L'affaire du Serial Killer de Taroudant a défrayé la chronique ces derniers jours en occultant par la même occasion celle du gaz butane.Allons-nous manquer de gaz ? la société s'interroge. Retour sur une histoire qui a commencé après la réunion tenue, vendredi 3 septembre 2004, par les représentants du gaz butane du ministère de l'Energie et des Mines. Lors de cette réunion, les représentants du gaz butane ont expliqué l'urgence d'un remboursement partiel mais rapide des arriérés non payés. C'est à la suite de cette information que les Marocains ont été alertés d'une probable rupture d'approvisionnement du gaz butane dans certaines régions du royaume. Certaines compagnies de distribution seraient en ralentissement ou arrêt et ne pourraient plus passer de commandes. La Caisse de compensation serait aussi à bout de souffle et n'aurait plus d'argent pour honorer ses engagements vis-à-vis des compagnies de distribution. Il est même dit qu'elle aurait suspendu ses paiements au secteur depuis le mois d'avril 2004. Le seul recours tant souhaité par les professionnels que les citoyens reste donc l'Etat. En attendant l'intervention de l'Etat par le biais du ministère des Finances, comme l'avait fait l'année dernière Oualalou en débloquant près de 500 millions dh, Mohamed Boutaleb, minis-tre de l'Energie et des Mines, a fait savoir que “l'approvisionnement du Royaume en gaz butane se poursuit et se poursuivra conformément au plan d'approvisionnement initialement prévu”. Le président de la fédération de l'énergie, Abdallah Alaoui, a de son côté expliqué dans un entretien accordé au journal “Aujourd'hui le Maroc” du jeudi 9 septembre qu'il n'existe aucune pénurie d'approvisionnement en matière de gaz butane. Tous ces discours sont-ils de nature à soulager la panique des Marocains qui sont de grands consommateurs de gaz ? En tout cas, l'avenir nous le dira. Le président de la fédération de l'énergie a, par ailleurs, fait savoir qu'un problème financier serait à l'origine de toute cette polémique. C'est quoi donc ce problème financier ? Il s'agirait d'une question d'arriérés. Au 1er septembre 2004, les arriérés de la Caisse de compensation s'élèvent à 1,2 milliard de DH, soit 7 mois de retard. Ces retards entraînent de très importantes difficultés de trésorerie chez les distributeurs de butane. Les dysfonctionnements du système de compensation se sont tellement accumulés que la facture devient trop lourde pour tous les intervenants du secteur du gaz butane : Etat, banques, sociétés. En attendant de trouver une solution, les compagnies de distribution assument le différentiel entre le prix réel et le prix subventionné. Les banques, pour leur part, sont actuellement réticentes à financer certaines compagnies. Ces dernières sont donc dans l'obligation de ne pas confirmer certaines commandes dans la mesure où elles ont déjà dépassé leur ligne de crédit. L'Etat se voit alors sommer de trouver d'urgence un système de financement pour se substituer à la caisse de compensation. Force est de reconnaître que le système actuel de compensation a atteint ses limites. Ce système va jusqu'à imposer aux distributeurs de vendre le gaz à un prix inférieur à son coût de revient, tout en comptant sur l'Etat pour combler cette différence, par un subside versé aux distributeurs qui peinent à le recevoir. A titre de rappel, l'Etat prévoit une subvention à hauteur de 60% du prix de vente public qui est actuellement de 3,30 dh le kg. La crise qui secoue le monde du gaz butane aujourd'hui connaît une ampleur qui risque de mettre en péril inéluctablement la stabilité sociale à la veille du mois sacré de ramadan. Mais ce qui est encore plus grave, nous semble-t-il, c'est cette imminente augmentation des prix. Selon Abdallah Alaoui, des mesures seront prises après le mois de ramadan, dans le but de réguler le système des prix. Allant dans le même sens, il a fait savoir que les prix restent particulièrement bas au Maroc, en soulignant que les 12 kilos de butane sont de 40 dh chez nous. Alors que le prix de la même quantité de butane dans les pays du pourtour méditerranéen s'élève à 70 dh, a-t-il ajouté. Est-ce que les réalités marocaines correspondent à celles des autres pays du pourtour méditerranéen. En tout cas, les décideurs feraient mieux de penser à cette autre question avant de prendre toute décision. L'augmentation n'est pas de mise, compte tenu du caractère social de ce produit. De plus, le gaz naturel est vital pour les entreprises industrielles, notamment dans le raffinage, les infrastructures portuaires, ainsi que les produits du froid, de la climatisation et du chauffage, mais aussi et surtout dans les centrales électriques. Voilà que les pouvoirs publics sont avertis du risque de pénurie du gaz butane. Ils ont donc le choix entre deux possibilités pour sortir de cette crise qui plane à l'horizon.. La première serait de régler leurs arriérés vis-à-vis des compagnies de distribution, la seconde serait de revoir toute la politique de subventions telle qu'elle est pratiquée depuis toujours.