Les députés de la majorité étaient contre. Le gouvernement a décidé, mercredi 11 novembre, de retirer la hausse de la TVA sur les produits pétroliers. Initié par l'USFP, un amendement sur l'augmentation de la TIC sur les boissons gazeuses pourrait être accepté. C'était prévisible : certaines dispositions fiscales du projet de Loi de finances 2010 paraissaient dès le départ vouées à être contestées, à tort ou à raison, par les députés. Et pour cause, les augmentations de taux sont jugées ou bien insupportables pour les consommateurs (cas de la TVA sur les produits pétroliers) ou, au contraire, insuffisantes aux yeux de certains pour en réduire la consommation (cas de la TIC sur les boissons alcoolisées). Au moment où nous rédigions ces lignes, en effet, les groupes parlementaires de la Chambre des représentants examinaient un certain nombre d'amendements à présenter le lendemain, mercredi 11 novembre, à la commission des finances et du développement économique. Etendre le dispositif sur les fusions aux regroupements dans le cadre de holding Mais les députés, ceux de la majorité notamment, avaient encore du mal, mardi dans la soirée, à trancher sur certains amendements. C'est le cas par exemple de la baisse des droits de douane sur l'importation des veaux. Dans le projet de Loi de finances, le gouvernement propose d'en ramener le taux au strict minimum : 2,5%. Des députés, notamment du Parti de l'Istiqlal, mais pas seulement, mettent en avant, pour rejeter cette disposition, le fait que la baisse des droits de douane de cette importance, si elle était votée, provoquerait tout simplement la mort des petits éleveurs qui vivent justement de cet élevage. D'autres, au contraire, estiment que l'offre de veaux est insuffisante et, par conséquent, l'encouragement de l'importation viendrait apporter une détente sur les prix de la viande rouge. Mardi soir 10 novembre, ils en étaient encore à ce dilemme. Il faut souligner ici que, comme le rappelle un député de la majorité, «l'enjeu sur cette question est énorme» et cela apparaît nettement au travers de l'intense lobbying mené par certains agriculteurs et certains importateurs auprès des députés. En revanche, s'agissant de la hausse de la TVA sur les produits pétroliers de 7 à 10% comme le proposait le gouvernement, les députés de la majorité étaient décidés à l'amender, considérant que cela conduirait à un surcroît de charges sur le consommateur. Mais mercredi 11 novembre, à l'heure où nous mettions sous presse, le gouvernement a décidé de retirer la mesure du projet de loi. «Il ne s'agit pas d'un amendement mais d'une décision du ministère des finances de surseoir à cette augmentation», tient à préciser un membre du gouvernement. Il faut dire que la proposition a suscité un vif débat. Il est significatif à cet égard que c'est l'Istiqlal, parti pivot de la majorité gouvernementale, qui, le premier, a ouvert le feu, pour ainsi dire, en s'interrogeant sur l'opportunité d'une telle proposition, sitôt le projet de budget déposé au Parlement par le ministre des finances. Cela dit, le retrait de cette mesure pose un problème d'ordre financier : le gouvernement devra trouver ailleurs les 1,3 milliard de DH que l'augmentation allait lui rapporter. L'autre amendement en discussion, initié par l'USFP puis avalisé par les députés de la majorité, portait sur les boissons gazeuses : les députés voulaient augmenter la taxe intérieure de consommation (TIC) sur ce produit, en mettant en avant deux arguments, essentiellement. D'une part, cette hausse permettrait de récupérer la subvention sur le sucre accordée aux limonadiers, une récupération jugée d'autant plus légitime, selon un député qui assistait aux débats de la commission des finances, que «la subvention ne s'est pas traduite par une baisse des prix». D'autre part, une hausse de la TIC, donc du prix, devrait provoquer une diminution de la consommation de ce produit, ce qui est tout bénéfice pour la santé des citoyens. «Dans notre esprit, l'augmentation de la TIC sur les boissons gazeuses ne devrait pas générer une hausse du prix de vente, car les industriels ont déjà empoché la subvention. Si l'amendement passe, logiquement les prix devraient rester stables», confie un député. Selon certaines sources, cet amendement, accepté par l'ensemble des députés de la majorité, a toutes les chances de passer. La question qui reste encore en suspens est celle de savoir quel sera le niveau de hausse de la TIC qui sera retenu. Une autre mesure qui ne semblait pas être du goût des députés de la majorité, la hausse de 15 à 20% de l'impôt sur le revenu sur les plus-values d'actions de sociétés non cotées. Les parlementaires proposent de maintenir le taux d'imposition à 15 %. De la même manière, et s'agissant du passage du statut de personnes physiques à celui de sociétés, et dans le but justement d'encourager cette mutation plus en phase avec une économie développée et transparente, il est proposé que ce changement se fasse dans la neutralité fiscale ; autrement dit, pas de paiement d'impôt sur les plus-values. Le PJD juge insuffisante la hausse de la TIC sur les boissons alcoolisées Enfin, le dispositif prévu dans le projet de Loi de finances concernant les fusions (exonération de la prime de fusion), les députés de la majorité souhaitent l'étendre également aux regroupements dans le cadre de holding. Ce sont là, grosso modo, les projets d'amendements les plus significatifs émanant de la majorité. Toutefois, comme le veut une règle non écrite, ces amendements, avant d'être déposés à la commission des finances, devaient au préalable être acceptés par le gouvernement. C'est une façon d'éviter à l'Exécutif les mauvaises surprises pouvant venir de sa propre majorité. Et justement, alors que tout devait être achevé mardi 10 novembre dans la soirée, afin que les amendements atterrissent le lendemain à la commission des finances, on apprend mercredi matin que majorité et gouvernement étaient encore en désaccord sur certains points. «Dans le meilleur des cas, c'est seulement en fin de journée que les amendements vont être déposés», confie un député de la majorité. Quid de l'opposition ? L'an dernier, rappelons-le, le PJD avait présenté, à lui seul, 107 amendements. Cette année, on n'en sait pas trop pour le moment, mais selon certaines sources cette formation politique est mécontente de la mesure concernant la hausse de la TIC sur les boissons alcoolisées qu'elle juge insuffisante. Un amendement dans ce sens est donc attendu. D'autres partis de l'opposition s'intéressent à la fiscalité sur la construction de cités universitaires qu'ils voudraient plus incitatives, alors que le projet de Budget 2010 a supprimé les avantages existants dans ce domaine. Certains souhaitent aussi une fiscalité plus attractive pour les résidences touristiques, comme le parti du Rassemblement national des indépendants (RNI). Une fois de plus, le ministre des finances, lors du vote du projet de Budget, sera sans doute amené à faire usage de l'article 51 de la Constitution, En 2007, il en a eu recours plus de 50 fois pour la Loi de finances 2008, et 33 fois pour celle de 2009.