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Un plan de mise à niveau pour libérer le potentiel de l'athlétisme national
Publié dans La Gazette du Maroc le 09 - 01 - 2006


Exclusif : Aziz Daouda à coeur ouvert
Alors que le contrat-programme signé le 7 juillet dernier entre Jettou et la Fédération Royale Marocaine de Football (FRMF) continue de susciter des tiraillements au sein des clubs d'élite, un autre contrat- programme sera conclu dans les jours à venir entre le gouvernement et la Fédération d'Athlétisme. Entretien avec Aziz Daouda, responsable fédéral, qui nous en livre les grandes lignes.
La Gazette du Maroc : Comment concevez-vous ce plan de mise à niveau de l'athlétisme national que le gouvernement Jettou s'apprête à conclure avec votre Fédération ?
Aziz Daouda : Permettez-moi tout d'abord de profiter de cette occasion pour remercier les présidents des ligues régionales d'athlétisme, qui, à l'unanimité, soutiennent inconditionnellement ce projet de mise à niveau de l'athlétisme national, car il est l'émanation et la meilleure conclusion du débat de fond qui anime les dirigeants et les cadres de l'athlétisme depuis de longues années.
Je retiendrai à ce titre le fait que c'est pour la première fois dans l'histoire de notre pays que le gouvernement marocain daigne nous écouter, concevoir avec nous un projet ambitieux et applicable ; ce qui nous permet désormais de mieux réfléchir et entrevoir l'avenir dans la quiétude et surtout avec beaucoup de confiance.
Qu'apporte ce contrat-programme à l'athlétisme national ?
Pour moi, il apporte quelque chose d'essentiel, à savoir une visibilité sur 5 ans, soit jusqu'à 2010. A ce jour, jamais, au grand jamais, nous n'avons pu projeter notre action au-delà de 9 à 12 mois au grand maximum. Au lieu d'être située dans la continuité, cette action a toujours été par à-coups et toujours en fonction des moyens dont dispose la FRMA.
Le deuxième apport de ce plan est qu'il nous apporte la reconnaissance solennelle par l'Etat des réalisations de notre athlétisme national que les pouvoirs considèrent comme l'un des principaux leviers du développement humain auquel aspire notre pays et qui constitue l'un des axes essentiels de la politique menée par le Souverain.
Cette reconnaissance est, en fait, un coup de fouet, un accélérateur qui va dynamiser l'encadrement et la pratique de l'athlétisme qui en avait bien besoin. A côté de cela, il apporte les moyens de travail. Il prévoit la construction de nouveaux centres de formation, de nouvelles pistes et des moyens financiers à mettre à la disposition des clubs et des athlètes.
En contrepartie de cet effort de l'Etat, il y a bien sûr l'engagement ferme et chiffré de la FRMA sur les résultats, la meilleure représentation possible dans les grands forums du sport mondial tels les Championnats du monde d'athlétisme et de cross-country, les jeux régionaux omnisports comme les Jeux Méditerranéens, Panarabes, Islamiques, Francophones, etc. et, bien sûr, aux Jeux Olympiques. Il y a, enfin, un engagement de la Fédération à dynamiser le côté marketing de l'athlétisme marocain qui est un produit vendable.
Quelles sont les grandes lignes de ce plan de mise à niveau ?
Je voudrais laisser la priorité à M. le Premier ministre qui vous fournira, le moment venu, tous les détails de cette opération. Mais je peux vous assurer qu'il s'agit essentiellement de centres de formation aux dimensions nationale et régionale et touchant l'ensemble du territoire, de pistes synthétiques pour permettre à l'ensemble des ligues régionales de disposer des moyens de travail pour la formation et l'entraînement des athlètes, conformément aux normes internationales.
Le reste, ce sont des mesures techniques et administratives qui visent à dynamiser et restructurer notre athlétisme dans l'esprit de proximité adopté par M. Driss Jettou dans de multiples secteurs de notre vie économique et sociale.
Pour conclure, je précise que ce projet n'a pas fait travailler la seule Fédération d'athlétisme, mais plusieurs départements étatiques dont je citerais notamment le secteur du Sport, la direction des collectivités locales, le ministère de l'Education nationale, le ministère des Finances et nombre de départements annexes.
Le Maroc vient d'organiser le Championnat du monde cadets d'athlétisme en 2005 à Marrakech avec la participation de 172 pays. Il reste candidat pour l'organisation du Championnat du monde seniors de 2011. Pensez-vous que ce plan de mise à niveau va renforcer les chances du Maroc d'abriter cette grande manifestation internationale ?
