Si ! Non ? Si, si, vraiment, Fatima Tihihit, jeune star incontestée de la chanson amazigh et Simon Says, vedette autoproclamée de la world music mâtinée de darija, ont un point commun, celui du parler franc qui tranche avec l'insupportable langue de bois qui enrobe généralement les sorties médiatiques de certains artistes. La première était, samedi dernier, le sujet du stupéfiant et kitchissime magazine «Canal Amazigh» sur 2M (redif' satellitaire), visuellement antédiluvien mais qui a tout de même le mérite politique d'exister. Le second a fait le bonheur de l'émission radio «Ze Kotbi show» avec son déjanté maître de cérémonie Imad Kotbi et son acolyte Staïka, mais qui, pour le reste, gagnerait qualitativement à être mieux entouré. Les deux se sont épanchés jusqu'à s'étaler par moments, avec une candeur touchante pour Tihihit et un aplomb assuré pour Says, un bonheur pour ceux qui ont pris la peine de passer un petit moment en leur compagnie. Dans un décor flashy, la chanteuse s'est mise à nu. Pas littéralement il va de soi, mais sans retenue non plus. En peu de mots soigneusement pesés, elle a raconté son début de vie cauchemardesque, son mariage imposé puis capoté, la violence conjugale, son refus de remettre le couvert avec un conjoint forcément et férocement plus âgé, ses débuts comme petite bonne puis comme chanteuse dans sa langue natale, la main tendue par un raïss qui avait décelé un potentiel sommeillant ou bien seulement acteur d'un geste charitable, son explosion artistique et, enfin, tout un parcours hors norme seulement écorché par un sous-titrage en français complètement à côté de ses pompes. Si peu de choses en fait. L'extraordinaire ne réside pas seulement dans sa voie chaotique certainement similaire à tant d'autres (quoique !), mais bien dans sa confession à des milliers de téléspectateurs que beaucoup plus couillus n'oseraient jamais entreprendre. Et rien que pour cela (pour son art également, bien que l'on n'y touche pas grand-chose), eh bien, respect, Madame ! Quant à Simon Says, l'impayable Simon, dont on aimerait d'ailleurs connaître le nom d'ici, il a été impérial, un peu comme quand il fut reçu il a quelques mois dans l'émission pour djeun's de 2M «Ajial». Avec une morgue qui n'appartient qu'à lui, il a stigmatisé ce système qui ne reconnaît pas son talent quand le monde artistique étranger est à ses petons (il aurait même reçu un Oscar, c'est dire…), pointé du doigt les carences de l'industrie musicale au Maroc, et affiché ostensiblement son soutien à toute cette génération montante qui doit lui en être reconnaissante pour les 25 prochaines années au moins. Sans oublier l'indispensable laïus sur l'hypra nationalisme de bon aloi si furieusement à la mode en ce moment – mais qui sonne résolument mieux dans les textes dopés du rappeur Bigg -, qui fait que c'est toujours un plaisir véritable de tailler un petit bout de gras avec ce vieux Simon, capable, en direct, d'appeler un chatte une chatte. Et de faire réellement bouger des choses qui tanguent mieux que sous le refrain du «tout est beau». On devrait les inviter plus souvent, ces deux là…