Pour être compétitives, les entreprises recrutent des profils avec des salaires importants sans se soucier des problèmes d'équité en interne. Emploi occupé et sa valeur pour l'entreprise, performance individuelle et collective, adéquation du profil du titulaire avec le poste..., des facteurs-clés sont indispensables pour assurer la cohérence d'une politique salariale. L'équité, un aspect sensible que peu d'entreprises arrivent à assurer même en cas de mise en place d'une politique de rémunération. Quels sont les problèmes rencontrés à ce niveau ? Comment assurer l'équité tout en tenant compte de la diversité des attentes en interne ? Eléments de réponse avec Réda Massoudi, directeur pôle conseil en management au sein du cabinet LMS ORH. L'équité est un sujet sensible au sein des organisations. Pensez-vous que les dirigeants s'y intéressent ? Dans les discours, oui. Le top management, les responsables du capital humain, les salariés, les partenaires sociaux..., il est clair que toutes les composantes de l'entreprise s'y intéressent. Pour exemple, Danone International, leader mondial des produits laitiers, a fait le choix de ne pas être compétitive en matière de rémunération sur le plan international. Un choix largement partagé par ses salariés sauf qu'ils sont intransigeants en matière d'équité interne. Ils n'acceptent pas les disparités au niveau des salaires en interne. Globalement, les entreprises, surtout les plus structurées, mettent en place des politiques RH en parfaite ligne avec les exigences de la stratégie, la politique du groupe, la position de l'entreprise sur le marché, la concurrence sur les marchés de travail, le niveau d'attractivité souhaité... En effet, il est tenu dans la conception de leur système de rémunération des éléments importants comme les pratiques salariales dans les entreprises comparables, le poids de référence de l'emploi, l'équité interne (pour les postes où il y a la masse), la rareté du profil et la sensibilité de certains postes. Comment justement mettre en place un véritable management de l'équité alors que les attentes sont en fait très variées surtout en matière salariale ? Dans une perspective de mise en place d'une gestion des emplois claire et cohérente, fondée sur les contributions de chaque poste, de plus en plus d'entreprises marocaines, à l'instar des multinationales, utilisent la classification des emplois comme outil d'évaluation de leur organisation et de cohérence de leur système RH. La méthode de classification permettant d'évaluer le poids de chaque fonction (niveau de contribution, impact, complexité...) et de regrouper les fonctions de poids comparable en classes homogènes. Cette classification constitue dès lors un puissant outil de mesure de l'équité du système. Au-delà de son rôle d'ordonnancement des postes, la classification permet aux entreprises d'évaluer sinon de construire leurs grilles salariales. Bien évidemment, cette démarche joue un rôle dans l'appréciation de la cohérence et l'équité interne d'un système de rémunération. Se doter d'une grille de classification des postes permet, au final, aux entreprises de mesurer en particulier la cohérence générale de leur politique salariale et leur niveau de compétitivité sur le marché. Cet outil d'analyse permet notamment de définir le niveau de rattrapage marché et de réduction des écarts internes. Toujours est-il que même si les entreprises mettent en place des grilles salariales, il n'empêche que les écarts pour certains postes similaires persistent... Tout à fait ! Dans le cadre de nos missions, il nous arrive parfois de constater des disparités flagrantes, sans que cela ne soit pas orchestré de manière explicite. Le problème est que certaines entreprises, qui étaient dans un contexte de développement ou de forte compétitivité, étaient obligés de recruter certains profils pointus dans certains domaines d'expertise, souvent à des salaires importants. Ce n'est qu'après que les problèmes d'équité se posent pour ces entreprises. Pour résumer, les entreprises préfèrent d'abord se concentrer sur les priorités de développement en y mettant le prix sans se soucier des problèmes d'équité en interne. De même qu'il y a quelques années, des salaires de certains postes se sont bonifiés au bout de deux à trois ans, ce qui a provoqué des écarts. Quels sont les problèmes que rencontrent les entreprises à ce niveau, à savoir ne pas pouvoir assurer l'équité ? Les conséquences sont connues. Sentiment d'injustice, démotivation, fort turn-over, récupération par la concurrence, et in fine, un management qui n'assume plus. En fin de compte, sur quoi repose les caractéristiques d'un bon système de rémunération, en tout cas le plus efficient ? Cela dépend de la stratégie et des objectifs visés par l'entreprise. En effet, en fonction de ces deux dimensions, l'entreprise peut décider de ce qu'elle veut rémunérer : l'emploi occupé, les compétences requises, les conditions de travail, les performances individuelles, les performances collectives, l'innovation et la créativité, l'engagement, l'implication... Si on veut parler d'un système de rémunération efficient, sans vouloir être simpliste, celui-ci doit être construit autour des paramètres suivants: l'emploi occupé et sa valeur pour l'entreprise, la performance individuelle et collective, et l'adéquation du profil du titulaire avec le poste.