Cet ancien secrétaire d'Etat aux Affaires sahariennes durant les années 80 revient pour chapoter l'organe qui sera en mesure de pondre le projet d'autonomie élargie du Sahara. Sous sa casquette de président du Corcas, il se projette sur l'avenir politique et économique de la région. Comment imaginez-vous le développement économique des provinces du Sud sous une autonomie élargie ? Khalli Henna Ould Errachid : Vous savez que le Sahara est un territoire riche de par les ressources naturelles qu'il possède ainsi que sa situation géographique stratégique. Sous un régime d'autonomie, il aura toutes les possibilités de s'épanouir et de se développer davantage en s'appuyant sur ses propres ressources. Je suis persuadé que le Sahara autonome dégagera des bénéfices importants qui reviendront à la région, à l'Etat et à tous les citoyens marocains. Est-ce que vous pensez à un modèle économique dont on peut s'inspirer ? Le modèle économique, c'est un modèle d'économie de marché qui prévaut au pays. Le Sahara n'aura pas un modèle économique différent du reste du royaume et ce, à l'instar de ce qui se passe en Espagne, en Italie ou en Allemagne. La politique économique générale sera toujours déterminée par le pouvoir central. L'autonomie n'est en fait qu'une gestion localisée et régionalisée assurée par les habitants de la région de leurs propres affaires. Grosso modo, l'économie sera celle qui prévaut dans le pays à savoir une économie de marché dans ses aspects, public pour tout ce qui a trait à l'infrastructure et volets sociaux, et dans le secteur privé à savoir l'initiative dans les secteurs de la pêche, tourisme, agro-industrie, commerce… L'économie sahraouie est entre les mains d'une poignée de familles. Est-ce que l'autonomie ne risque pas de chambouler cette donne ? Partout, l'accumulation du capital appelle le capital. Ce n'est pas un cas particulier au Sahara. Je dirais que c'est même un phénomène mondial. Au Sahara, c'est plus visible parce que ce sont des régions moins développées où le capital est concentré entre les mains de quelques familles. Mais la politique de l'autonomie a comme principal objectif de réduire les disparités sociales et amener un développement de tous les secteurs. Est-ce que l'autonomie des territoires sahariens signifie la fin de l'assistance économique de l'Etat ? Dans le cadre d'une économie de marché, l'Etat a des responsabilités qu'il doit continuer à assumer en faveur des plus démunis. Donc, cette politique d'assistance sociale doit continuer durant les premières années suivant l'autonomie, soit par une péréquation économique soit par une dotation spéciale. Par la suite, lorsque l'autonomie développera les secteurs qui vont créer les ressources nécessaires, l'Etat pourra arrêter d'assister et de subventionner. C'était le cas dans toutes les autonomies de par le monde. En Espagne, quand l'autonomie de l'Andalousie, celle des Iles Canaries et de la Catalogne ont été mis en place en 1978, l'Etat a mis la main à la poche pour les aider. Actuellement, ce sont des pourvoyeurs de richesses au niveau national et des modèles de développement économique à l'échelle mondiale. Qu'en est-il des avantages fiscaux qui devront normalement disparaître ? L' idée répandue concernant les subventions accordées aux provinces du Sud est biaisée. Les avantages fiscaux ne sont pas globaux. Il faut savoir que tous les fonctionnaires qui travaillent dans les provinces du Sud payent l'IGR. La TVA est devenue payante pour les importateurs. Il reste l'impôt sur les sociétés, la patente, la taxe urbaine et la taxe d'édilité dont les citoyens sont exonérés. C'est une question à étudier dans le cadre du projet de l'autonomie. Aucune décision n'a encore été prise dans ce sens. (*) Conseil Royal Consultatif des Affaires Sahariennes.