Questions non exhaustives. Que cachent les centres d'appels délocalisés ? Que cache-t-on sur ces centres ? Qu'est-ce qu'on a toujours voulu en savoir ? Pourquoi divisent-ils aujourd'hui les Etats, les syndicats et les employeurs ? A l'étranger, s'entend. Une chose est sûre. En 2004, nous concernant en tout cas, ils constituent l'un des éléments dopant de notre économie. Sous réserve, bien entendu, des retombées de la libéralisation de la deuxième ligne du téléphone fixe et autres privatisations en cours. Les effets conjugués de la maîtrise espérée du chômage -près de 20% en milieu urbain et 13% en moyenne sur le plan national- et la pression du FMI pour ramener la masse salariale à plus de 10% du PIB sont des attentes fortes. La facturation étant en devise, centres d'appels riment forcément avec exportation. Ce dont le Maroc a besoin, en ces temps durs où la balance commerciale ne cesse de se détériorer. Si au Maroc, l'on jubile pour accueillir à bras ouverts les call centers, ailleurs on fait la moue. On tire la gueule en les perdant. On s'érige en défenseur de l'emploi. On s'oppose énergiquement à la délocalisation... de ces centres au nombre de 2300, employant 210.000 personnes. En attendant la délocalisation de l'industrie lourde. La France, forcément pour des affinités culturelles et géographiques, est concernée par ces états d'âme. Preuve. Bercy, siège du ministère français de l'Economie et des Finances, s'est fendu d'un projet d'arrêté sur les centres d'appels, mettant ainsi la profession en ébullition. Rien que ça. Un arrêté, somme toute vicieux, imposant aux centres d'appels d'annoncer leur lieu de résidence à tous leurs correspondants. Précision. C'est bien au nom du “droit d'information du consommateur” que les services de Nicolas Sarkozy placent ce nouveau règlement. Alors qu'en toile de fond, se dresse bien évidemment le spectre des délocalisations dans des pays aux coûts de main-d'œuvre plus cléments. Qui a cité le Maroc, la Tunisie, le Sénégal et l'Ile Maurice ? Les centres d'appels auront, le cas échéant, l'obligation d'annoncer leur lieu de résidence à tous leurs correspondants, soulignons-nous plus haut. Sachant pertinemment que le télé opérateur, installé sur un plateau dans le nouveau quartier des affaires à Casablanca Sidi Maârouf, se doit de contrôler (cacher) son accent et décliner invariablement à son correspondant au bout du fil un des nombreux patronymes qui lui sont dédiés. “C'est Christine, bonjour madame, est-ce que je peux vous aider” ou “c'est Jean-Charles, bonjour monsieur qu'est-ce que je peux faire pour vous”... Combien de temps encore ces jeunes Tunisiens, Marocains, Sénégalais et Mauriciens tiendront-ils le coup. Cela va sans dire que le projet d'arrêté, controversé de Bercy a réussi à créer des remous et mettre la pagaille au sein du secteur des centres d'appels. En France comme à l'étranger, les réactions sont négatives même si les langues ne se sont pas totalement déliées. Bien que certains, sous le sceau de l'anonymat, estiment que cet argument est quelque peu fallacieux, voire démagogique dans le climat politico-économique ou baigne encore pour quelques semaines encore Nicolas Sarkozy, partant pour des ambitions beaucoup plus politiques. Pendant ce temps, à Casablanca, se tient le premier SICAM (Salon international des centres de contacts et d'appels au Maroc). Tant qu'à faire alors, décentralisons.