L'annonce de la fin des investigations par le juge Juan Del Olmo chargé du dossier des attentats du 11 mars 2004 a occasionné un tollé politique. Le parti populaire en opposition charge les Socialistes sur le fond d'un dossier « à lacunes ». La Gazette du Maroc avait anticipé sur ce pavé dans la mare en publiant à la Une de son numéro 468, sous le titre «Les erreurs espagnoles», les grandes énigmes d'un dossier pour le moins bâclé Finalement, le 11 mars aura été la tache noire de la vie politique espagnole depuis deux ans. Non seulement il a sonné le glas du gouvernement Aznar, mais il risque aujourd'hui de précipiter celui de Zapatero dans un scandale politique sans précédent. Pour mieux cerner les paradoxes des enquêtes liées aux attentats de Madrid, aux différentes investigations et aux conclusions tirées, il faut revenir un peu en arrière. D'abord un premier point : la commission du 11 mars devant le Congrès espagnol. Une commission d'enquête qui devait jeter la lumière sur les tenants et les aboutissants du 11 mars madrilène. On s'en souvient, ladite commission a été un fiasco. Témoignages contradictoires, scandales et bagarres, de faux témoins, des noms erronés et surtout des conclusions hâtives pour boucler un dossier désormais connu aussi sous le nom de « l'énigme ». La faillite de la commission après un an d'investigations préfigurait la suite des évènements et laissait présager un rapport d'enquête tout aussi bancal. Ce qui n'a pas raté, puisque le rapport du juge Juan Del Olmo déposé, il y a trois semaines, s'avère, selon tous les analystes antiterroristes en Espagne, un rapport bâclé et sans fondements. La hargne du PP « l'enquête reste ouverte pour nous et le juge Del Olmo a la responsabilité de ce qui ne va pas dans ce dossier. Pour nous, il est sûr que de fausses informations ont été apportées pour remplir ce rapport, car jusqu'à aujourd'hui, nous avons une enquête qui se base sur des faits mystérieux ». C'est en substance ce que les porte-parole du parti populaire espagnol avancent devant le Congrès espagnol. Les populistes semblent convaincus de ce qu'ils avancent et demandent aux socialistes de répondre à plus de 200 questions qui restent dans l'ombre. Ils prennent comme cheval de bataille pour démontrer l'inanité du travail de Del Olmo trois faits marquants qui s'ajoutent aux Jamal Zougam et son témoin « bizarre », Basel Ghalyoun et ses liens, Rabei Osman Essayed et ses déclarations (voir archives LGM). Il s'agit, entre autres, du témoin protégé du juge Del Olmo dont La Gazette a eu le nom. Il est question d'un dénommé Javier Lavandera et du témoignage d'un gardien de la station de train de Alcalà qui a dit « avoir vu les personnes avec les sacs d'explosifs parler en espagnol avec un autre gardien qui répond au nom de Luis Garrudo ». Pour le PP, le sous-entendu est clair : et si les assaillants n'étaient pas des Arabes (encore moins des Marocains) mais des Espagnols? Parce que ledit gardien a précisé que ce n'étaient pas des étrangers, mais bel et bien des gens du pays. Zougam, Ghalyoun et les autres Marocains du procès du 11 mars sont tellement typés qu'il n'y a pas de doute sur leurs origines. Alors ? La question reste posée et le PP demande des réponses dans les plus brefs délais. Ce qui met la justice au pied du mur dans ce sens que « 90% des preuves restent à être vérifiées ». Ce qui demeure certain dans ce dossier, c'est que les enjeux politiques prennent le dessus sur la question judiciaire. Et le sort des accusés marocains reste tributaire du bras de fer entre PSOE et PP, avec pour toile de fond, les prochaines législatives. Ce qui pousse certains analystes politiques en Espagne à affirmer que « le 11 mars aura tué le PP et pourra faire sauter le PSOE ».