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Ces villes marocaines qui ont fasciné et inspiré les grands écrivains
Publié dans La Vie éco le 11 - 05 - 2011

Du 4 au 8 mai, se tient le Salon international de Tanger des livres et des arts, autour des correspondances entre la création et la ville. L'occasion pour «La Vie éco» d'évoquer ces écrivains venus de loin pour qui les villes marocaines sont des sources d'inspiration ou des stimulants à la création.
Blaise Pascal a beau conseiller de ne pas sortir de sa chambre où, à l'en croire, on serait à même de goûter la vraie sagesse à condition de n'en pas bouger; Joachim Du Bellay, en sa sagesse, vanter les joies et avantages du retour au pays et des suaves retrouvailles, force est de reconnaître que le tempérament le plus naturel de la poésie et de la prose aspire plutôt celles-ci vers un insituable ailleurs que vers le seuil de la demeure des ci-devant gens de plume. Partir est le verbe de mouvement le plus familier de tous les faiseurs de vers et trousseurs de phrases. De Montaigne à Camus, de Stendhal à Sollers, de Rimbaud à Adonis, de Kerouac à Hemingway, ils ont célébré les vertus et les vices de l'infinie bougeotte où continue de s'épuiser – et de se ressourcer- le patrimoine génétique de l'homo sapiens. Mais, malgré leurs semelles de vent, souvent leur vol se suspend à la faveur d'un coup de cœur pour une contrée ou une cité, qui deviendra une destination favorite, une amarre saisonnière ou un port d'attache. Le Grenoblois Henri Beyle, dit Stendhal, était si épris de l'Italie qu'il s'ingéniait à trouver un prétexte pour s'y évader; pour la poreuse Venise, le cœur de Philippe Sollers bat la chamade, depuis qu'il s'est miré dans ses eaux boueuses, et l'Américain Paul Bowles, compositeur et romancier, subjugué par Tanger, n'en délogea que les pieds devant.
Juan Goytisolo, descendant d'une longue lignée d'écrivains étrangers subjugués par nos cités
«Si vous vous laissez séduire par Marrakech, vous verrez qu'ensuite tous les autres endroits du monde vous paraîtront ennuyeux». Ainsi parle Juan Goytisolo, l'auteur espagnol contemporain le plus lu. Mis au ban de la société par un franquisme attaché à sa perte pour dissidence clamée haut et fort, il se réfugia à Paris, précisément au Sentier, parmi des nuées d'oiseaux migrateurs, mais l'auteur de Juan sans terre ne se plaisait dans la sédentarité, il se mit alors à planter sa tente dans un endroit de son choix pour décamper, ensuite, vers un autre jugé plus propice, et ainsi de suite. Jusqu'il «rencontrât», par inadvertance, la cité marrakchie. Ce fut un choc esthétique et le commencement d'une passion qui n'est pas près de tiédir trente cinq ans après. Goytisolo n'éprouve que dédain pour le Marrakech en béton, en chic et toc, seule lui importe la vieille ville médiévale formée autour de la mosquée Ben Youssef, construite au XIIe siècle par l'Almoravide Ali Ben Youssef en l'honneur du saint Sidi Youssef Ben Ali. Il ne se passe pas un jour sans qu'il en arpente les coins et les recoins, les rues et les ruelles, avec un égal éblouissement. Jemaâ el-Fna est l'autre objet de fascination du transfuge espagnol. «C'est un cinéma permanent», dit-il. Un livre oral écrit par des analphabètes, une fontaine iné-puisable pour un écrivain. «Les conteurs et leur art inégalable m'ont énormément aidé à affiner ma conduite narrative», reconnaît-il. Son roman, Makbara, illustre cette influence. Comme Trois semaines en ce jardin, par exemple, montre combien Marrakech lui est une source d'inspiration.
Il n'y a pas que les villes qui sont des muses, mais aussi le désert, en dépit des risques encourus
Juan Goytisolo est le descendant d'une longue lignée d'écrivains qui ont eu le courage de quitter une vie occidentale, le confort d'un port d'attache pour répondre à l'appel du Maroc. Tellement irrésistible que certains ont rompu les amarres, brûlé tous leurs vaisseaux afin d'être bien sûrs de ne jamais retourner chez eux, et gagner l'autre côté de l'horizon.
Nombreux ont été les allumés de l'ailleurs consumés dans l'amour du désert marocain. René Caillé (1799-1838), auteur de Voyage à Tombouctou, en est le premier de cordée, chronologiquement parlant. Moulu par une expédition harassante (508 jours et 4 500 km), qui l'a mené jusqu'à Tombouctou, durant laquelle il se faisait passer pour un musulman, il chercha, à travers le désert marocain, une porte de sortie vers l'Europe. Parmi une caravane de 600 dromadaires et au bout de marches inhumaines à travers la hmada du Draâ ponctuées de pauses rafraîchissantes, il atteint la plaine du Tafilalet et la fin du désert, de l'enfer. S'il en est de la brièveté de certaines existences comme de ces étoiles filantes qui zèbrent le ciel nocturne du Sahara, la vie de Camille Douls a cette brillance éphémère qui continue à fasciner longtemps après sa disparition. Membre de la société géographique de Rouen, Douls ressent l'appel du désert. Il apprend la langue arabe et le Coran, fait chavirer son bateau et se déguise en marchand turc.
