On le dit partant mais l'information n'est ni confirmée ni infirmée. A deux mois du congrès, aucun candidat rival ne s'est encore manifesté officiellement. Le parti ambitionne de changer ses structures et devenir une «grande» formation. Meurtri par un scrutin électoral où il s'est classé troisième sans toutefois faire partie de l'équipe gouvernementale, lui qui a passé près de treize ans continus au sein de l'Exécutif et qui avait fait rêver ses militants en leur promettant la Primature, le RNI vit des jours de doute. Que deviendra-t-il ? «Ce sera un parti encore plus fort», rassure Anis Birou, député et membre du comité préparatoire du prochain congrès du parti de la colombe. Programmé du 27 au 29 avril, «le Ve congrès sera une étape cruciale », ajoute-t-il. Au parti, on se veut, naturellement optimiste, à l'instar de Chafik Rachadi, député et président du groupe parlementaire, qui prédit qu'à l'avenir «on parlera du RNI comme un grand parti». Qu'en est-il des départs et des démissions dont les échos sont repris régulièrement par la presse ces dernières semaines ? «Il y a certes des sorties médiatiques dans ce sens, et c'est naturel dans un parti à la veille de la tenue de son congrès. S'il n'y avait pas ces remous on se serait posé des questions. Car cela prouve que le RNI est un parti vivant», tempère Ouadie Benabdallah, député et membre du bureau exécutif. Bien sûr, ce que vient de vivre le RNI ne fait pas que des heureux. Rares sont les partis qui ont échappé aux critiques soulevées sur la gestion des candidatures lors des élections du 25 novembre dernier. Le RNI ne fait pas exception. Sauf que la direction du parti a déjà fait face à une fronde au début de l'année dernière. Salaheddine Mezouar avait alors tenté d'étouffer dans l'œuf la revolte en se prononçant, le 13 mars 2011, pour la tenue d'un congrès extraordinaire (annoncé pour fin juin). La suite est connue, le calendrier électoral a pris le dessus et contraint la direction du parti à reporter le congrès. La contestation ne s'est pas pour autant apaisée. Après les élections du 25 novembre, la décision d'opter pour l'opposition, après que le parti a été depuis toujours dans le gouvernement ou dans la majorité depuis 1984, n'a pas non plus été digérée par nombre de militants. Pourtant, «le parti se trouve dans d'excellentes conditions», assure le député de Casablanca Ouadie Benabdallah. «Des équipes du bureau exécutif et du comité central travaillent actuellement sur les programmes logistique et organisationnel. Les résultats de leurs travaux seront transmis aux instances locales pour débats et approbation lors des congrès provinciaux qui se tiendront prochainement. De même, une charte qui redéfinira notre orientation politique sera soumise au débat au niveau local avant d'être adoptée au congrès», explique-t-il. Normalisation politique, oui, mais à quel prix ? Après le PAM qui a opté pour la social-démocratie comme identité politique, voici donc le RNI qui décide de s'attaquer, lui aussi, à ce chantier. Sauf que pour le moment, explique Anis Birou, «plusieurs scénarios ont été proposés, mais nous n'avons pas encore tranché». Ce sera néanmoins un pas décisif pour un parti qui est né pour accompagner le «Maroc nouveau» de l'après-Marche verte, en 1978. D'un parti de changement qu'il voulait devenir, il a été catalogué comme parti de l'Administration, avant de pouvoir asseoir définitivement, tout récemment, sa légitimité par les urnes. Il a fini par prendre sa revanche face aux partis qui se revendiquent de la légitimité historique. Bien plus, le RNI n'a cessé d'appeler, depuis l'avènement de Salaheddine Mezouar à sa tête le 23 janvier 2010, au passage de la culture de consensus à la normalisation de l'action politique. Il a été l'un des premiers partis à mettre en application cette revendication : il a choisi naturellement de se conformer au verdict des urnes en optant pour l'opposition. Toutes ces décisions prises par la nouvelle équipe dirigeante paraissent en parfaite cohérence avec le discours qu'a tenu le parti pendant ces deux dernières années. Jusque-là rien d'anormal donc. Que reproche-t-on exactement au président et à son équipe ? Les principaux griefs retenus contre la direction du parti sont au nombre de trois : «Sa première erreur a été d'engager le parti dans l'alliance du G8 moins de deux mois avant les élections, sans en référer aux instances du parti. Sa deuxième erreur a été de décider, et là encore sans consulter les instances du parti, contrairement aux autres formations politiques, de passer à l'opposition et sa troisième erreur a été de tenir la dernière réunion du comité central (réuni le 28 janvier dernier) sans respecter les procédures», martèle Jaâfar Heikal, ancien directeur du parti et membre démissionnaire du comité central. Partira, partira pas… Bien sûr, la gestion des candidatures lors des élections du 25 novembre dernier et en particulier la liste nationale n'a pas manqué de faire des mécontents. De même que l'on reproche également au président de «ne pas avoir tenu les engagements sur la base desquels il a été élu président à une écrasante majorité en janvier 2010». Quels engagements exactement ? «Celui d'organiser le parti, le dynamiser et le doter de structures parallèles, des organisations de femmes et de jeunes, notamment», explique la même source. De même qu'on lui reproche d'avoir conduit le parti, qui se voyait déjà à la tête du gouvernement à la veille des législatives, à sa «perte». «Faux. Mezouar a fait du bon travail. Il n'était pas seul, tout