Deux tiers des chômeurs sont dans cette situation depuis plus d'un an. Le chômage de longue durée est tout particulièrement accentué en milieu urbain et chez les diplômés. Les femmes restent au chômage 39.1 mois en moyenne. Le Maroc compte, à la date du 31 mars 2012, 1,13 million de chômeurs, soit 93 000 chômeurs en plus par rapport à la même période de 2011. Rapporté à la population active, ce nombre donne un taux de chômage de 9,9% au lieu de 9,1% il y a un an. En lui-même, ce ratio peut ne pas signifier grand-chose pour le citoyen lambda. Son contenu, en revanche, est très parlant. Il montre à quel point la question du chômage, dans ses détails, est plus complexe que ne le suggère le taux moyen de 9,9%. Et ces détails existent, pour peu que l'on se donne la peine de les trouver, puisque le Haut commissariat au plan (HCP) les publie régulièrement. Le profil de ce chômage tel qu'il se dégage de ces détails est que, très largement, il est de longue durée (égale ou supérieure à un an), et il frappe, prioritairement, les citadins, les jeunes et les diplômés. En effet, selon les statistiques officielles, deux tiers des chômeurs sont sans travail depuis plus d'un an. La durée moyenne du chômage est de 32,3 mois (2 ans, 8 mois et 9 jours), et il s'agit là d'un phénomène structurel puisqu'il dure depuis longtemps. Le chômage de longue durée frappe les urbains davantage que les ruraux : la durée moyenne du chômage est respectivement de 35,6 mois et 20 mois. Comme on peut le deviner, ce sont surtout les diplômés du supérieur (près de 80% d'entre eux) qui sont victimes du chômage de longue durée. La durée moyenne chez cette catégorie de chômeurs est de 40,2 mois, au lieu de 34,1 mois pour les diplômés de niveau moyen et 23,6 mois pour les non-diplômés. Mais par sexe, et abstraction faite du diplôme, ce sont les femmes qui restent plus longtemps au chômage : 39,1 mois en moyenne, contre 29,7 mois pour les hommes. 32,8% des jeunes citadins de 15 à 24 ans sont au chômage En France, par exemple, le chômage de longue durée touche 40,4% des chômeurs (contre 66 % au Maroc) selon les statistiques de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). La durée moyenne du chômage y est de 15 mois. L'autre trait qui caractérise le chômage au Maroc est qu'il est principalement un phénomène urbain. 80% des chômeurs (huit sur dix) résident en effet en zones urbaines. C'est cette constatation, soit dit en passant, qui nous a conduits, il y a un an, à considérer que le vrai taux de chômage, en réalité, celui dont il faut le plus tenir compte, c'est celui qui frappe le monde urbain (voir Article). Cette considération se trouve, en outre, renforcée par le fait qu'en milieu urbain, non seulement la durée moyenne du chômage est plus longue qu'en milieu rural, mais en plus ce sont les jeunes qui en font les frais. 32,8% des jeunes citadins âgés de 15 à 24 ans et 19,1% parmi ceux âgés de 25 à 34 ans sont au chômage. On comprend dans ces conditions que plus de 84% des chômeurs urbains soient encore célibataires. Il faut noter que le chômage massif des jeunes est un phénomène qui sévit un peu partout. Et pas seulement au Maghreb et en Afrique. En Europe, depuis que la crise s'y est installée, le chômage des moins de 25 ans atteint, dans certains pays, des sommets : la moyenne dans l'Union européenne et en zone euro est respectivement de 22,6% et de 22,1% (chiffres de mars 2012 d'Eurostat). Rappelons qu'au Maroc, le chômage des jeunes de 15 à 24 ans, selon les derniers chiffres du HCP, s'établit à 19,1%, contre 17,4% il y a un an. En milieu urbain, le taux de chômage de cette catégorie de la population atteint 32,8%, au lieu de 29,3% à la même période de 2011. Toute la complexité de la question apparaît dans ce profil des populations en chômage. Contrairement au passé où le chômeur était en général un rural analphabète, aujourd'hui il est à la fois urbain, éduqué et jeune. Le phénomène est à la fois culturel et économique. Culturel, parce que le demandeur d'emploi aujourd'hui n'accepte pas n'importe quel poste de travail ; économique, parce que la croissance ne génère pas assez d'emplois, et surtout pas assez d'emplois de haute qualification.