Ali Benjelloun, Dg de la FNACAM Face au “mutisme” des pouvoirs publics sur les doléances du secteur des intermédiaires assureurs, la FNACAM (Fédération nationale des Agents et Courtiers d'assurances au Maroc) ouvre le débat public, non sans avoir soumis au préalable un mémorandum en bonne et due forme aux instances compétentes du pays. La réaction de la fédération, même si elle est vive et critique, il n'empêche que la concertation doit être engagée avec ses membres afin d'éviter tout dérapage de “lois aveugles” qui privilégient le diplôme sur l'expertise sans compter des conséquences sociales incertaines. C'est pourquoi, Ali Benjelloun, Directeur général de la FNACAM, dans cet entretien exclusif accordé à La Gazette du Maroc, explique les tenants et les aboutissants de cette reforme législative aussi controversée que “déséquilibrée” dans les “iniquités” qu'elle renferme. La Gazette du Maroc : Comment se porte le secteur des assurances au Maroc ? Ali Benjelloun : Le secteur des assurances au Maroc est malade. Il est surtout malade de ses contradictions car d'un côté, les compagnies veulent multiplier la création d'agences d'assurances et, de l'autre, elles imposent, via des traités de nomination à sens unique, des conditions draconiennes à leur propre réseau. Nous nous sommes donc penchés tout récemment au niveau du Bureau de notre Fédération sur l'avenant au traité de nomination que les compagnies mandantes soumettent actuellement à leur réseau d'agents pour signature. Nous sommes en mesure, aujourd'hui, de pouvoir affirmer que jamais pareille convention n'a été aussi déséquilibrée. C'est la raison pour laquelle nous avons recommandé à l'ensemble des agents d'assurances de surseoir à la signature de ce document en attendant que le décret d'application fixant, entre autres, l'étendue des rapports entre les entreprises d'assurances et leurs mandataires soit promulgué. Nous avons des raisons de croire que tôt ou tard, si bien évidemment rien ne change, les intermédiaires finiront par créer leurs propres compagnies d'assurances et/ou se tourner vers les entreprises d'assurances délocalisées au Maroc dans le cadre du processus d'ouverture du pays à la mondialisation, aux investissements étrangers et aux nouvelles règles du commerce libre. Le code des assurances qui réglemente les conditions d'accès et d'exercice de la profession d'intermédiaire assureur, qu'il soit agent ou courtier, répond-il finalement aux attentes de la profession ? Le code des assurances est venu incontestablement mettre de l'ordre dans un secteur longtemps régi par des textes épars, mais la profession a le sentiment qu'il a été taillé sur mesure pour répondre beaucoup plus aux attentes des compagnies d'assurances et des banques qu'à celles des intermédiaires. C'est pourquoi, nous avons décidé de saisir à nouveau les instances législatives dans la perspective d'amender un certain nombre de dispositions du code que nous considérons en totale inadéquation avec la réalité du terrain. (voir encadré) Comment pourriez-vous qualifier l'état des relations actuelles entre les deux fédérations, celle des intermédiaires assureurs que vous pilotez et la FMSAR regroupant les compagnies? Avec l'arrivée de Mustapha Bakkoury à la tête de la FMSAR (Fédération marocaine des sociétés d'assurances et de réassurances), on avait toutes les raisons de croire qu'un véritable partenariat allait s'instaurer entre les deux entités. Hélas, il s'est avéré que cette approche n'est pas partagée par certains dirigeants des managements de compagnies dont l'esprit mercantile continue de prévaloir sur tout le reste. Le fait par exemple de ne pas nous associer à la réflexion, de priver sciemment leurs agents d'assurances de recourir aux services d'une deuxième entreprise d'assurances en cas de risque, à fortiori, non pratiqué ou décliné par elles, atteste, si besoin est, de l'absence d'une vision de marché et d'une stratégie à moyen et long terme. Car ce n'est pas en étouffant leur propre réseau de distribution que leurs gains seraient plus importants. Nous gardons toutefois l'espoir que la raison prévaudra et qu'une véritable concertation fondée sur l'équilibre des intérêts s'instaurera entre tous les partenaires institutionnels et professionnels intéressés car, il faut se rendre à l'évidence, sans l'apport du réseau de distribution traditionnel, les compagnies d'assurances n'auraient jamais pu bénéficier de l'embellie qu'elles connaissent aujourd'hui. Pour réviser le code des Assurances Les amendements de la FNACAM Les amendements proposés par la Fédération des intermédiaires assureurs au Dahir n° 17-99 “Livre IV” portant Code des assurances ont trait à certaines dispositions législatives controversées dont des moutures reformulées par les soins des intermédiaires ont été adressés, par voie de mémorandum au Premier ministre et aux diverses instances et groupes parlementaires. L'article 304 du chapitre traitant des conditions d'admission à l'examen professionnel permettant l'accès à la profession d'intermédiaire d'assurance montre le constat qu'une frange de diplômés de haut niveau sont marginalisés en raison du “verrouillage” imposé par l'exigibilité d'une licence et des ayants droit sont menacés par un avenir incertain. Il serait plus indiqué de reconsidérer les critères d'admission à la profession d'intermédiaire d'assurance dans les conditions ci-après : • Que l'accès à l'intermédiation soit lié au niveau d'étude du postulant et non à la nature ou à l'origine du diplôme obtenu. Un BAC + 3 au minimum semblerait suffisant. • Dans le cas d'une succession, se prévaloir d'une expérience d'au moins 4 ans et satisfaire aux examens d'accès à la profession d'intermédiaire d'assurance. Etant bien entendu que ces dernières dispositions ne sont applicables qu'aux cabinets dont la création est antérieure à la promulgation du code des assurances. Les autres amendements proposés par la FNACAM ont trait aux points de vente (article 301) où semble prévaloir la politique du “deux poids, deux mesures” entre des banques privilégiées et des intermédiaires à zone d'action délimitée. Il est mieux indiqué de permettre aux intermédiaires de pouvoir disposer, au moins, d'un point de vente par ville avec des conditions d'exercice bien circonscrites. D'autres amendements figurent dans le mémorandum relatif aux extensions d'agréments et à la transformation des cabinets et sociétés intermédiaires peuvent corriger le projet d'Arrêté du ministre des Finances.