En cinq jours, 1 000 candidats se sont inscrits au concours du meilleur projet d'entreprise, initié par 2M. La sélection durera du 18 au 25 avril. Les 20 candidats retenus seront soumis à des tests psychologiques et techniques. La finale qui aura lieu le 15 mai opposera cinq candidats. En cette matinée du 18 avril, le hall du très austère centre de conférences Agora, sis au quartier Californie à Casablanca, connaît une effervescence inhabituelle. La raison en est le déferlement sur le lieu de dizaines de jeunes «porteurs de projets» qui, munis de leur convocation et de leur carte d'identité, sont venus se soumettre à l'épreuve de présélection dans le cadre de l'opération «Challengers» lancée par la chaîne 2M. Ils sont un millier à s'être inscrits dans les huit bureaux de 2M (Casablanca, Rabat, Tanger, Marrakech, Fès, Agadir, Oujda et Laâyoune). Au terme d'un casting sévère, ils ne seront plus que vingt à être retenus. Autrement dit, beaucoup de candidats, peu d'élus. Mais, apparemment, l'éventualité malencontreuse de passer à la trappe n'effleure pas l'esprit des postulants. Tous sont intimement convaincus de l'intérêt, du sérieux et de l'originalité de leur projet. Chacun estime avoir de la personnalité et posséder une grande force de persuasion. Au fondement, la volonté de séduire le téléspectateur Autant de critères qui, en plus de l'apport financier personnel, seront pris en compte par un jury composé de représentants de 2M, de la société de production Médiation, du Centre régional d'investissement (CRI) et du cabinet LMS, auxquels se joint un chef d'entreprise local. Ce qui ne saurait intimider Hakim, 23 ans, prêt à défendre bec et ongles son projet de laverie automatique, ni faire reculer Aïcha, venue de Laâounate (Province d'El Jadida), avec ses figues de Barbarie vouées à être mises en confiture. Depuis deux ans, 2M multiplie les initiatives : «15 ans 15 talents», «Studio 2M», «Psalmodie du Saint Coran», et aujourd'hui «Challengers». Encore un coup médiatique mijoté par la chaîne, afin de faire de l'audience et d'engranger de juteuses recettes publicitaires, ne manquera-t-on pas de subodorer. Mostafa Benali, directeur général de la chaîne, en convient partiellement. En ces temps où la concurrence entre les chaînes devient âpre, aucune ne pourrait tirer son épingle du jeu sans développer une stratégie de séduction. «15 ans 15 talents», «Studio 2M», «Psalmodie du Saint Coran» participaient de cette volonté de happer le téléspectateur. Elles l'ont fait avec un certain bonheur. D'après une étude menée auprès d'un échantillon de 620 personnes, 96% ont regardé au moins un des trois primes et de «15 ans 15 talents» et 60% ont vu les les trois émissions. «Studio 2M» ne fut pas en reste : sur 462 personnes interrogées, 98% ont vu au moins une émission, 51% les ont suivies toutes, 89% ont regardé la finale. Et si l'on ne dispose pas d'un bilan chiffré de «Psalmodie du Saint Coran», on peut avancer, sans risque d'être démenti, que cette émission a rallié tous les suffrages du public. Mais ce serait dénaturer gravement l'esprit qui préside à ces opérations que de le ramener au seul souci de courtiser le téléspectateur, se défend Mostafa Benali. Si tel était le cas, ajoute-t-il, les jeunes mis en lumière auraient été abandonnés à leur sort, une fois qu'ils auront «servi». Or, conformément à son engagement, 2M a accompagné les finalistes. Aujourd'hui les 15 talents sortis de l'ombre ne se tournent pas les pouces : Hicham Nazal officie à France 3, Sara Mellouki et Fatine Youssoufi animent une émission pour jeunes sur 2M, sur la même chaîne Mariam Saïd présente un module sanitaire, Hicham Laâboudi le magazine «Diwan», et Mustapha Atrassi, après avoir fait ses preuves dans la sitcom «Rbib», se trouve souvent sollicité pour les émissions humoristiques… Quant aux lauréats de «Studio 2M», ils se sont vu gratifier d'un clip et d'un single. Ce faisant, 2M honore sa mission de chaîne publique qui, tout en veillant à s'attirer de l'audience, met en évidence les compétences. 