Partenariat euroméditerranéen (PEM) La récente création de la section Maroc du Calame (Centre d'analyses et de liaisons des acteurs de la Méditerranée), une première initiative du genre à l'instigation de personnalités marquantes des deux rives, vient combler un vide en instituant un nouvel espace géopolitique pour relancer un authentique PEM. L'originalité de cette nouvelle association dont l'appellation s'inspire de "la plume du roseau" symbolisant la culture et la science, est d'avoir su mobiliser des valeurs sûres, d'abord acquises entièrement à la cause euroméditerranéenne, provenant du monde politique, des entreprises, des professeurs universitaires et de la société civile. Des gabarits de la trempe de Carmen Romero, épouse de Felipe Gonzales, Jean-Louis Guigou initiateur de ce projet, le Libanais Michel K. Moubayed, Elisabeth Guigou, ex-ministre de la Justice française, président du Conseil d'orientation stratégique de l'Association Calame, Tarik Sijilmassi, Président du Crédit agricole, Mustapha Bakkoury, patron du groupe CDG… La rencontre du vendredi 1er juillet a annoncé la couleur d'une reconfiguration de l'esprit du dialogue dans le cadre du PEM qui doit se muer en "un espace de franc-parler et de sincérité des échanges en dehors des discours policés de la diplomatie de complaisance", a notamment plaidé le président du Directoire du Crédit agricole marocain. L'ONG Calame et son institut de prospective, dont la mission est destinée aux décideurs des deux rives du bassin, et plus généralement de l'Union européenne et des pays de la Ligue arabe, se veut, comme l'a expliqué son fondateur Jean-Louis Guigou, "un espace de rassemblement et d'influence combinant l'efficacité économique et l'harmonie des civilisations de l'espace géopolitique méditerranéen et un outil d'anticipation au service des entreprises et des dirigeants politiques". Une anticipation qui relève de la prévention scientifique ou prospective, en ce sens que les chocs à venir se doivent d'être, sinon évités, du moins sérieusement amortis. Côté Vieux continent, la "décélération" démographique va faire perdre à l'UE 60 millions d'habitants en passant de 494 millions en 2000 à 434 millions en 2050. Et la population active va décroître, dans le même temps, de 75 millions de personnes. Une Europe qui sera davantage "peuplée de rentiers que d'entrepreneurs", selon les prévisions des "europessimistes". Ainsi, les relais de la nouvelle croissance communautaire devront être puisés dans les pays du sud du bassin qui suivront une tendance d'explosion démographique en atteignant 500 millions d'habitants à l'horizon 2050. Des besoins énormes à satisfaire en partenariat d'intégration économique avec le Nord tandis que les marchés sont, pour la plupart, déjà saturés. Cette interdépendance est accrue pour les pays du Sud qui auront de plus en plus "besoin d'une Europe forte" pour faire face au choc démographique qui inondera le marché du travail à l'horizon 2020. Les estimations de la banque mondiale font état de la création de 100 millions d'emplois en deux décennies dans cette région, Moyen-Orient compris. En outre, le démantèlement total en 2010 des accords d'association et les menaces de la montée en puissance de la Chine, membre depuis 2001 de l'OMC, imposent des ouvertures commerciales qui vont contraindre entre 30% et 50% des entreprises locales à une mise à niveau conséquente et à une adaptation très rapide. Enfin, le choc politique et sociétal n'est pas des moindres car les PVD méditerranéens doivent affronter les mutations accélérées de la modernité et de la démocratie, de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption et la pauvreté. L'Europe ne peut choisir l'option d'un " isolement " à haut risque pour se transformer en une " Grande Suisse " et les deux rives sont appelées à dialoguer et à coopérer pour le partage des destinées communes. Si jusqu'à présent, dix ans après le démarrage du processus de Barcelone, des avancées relatives sont à créditer au plan économique, en revanche, l'échec est total aux niveaux politique, institutionnel et stratégique. Non que tout soit à recommencer, mais qu'il urge que l'UE compte, parmi ses membres, des "champions" du PEM, inexistants jusque-là, pour citer Elisabeth Guigou. A l'instar des pays sud-méditerranéens qui ont déjà leur "crack", reconnu et plébiscité par tous les acteurs des deux rives de Calme : le Royaume du Maroc.