Certainement, puisque d'un côté, il va doter la Fédération de l'outil nécessaire et capital pour parfaire une éventuelle candidature et d'un autre côté, l'impact de la signature de ce contrat sera très fortement ressenti au niveau international. La Fédération internationale (IAAF) saura apprécier au moment opportun l'effort du gouvernement marocain pour la mise à niveau de son athlétisme, car si l'athlétisme marocain s'améliore, c'est tout l'athlétisme mondial qui s'en ressentera.
Cependant, lors de ce Championnat du monde cadets à Marrakech, les résultats du Maroc n'étaient pas à la hauteur des attentes. Cela est-il dû au fait que notre athlétisme n'a pas de stratégie spécifique pour les cadets ?
D'abord, une précision importante. Dans aucun pays au monde, les résultats des athlètes cadets ne sont tributaires de la fédération. Les résultats à ce niveau sont la conséquence, presque logique, du système d'éducation physique et de sport scolaire adopté par tel ou tel pays. En général, les clubs et par ricochet les fédérations, ne commencent à s'occuper des jeunes athlètes qu'à partir d'un certain âge. Or, en athlétisme, les jeunes n'adhérent aux clubs qu'à partir de 13/14 ans, soit exactement un an avant l'âge cadet. Nous ne pouvons produire un athlète de haut niveau en une année. Les pays qui ont été les mieux classés lors de ce Championnat du monde sont soit ceux qui ont un bon système de sport scolaire, soit des pays qui trichent sur l'âge de leurs athlètes. Malgré cela, le Maroc est tout de même à la 28ème place dans cette catégorie cadets et devant de grandes puissances internationales dont je citerais notamment la Suède, La Biélorussie, le Portugal, etc. Nous sommes également en tête de tous les pays du Maghreb. C'est plutôt notre système de sport scolaire qui demeure très limité en plus du manque d'infrastructures dans les régions. J'ai cependant la conviction que ce contrat-programme que nous allons signer avec le gouvernement va contribuer largement à hausser le niveau de nos cadets.
Les centres de formation que vous venez d'évoquer pourront-il améliorer la capacité d'accueil et de formation des jeunes athlètes  candidats à participer aux Jeux de Londres 2012 ?
A l'heure actuelle, notre capacité d'hébergement et d'encadrement des athlètes d'élite ne dépasse pas les 200 places. Elle n'était que de 100 places l'année dernière avant les travaux d'extension qui y ont été menés. Nous disposons de 170 athlètes. En 2010, lorsque nous aurons nos centres de formation achevés, notre capacité atteindra 500 places pour le centre national et quelque 600 athlètes encadrés au niveau des ligues régionales.
Et on peut dire, à juste titre, que nos objectifs iront au-delà des prochains Jeux Olympiques de Pékin en 2008 et qu'une projection sur cinq années nous permettra effectivement de se pré- parer dès maintenant aux Jeux Olympiques suivants prévus en 2012 à Londres.
Ce contrat-programme est–il de nature à mettre fin à l'exode de nos athlètes à l'image du champion du monde des 800 et 1.500 mètres, le Marocain Rachid Ramzi, naturalisé par le Bahreïn ?
A mon avis, il y a deux manières de juguler l'exode des athlètes. La première est d'ordre réglementaire. C'est la raison pour laquelle nous avons forcé la Fédération internationale (IAAF) à promulguer un règlement trop contraignant pour les athlètes désirant changer de nationalité. Nous ne pouvons qu'afficher notre satisfaction du fait que celle-ci a décidé d'appliquer une règle de trois années sans compétition avant que l'athlète ne puisse porter les couleurs d'un autre pays. Avant, cette période ne dépassait pas quelques mois. Des athlètes marocains ont changé de nationalité à la veille même des Jeux Olympiques d'Athènes et ont porté les couleurs d'un autre pays, le Maroc étant, avec le Kenya et la Russie, un pays cible pour ces nouveaux mercenaires du sport. Nous continuerons d'ailleurs de lutter pour que l'IAAF adopte un règlement beaucoup plus strict pour mettre fin à ce mercenariat. La deuxième mesure est que l'athlétisme soit un sport qui puisse faire vivre les jeunes. Par conséquent, il est indispensable que le tissu économique marocain sache qu'il a un rôle primordial à jouer en apportant aux athlètes, aux sportifs et aux jeunes en général son soutien en terme de sponsoring. Nous continuons toujours à chercher des sponsors nationaux pour les athlètes et il est malheureux de vous dire que nous nous adressons le plus souvent aux sponsors étrangers alors que nous disposons d'un potentiel non négligeable dans notre pays. C'est pourtant une condition sine qua non pour juguler ce phénomène.


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