Sous la plume des transfuges, le Maroc n'est pas toujours sous des jours enchantés
Les Reguibat le capturent et l'offrent comme esclave à la dame la plus âgée de leur tribu. Ils se mettent à le consulter à propos de leurs affaires et décident de lui trouver femme. Pour se tirer de ce mauvais pas, il prend prétexte d'une dot à réunir en Turquie. C'est ainsi qu'il s'enfuit en France, où il publie son reportage sous le titre Voyage au Sahara. Mais, inguérissable, Camille Douls reprend le chemin du désert. A peine arrivé, il meurt de typhoïde. Beaucoup de ces arpenteurs du désert en sont restés à jamais captifs : Isabelle Eberhard (Ecrits sur le sable, Pages d'Islam, Trimaraleur, Mes journées), emportée par la crue d'un oued ; Michel Vieuchange (Smara), mort d'une dysenterie aiguë, par exemple. rares sont les écrivains voyageurs qui se sont soumis à l'épreuve du désert et s'en sont sortis indemnes, tels Antoine de Saint Exupéry (Le Petit Prince, Terre des hommes, Citadelle), Joseph Kessel (Vent de sable), Paul Bowles (Thé au Sahara), le Clézio (Désert)…
Mais il n'y a pas que le désert qui a attiré les écrivains au Maroc. Pierre Loti (1850-1923), par exemple, qui y est venu en diplomate, tentait de vérifier si ce pays était en accord avec son rêve oriental, poussant son zèle curieux jusqu'à meubler sa demeure à la manière marocaine, porter une djellaba et brandir un grand sabre de pacha dans son fourreau Avec Charmeurs de serpents, Le livre de la pitié de la mort et au Maroc, littérairement aboutis, renvoie de son pays hôte une image si caricaturale que Lyautey lui fit passer un savon. Il s'en plaignit à sa nièce : «Et encore, dans ces pures descriptions auxquelles j'ai voulu me borner, suis-je très suspect de partialité pour ce pays d'Islam, moi qui, par je ne sais quel phénomène lointain ou de préexistence, me suis toujours senti l'âme à moitié arabe». A André Chevrillon on doit Un crépuscule d'Islam, Marrakech dans les palmes, Visions du Maroc, Edith Warton assure l'apologie de l'œuvre de Lyautey dans Voyages au Maroc, le Japonais Sanshiro Ishikawa compose un attrayant Le Maroc, un pays en plein essor, Claude Farrère n'a d'yeux que pour un Maroc lumineux et ressuscité, comme il ressort de ses Hommes nouveaux, Roland Dorgelès contient dans Le dernier moussem des reportages vécus et sans complaisance, Colette découvre le Maroc et s'en enchante, d'où ses Notes marocaines qui le croquent délicieusement…
Fès et Marrakech en tête du peloton, Tanger sur leurs roues, Casablanca à la traîne
Les écrivains qui se sont installés au Maroc pour un bref ou long séjour ont été inspirés par Fès (Jérôme et Jean Tharaud, Anaïs Nin, François Bonjean, André Gide, Henri Bosco…), Marrakech (Anaïs Nin, Denise Masson, Peter Mayne, Claude Ollier, Artur Kœstler, Elias Canetti, Juan Goytisolo…), Rabat (Henri Bosco), Meknès (Michel Jobert), Agadir (François Auzérias)… Pendant ce temps, Casablanca était à la recherche de son âme, et n'intéressait pas grand monde. En revanche, Tanger, malgré ou à cause de sa réputation de ville de mauvaise vie, alléchait les écrivains.
Jean Genet, contrairement à un lieu commun répandu, n'a jamais été sensible aux charmes du Maroc
Lundi 23 novembre 1846, la frégate Le Véloce mouilla au port de Tanger. A son bord, Alexandre Dumas, le père de Monte-Cristo et mille autres récits d'aventures. Il trouva la ville à la mesure de son féroce appétit. Il y fit bombance, pêche dans l'oued, chassa le marcassin, et surtout apaisa sa soif d'exotisme, en flânant dans la casbah. Il retint essentiellement une noce juive, «le plus fantasque spectacle que j'aie jamais vu de ma vie». Tellement étrange, à ses yeux, qu'il le décrit par le menu dans Le Véloce, de Cadix à Tunis. Mark Twain, débarque à Tanger, en 1867 et fut lui aussi transporté de joie, au point de s'exclamer dans Le voyage des innocents : «Tanger est une ville étrangère s'il en fut jamais, et on ne peut trouver son âme véritable dans aucun autre livre que les Mille et Une Nuits». Le récit se vendit comme des petits pains sur la place de New York. Comme celui de Walter Harris, Le Maroc disparu, où il narre ses multiples rapts par le caïd Raissouli. A sa mort, Tanger porta son deuil. Le nombre d'écrivains dont le fantôme hante encore les murs de la cité du détroit est proprement innombrable, signalons toutefois les plus importants : Emile Keene (My life Story), Paul Monrand (Bains de mer, bains de rêve, Hécate et ses chiens), Thierry de Beaué (La chute de Tanger) à, Paul Bowles (Un thé au Sahara, Après toi le déluge, Mémoires d'un nomade, La maison de l'araignée, Leurs mains sont bleues, Journal tangérois : 1987-1989), Brion Gysin (Légendes de Brion Gysin), Truman Capote (Les chiens aboient), William Burroughs (Lettres de Tanger à Allen Ginsberg), Tennesse Williams (La chatte sur un toit brûlant), Jack Kerouac (Les anges vagabonds)… Et Jean Genet ? Protesteriez-vous. Il est vrai qu'il a effectué un séjour en 1969, à Tanger, mais c'était pour tromper le désespoir qui l'envahissait à la suite du suicide de son amant Abdallah. Lorsqu'il revint, en 1974, c'était pour les beaux yeux de Mohamed Al Qatrini. Donc, jamais pour y chercher l'inspiration. D'ailleurs, avec le pays, il entretenait des rapports distants. Par une facétie du destin, il se retrouve enseveli dans le cimetière chrétien de Larache. Le Maroc n'a pas pu capturer ce mythe vivant, il en hérite à jamais depuis sa mort.


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