le bureau exécutif était à ses côtés», rétorque Ouadie Benabdallah. «Son bilan est à tous les niveaux positif. Après les élections nous sommes passés de la 5e place à la troisième. Le RNI est aujourd'hui la troisième force parlementaire avec 52 sièges au lieu de 39 en 2007. Notre électorat est passé de 410 000 votants en 2007 à 560 000 aux élections de 2011. Pour ce qui est des engagements pris en janvier 2010, il s'agit d'un travail qui nécessite l'implication de tout le monde. Beaucoup a été fait, mais c'est un travail de longue haleine qui nécessite des efforts continus», affirme, pour sa part, Anis Birou. Tout ceci n'empêche pas que des voix au sein du parti demandent ouvertement le départ de Mezouar. La rumeur le donne d'ailleurs pour partant et même promu à des responsabilités au sein de la Banque mondiale (il est resté injoignable). Le fait qu'il se trouvait encore, en visite de plusieurs jours aux Etats-unis, alors que nous mettions sous presse, corroborerait cette thèse. Toutefois, assure Ouadie Benabdallah, «nous ne sommes pas au courant de cela. Tout ce que je sais, c'est que Mezouar a annoncé sa candidature pour un second mandat». Ce que confirme son collègue Anis Birou. «Normalement, Mezouar devra succéder à lui-même», affirme le député de Berkane et membre du comité préparatoire du congrès, lui-même présenté par les observateurs comme candidat potentiel à la présidence. Ce qu'il rejette catégoriquement. «Je ne suis pas prétendant. Bien plus, je soutiens la candidature de Mezouar», affirme-t-il pour couper court aux spéculations. Le RNI rééditera-t-il l'expérience du PAM ? Outre l'ancien secrétaire d'Etat à l'artisanat, on parle également de Rachid Talbi Alami, député de Tétouan, ancien président du groupe parlementaire et ancien ministre comme prétendant au poste. Il en est de même pour l'ancien ministre délégué chargé des droits de l'homme, Mohamed Aujar, qui était déjà dans la course à la présidence en 2007 avant de rallier le camp de Mustapha Mansouri contre le candidat rival d'alors, feu Mustapha Oukacha. L'ancien ministre Mohamed Abbou, actuellement président du comité préparatoire du congrès, a fait lui aussi allusion, il y a déjà quelques mois (www.lavieeco.com), à son éventuelle candidature au poste. «Tout est possible», se limitait-il à dire en laissant place au suspense, alors que le parti était sur le point de tenir son congrès extraordinaire en juin dernier avant de décider de le reporter à plus tard apréès les élections législatives du 25 novembre. Seul hic, parmi toutes les personnalités évoquées comme successeurs potentiels de Mezouar, aucune ne fait l'unanimité, observe-t-on. «Aucun des noms évoqués ici et là ne possède le charisme nécessaire pour conduire le parti», assure un cadre sous couvert d'anonymat. La même source affirme que si Aziz Akhannouch n'avait pas quitté le RNI, il serait le candidat idéal au poste. Il faut dire que, à moins de deux mois du congrès, aucune de ces personnalités, ni d'autres d'ailleurs, n'a manifesté officiellement son intérêt pour le poste. «A ce jour, et en toute sincérité, personne n'a émis le souhait de se porter candidat à la succession de Mezouar. J'espère néanmoins qu'il y aura des candidats. Cela dit, le parti compte beaucoup de cadres qui peuvent prétendre au poste», affirme M. Benabdallah. Mais, nuance-t-il, être à la tête du parti n'est pas facile. «C'est un travail de fond. Il faut convaincre la base. Cela a pris par exemple six mois de travail à Mezouar avant d'être élu président», explique ce membre du bureau exécutif. Cela d'autant, précise Anis Birou, que la commission des candidatures n'a pas encore fini d'établir les critères requis pour être dans la course à la présidence. Ainsi, il n'est pas donné à tout le monde de se porter candidat. «C'est cette commission qui va définir les conditions et les critères d'éligibilité pour le poste de la présidence. Elle n'a pas encore remis sa copie», notre Anis Birou. Un relifting à tous les niveaux en vue… C'est certes un enjeu majeur, mais la désignation du futur président du RNI n'est pas le seul fait marquant de ce congrès. Il sera, en plus, question de revoir les structures et l'organisation du parti. Ainsi, il est quasiment acquis que le comité central (410 membres élus par les 700 membres du conseil national, parmi les représentants des unions des provinces et des villes), ne fera plus partie des futures instances du RNI. «Au stade où en sont les travaux de la commission juridique, il ressort que le parti n'a plus besoin de deux instances décisionnelles, le conseil national et le comité central. Nous allons vers le maintien d'une seule : le conseil national», confirme Anis Birou. De même que le bureau exécutif devrait subir un léger lifting. Ainsi et pour éviter, dans le futur, de s'enliser dans des situations d'immobilisme organisationnel, il est prévu de nommer des vice-présidents, une dizaine au total, qui assisteront le président dans son action et se verront même déléguer une partie de ses pouvoirs. Autre novation, le comité préparatoire a décidé dans un premier temps de consulter les militants du parti sur l'organisation qu'ils souhaitent pour leur parti. Ainsi, des questionnaires ont été adressés aux militants dans les régions pour recueillir leurs avis et propositions sur la nouvelle organisation régionale et centrale du parti, les prérogatives et compétences des différentes instances et même sur une éventuelle limitation des mandats dans ces différentes instances, y compris celui du président n Tahar Abou El Farah