« Innover ou disparaître », tel est le credo de la compétitivité économique mondiale où la différenciation des acteurs de production des biens et des services devient une affaire de forte valeur ajoutée et d'avantages comparatifs. Si le Maroc met en place les structures, les programmes et les fonds, quoique encore insuffisants, le pays demeure encore à statut intermédiaire, une «puissance régionale moyenne » où les déficits sociaux épais entravent toujours une économie agressive, mais à ressources limitées. La R&D et l'innovation restent au stade des balbutiements tant que les chercheurs et producteurs de richesses ne sont pas associés dans des technopoles ou des espaces de « sciences industrielles » confinant les recherches au stade théorique sans que les organisations productives ne suivent. Le management « vert », à l'orientale, n'en finit pas d'envelopper toute action, aussi ponctuelle ou localisée soit-elle, des atours conceptuels récurrents et de stratégies en profusion tous azimuts faisant, à chaque fois, perdre le fil des échéanciers à tenir dans la réalisation. Ainsi, pour l'anecdote, dans un plan d'ouvrage, une simple cafétéria dans un grand centre économique est, aussitôt, qualifiée de «stratégique» !!! Excusez du peu, mais chaque discours sectoriel, chaque sortie ponctuelle, chaque convention de partenariat sont, du coup, « stratégiques», ferments de développement durable, gisements d'innovations et d'autres encore. Nous pouvons dire que nos acteurs prennent souvent leurs vessies pour des lanternes en gonflant déraisonnablement leurs initiatives. Inondant d'enthousiasme les esprits des citoyens avant même la finalisation ou le démarrage des projets. En face, le management « bleu », pur et dur à l'occidentale, est résolument pragmatique. A l'instar des Américains qui ne s'embarrassent jamais de discours superflus quand ils sont persuadés que «toute stratégie n'est que de…l'exécution» ! Mieux encore, nos champions de la R&D planétaire osent même réduire ce que d'autres enflamment à tour de bras : « le génie, c'est 1% de créativité et …99% de transpiration ». Des exemples concrets de ce pragmatisme « bleu », pullulent. Microsoft, le leader mondial de l'innovation des logiciels et des nouvelles technologies de l'information, mobilise à temps plein des milliers d'ingénieurs de tous continents et de toutes nationalités, «un fédérateur des neurones » du globe, isolés dans des sites tranquilles, disposant des moyens de leurs recherches. Pour imaginer les atouts compétitifs du futur, les Japonais ont confié à un millier d'ingénieurs, totalement détachés du quotidien et de la routine, la conception des transports révolutionnaires de demain. En Europe, les scientifiques et cadres techniciens se rebiffent en lorgnant l'horizon 2015 pour rattraper leur grand retard sur les Etats-Unis et le Japon en matière de nanotechnologies qui vont bouleverser complètement la donne dans maintes branches d'activités vitales pour la société, l'homme et les économies en développement. Les étrangers innovent plus au Maroc Pour citer le cas du Maroc, la production «cérébrale» piétine au fil des années en dépit des incitations à la R&D et les stimulations répétées par les animateurs de l'OMPIC. Les statistiques de ce dernier montrent, sur un lustre, une quasi-stagnation des dépôts de brevets, sachant que la plupart sont à l'actif soit de particuliers soit de filiales de multinationales implantées au Maroc, celles-ci étant déjà bien rodées à la «musique» des inventions. Sur les 660 dépôts de brevets en 2005, 140 seulement portent les couleurs de notre pays. Les budgets de R&D ont mobilisé 0,8% du PIB, cette même année, pour une intensité de la recherche toujours inférieure à l'unité (0,8%). C'est un véritable défi qui est lancé à nos chercheurs et opérateurs plutôt « frileux » en termes d'engagements dans des politiques conséquentes de recherche fondamentale et appliquée par le capital international établi dans nos murs se montrant plus inventif et animé par de meilleures dispositions à l'innovation. Pourtant, les structures et les réseaux ne manquent pas dans le Royaume, mais comment mesurer leur efficacité ? Et ce, même si le Maroc est gratifié du troisième Africain, derrière l'Afrique du Sud et l'Egypte, comptant plus de 17 000 enseignants chercheurs de toutes les disciplines, universitaires et établissements publics de recherche confondus.