Houcine BERBOU, Consultant senior au cabinet LMS ORH La Vie éco : L'année 2009 a été morose au niveau des rémunérations, comment analysez-vous la situation ? Houcine Berbou : Il faut revenir à quelques années avant 2009 pour éclaircir certaines données. Comme nous le savons, les investissements consentis durant la période 2006/2008 ont été lourds. Compte tenu de la rareté des profils adéquats, les entreprises se disputaient les mêmes candidats sur le marché et la seule manière de les attirer et de les fidéliser était la surenchère. Bien évidemment, la crise financière de 2009 a bousculé toutes ces pratiques et a poussé les entreprises à réviser leurs budgets définis en début d'année. Les principales mesures ont été le gel des embauches et des salaires ou, dans les meilleurs des cas, une baisse des augmentations de salaires. La crise a aussi permis à certaines d'entre elles d'enclencher une réflexion sur l'équilibre de la masse salariale. Qu'ont-elles fait de concret ? Selon la gravité de la situation, certaines entreprises ont pu différer, réduire ou carrément annuler les augmentations et/ou bonus des dirigeants pour donner l'exemple. D'autres ont reporté les primes en 2010 pour soulager leur trésorerie. Malheureusement, il y en a qui ont carrément décidé de les supprimer. Une dure réalité qui a rappelé que ces avantages indexés sur la performance ne constituent pas toujours des acquis. Bien évidemment, de telles décisions ont été mal acceptées. Les entreprises qui s'en sont mieux tirées sont celles qui ont bien su communiquer et expliquer de manière pragmatique les enjeux. Par ailleurs, il est peut-être intéressant de souligner que les hauts potentiels et les profils pointus n'ont pas été affectés par la crise puisque leur salaire à l'embauche ont augmenté de 15 à 30%. Quels sont justement ces profils ? Il s'agit principalement des profils opérant dans les domaines des high-tech, de l'industrie et autres. Les commerciaux ont continué à percevoir des salaires importants. Ceci grâce à l'importance de la part variable dans la structure de la rémunération. D'ailleurs, beaucoup d'entreprises ont adopté cette politique même en période difficile pour motiver davantage leurs équipes. Les entreprises qui ont mis en place des systèmes de rémunération variable de l'ordre de 20 à 40% du salaire de base s'en sortent beaucoup mieux en temps de crise, car la partie variable sert de «coussin d'amortissement» qui peut leur éviter d'arriver à la phase de réduction des effectifs. Toujours à propos des profils, les ingénieurs continuent d'avoir des salaires importants notamment dans les grandes structures. Les salaires à l'embauche peuvent atteindre les 16 000 DH selon l'expérience. Vers quoi s'achemine-t-on en 2010 ? Il n'y aura pas de grands chamboulements. Les prémices de reprise sont là. Il faut s'attendre à des taux d'augmentation classiques de l'ordre de 4 à 5%. Pour autant, les entreprises ne vont pas s'engager sur ces taux. Elles vont le faire graduellement en fonction de l'évolution des affaires. A l'embauche, les salaires vont atteindre des niveaux raisonnables tout comme en 2009. Il faut noter que le taux d'insertion des jeunes lauréats se situe actuellement autour de 75% alors qu'il était de 85 à 90% auparavant. Les salaires des lauréats d'écoles de commerce locales varient entre 6 500 et 9 000 DH nets (sans expérience) alors que les salaires des lauréats d'écoles d'ingénieurs varient de 10 000 à 12 000 DH nets. En revanche, les salaires des lauréats des grandes écoles étrangères restent nettement supérieurs.