que je voulais vous dire. Ah ! Ca me revient ! Le bac ! Oui, j'ai eu envie d'en parler aujourd'hui, d'abord par nostalgie – ça fait si longtemps, presque dans une autre vie - mais, surtout, pour méditer un peu sur ce qu'il est devenu, ce qu'il vaut, ce bac nouveau, et s'il n'y a plus grand chose à en faire, alors, comme disait Lénine, «Que faire ?». Rassurez-vous, je ne vous ferai pas de conférence là-dessus. Certes, je crois avoir des choses à dire, mais je vais me limiter à deux trois petites idées. D'abord, c'est vrai, il y a plus de candidats au bac qu'avant et donc, c'est logique, il y a plus de bacheliers. Mais, le problème est ailleurs : c'est la qualité du bac, qui est bien en deçà de ce qu'il était avant. Pourtant, avant, il y avait bien des riches et des pauvres, mais il n'y avait pas, comme aujourd'hui, des écoles pour les riches et des écoles pour les pauvres. Oui, bien sûr, il y avait la Mission, et je suis bien placé pour le savoir car j'y étais, mais je n'avais pas à être trop fier. En effet, juste après le bac, je m'étais retrouvé à la fac, en France, avec des concitoyens issus des écoles marocaines publiques, donc, des bacheliers «populaires», et, croyez-moi, certains avaient un niveau bien supérieur au mien, moi qui, modestie mise à part, étais loin d'être un cancre. Bon c'est vrai, j'étais meilleur qu'eux en français, mais eux, étaient bien plus costauds que moi ailleurs, et pas qu'en arabe. Ceci expliquant peut-être cela, on vivait - presque - en parfaite harmonie. Nos parents nous avaient demandé d'étudier, de nous éloigner de la politique et, donc, de la fermer. Au risque d'être maudits, nous ne les avons pas suivis, il y a eu des dégâts, mais nous ne le regrettons pas. Aujourd'hui, la liberté est là, nos malheureux bacheliers ne risquent plus rien, pourtant, ils ne disent rien. On leur a appris à ne plus rien dire. Pauvre jeunesse !