2M, passerelle entre talents et mécènes Tout cela procède d'une intention louable, certes, mais en s'y attelant, en endossant le rôle d'arbitre dans une compétition économique, 2M ne marcherait-elle pas sur les brisées d'instances plus habilitées ? Mostafa Benali met les choses au point: «Nous n'avons jamais été tentés de nous substituer aux instances compétentes. Notre œuvre est purement médiatrice. Elle consiste à aller «dénicher» les talents, et à les montrer à des millions de Marocains, afin de leur prouver que notre pays regorge de jeunes doués impatients de dévoiler leur savoir-faire» Le directeur général de la chaîne ajoute que si on ne les prenait pas par la main, si on ne leur donnait pas l'occasion de s'exprimer, si on ne les accompagnait pas comme il se doit, ils resteraient dans l'ombre. Et ce serait une perte pénalisante pour notre pays. «Voilà le rôle que nous nous sommes imparti. Celui de médiateurs entre des jeunes pétris de talents et d'éventuels mécènes. Et notre chaîne est une simple passerelle». C'est ce rôle de passerelle que 2M entend assumer, encore une fois et le succès aidant, en jouant une partition d'une tout autre mesure, celle de la création d'entreprises. Donner à cette quatrième opération un nom de baptême n'a pas été une mince affaire. Les suggestions pullulaient, le choix était embarassant. En fin de compte, «Challengers» recueillit l'adhésion. Il a le tort d'être un anglicisme, mais l'avantage d'évoquer éloquemment les «vertus» dont doit se parer tout entrepreneur : l'esprit de compétition, la faculté de se transcender et l'aptitude à relever le défi. Après le baptême, vint la phase de persuasion de partenaires, sans le concours desquels les projets qui s'illustreraient, lors de la finale du 14 mai, s'en iraient à vau-l'eau. Le réseau Maroc Entrependre, le Centre des jeunes dirigeants, les Centres régionaux d'investissements, Attijariwafabank, l'ONA, l'OCP, Akwa…, répondirent à l'appel. Au programme des cinq finalistes : coaching et training Fort de ces gages, «Challengers» pouvait prendre son vol, selon une trajectoire maintenant éprouvée. Etape inaugurale : prospection des entrepreneurs en herbe, sous forme de dépôt de candidature dans les bureaux régionaux de 2M. Entamée le 16 avril à Casablanca et à Rabat, elle sera close le 23 avril à Oujda et à Laâyoune. Ensuite, les choses sérieuses commencent. Première sélection des postulants, dans les huit régions retenues : Casablanca (18 et 19 avril), Rabat (18 avril), Tanger (21 avril), Fès (23 avril), Agadir (23 avril), Oujda (25 avril), Laâyoune (25 avril). «A l'issue de chacune de ces journées de sélection, le jury délibère pour proposer les noms des candidats qui participeront à la deuxième phase à Casablanca. Chaque région peut proposer de un à cinq candidats, une péréquation se faisant à l'issue de ces sélections pour ne retenir que vingt candidats en tenant compte de la nécessité d'une représentation reflétant une réelle diversité régionale ; d'une mixité visible ; et de la volonté de la chaîne d'accorder une place significative aux projets innovants, quelle que soit leur dimension». Passée cette épreuve, où il leur faut déployer surtout des trésors d'ingéniosité argumentatives, les vingt heureux élus ne seront pas au bout de leur peine. Invités par groupes de dix à Casablanca, les 28 et 29 avril, ils devront prouver leur bonne santé psychologique, la solidité de leur projet et leur aptitude au métier d'entrepreneur. Cinq seulement d'entre eux goûteront au charme d'une finale très serrée (le 14 mai). Auparavant, ils auront sué sang et eau, pendant quatre jours, à Casablanca, sous la houlette de Hassan Fekkak, ancien champion du karaté, et de Zineb Abdeljalil, DG de Deo Compétences, consultante et formatrice en management et coaching. Au programme, de menus plaisirs qui vont des exercices de détente et de relaxation aux jeux de rôle et expressions théâtrales, en passant par la mise en situation de management d'une entreprise et les épreuves sportives. Puis viendra le grand jour, celui où les cinq finalistes, sûrement recrus après ce marathon forcené, se présenteront devant un jury sourcilleux pour plaider leur dossier. Un seul candidat aura le pompon. Son projet sera soutenu de bout en bout par 2M. Laquelle encouragera, selon différentes formules, les quatre autres finalistes. Mais aucun des quinze autres sélectionnés ne sera privé de sa part du gâteau. Les entreprises partenaires et d'autres acteurs économiques veilleront à ce que leur savoir-faire soit récompensé. Ils ne seront pas décarcassés pour des prunes. Foi de 2M .