Le recul du dollar a grandement participé à faire baisser l'endettement du Maroc. Ce n'est cependant pas le seul élément. Il est à mettre au crédit du Trésor et aux résultats positifs de la gestion active de la dette commencée depuis quelques années. La dette intérieure continue cependant d'avoir la cote, au grand plaisir des intermédiaires en valeur du Trésor. C'est un Fathallah Oualalou fier d'exposer les résultats de la gestion de la dette publique qui a rencontré la presse lundi 16 février courant au siège du ministère des Finances et de la privatisation. Au vu du recul de l'endettement extérieur, mais également de la baisse sensible de la charge de la dette, on est tenté de dire que l'argentier du pays a de quoi s'enorgueillir. Le Trésor public ne doit plus que 78,8 milliards de DH au créancier étranger du Maroc, contre 91,8 milliards de DH, soit une baisse de 13,8 milliards de DH en l'espace d'une année. Par ailleurs, l'endettement extérieur du Trésor rapporté au PIB recule de 480 points de base, passant de 23,3% à seulement 18,5% du produit intérieur brut. Il faut signaler toutefois que la dette extérieure publique du Maroc ne se limite pas seulement à celle du Trésor. Puisqu'elle comprend, en outre, les crédits accordés aux établissements publics ayant fait l'objet de garantie de la part du Trésor. Ces crédits garantis représentent quelque 37% de la dette extérieure publique. Au total, cette dernière est d'environ 125,7 milliards de DH au 31 décembre 2003, soit 14,3 milliards de dollars. A l'image du passif du Trésor, elle a subi une diminution de 12% par rapport à 2002. Il est cependant rassurant de constater que l'Etat se porte garant pour des entreprises publiques qui occupent une place de choix dans la réalisation des objectifs de développement du pays. En tête des débiteurs arrive l'Office national de l'électricité (9% du total de la dette extérieure publique), la Société des autoroutes du Maroc (4,1%), la Royal Air Maroc (3,3%). Cette dernière est tout de même suivie de très près par la Caisse nationale de crédit agricole (3,2%), les Offices régionaux de mise en valeur agricole (3%) ou encore l'Office chérifien des phosphates (2,9%). Pour ce qui est des créanciers du pays, c'est la Banque mondiale qui est toujours le premier bailleur de fonds du Royaume, à travers sa filiale la BIRD avec 19% de l'encours total de la dette extérieure. Le deuxième de la liste est bien évidemment la France avec 16% de l'encours, suivie de la Banque européenne d'investissement (BEI) avec 8%, de la Banque africaine de développement (BAD) avec 7% et du Fonds arabe de développement économique et social (FADES) avec 5%. Nouvelle forme de financement Cependant, l'année 2003 a surtout été marquée par des opérations d'envergure ayant beaucoup influé sur le passif actuel de l'Etat. Il s'agit par exemple du recours du Trésor public à une nouvelle forme de financement en émettant sur le marché international des obligations en euros non garanties. L'équipe de Oualalou a donc pu collecter jusqu'à 400 millions d'euros. Selon Fathallah Oualalou, il s'agissait surtout d'un arbitrage à faire entre la dette onéreuse à l'égard de la BAD et l'opportunité offerte au taux de 5,24%. Par ailleurs, les entreprises publiques telles que Maroc Telecom, la BNDE, la CNCA ou encore l'ONEP ont procédé à un remboursement anticipé d'une partie de la dette garantie. Sans oublier qu'avec la fin de l'année, les bonnes nouvelles ont continué de tomber, notamment à travers l'accord conclu avec l'Espagne et qui porte sur une reconversion de la dette d'un montant de 90 millions d'euros. Il s'agit là de performances non négligeables ayant permis à l'Etat d'agir favorablement sur le service de la dette extérieure notamment les intérêts servis. C'est ainsi que le principal remboursé augmente alors que les intérêts baissent dans de fortes proportions. Par rapport à l'année 2002, l'Etat a économisé près de 1,5 milliard de DH en 2003, avec des intérêts se situant à 5,4 milliards de DH contre 6,9 milliards de DH. Parmi les explications fournies par le ministre des Finances, il convient de citer le recul du taux de change du dollar par rapport à l'euro. C'est d'ailleurs ce qui favorise certains arbitrages effectués par le Trésor. En effet, à partir de certains taux de change du dollar par rapport à l'euro, il devient tout naturel d'augmenter son endettement en euro et de réduire en conséquence celui du dollar. C'est ce qui explique que la structure de l'encours par devise ait basculé plus que favorablement vers la monnaie du premier partenaire du Maroc. Ainsi à la fin de 2003, la dette marocaine est à 56% formulée dans la monnaie de l'ancien monde. Le billet vert ne représente plus que 25% de l'encours alors qu'il représentait 40% en 1999. L'autre explication de ce choix tient également au rationalisme économique du ministère des Finances. En effet, après avoir modifié le panier de monnaies de manière à réduire les fluctuations du dirham face à l'euro, il est tout naturel que l'endettement soit revu en conséquence de manière à réduire les risques de change liés à l'endettement. Tout ceci témoigne d'une gestion bien pensée et menée avec minutie. C'est dire qu'en ce qui concerne la dette extérieure, Fathallah Oualalou figure parmi les meilleurs élèves de la classe. Ce qui doit lui valoir une fois de plus les faveurs des institutions financières internationales et de certains bailleurs de fonds. Cependant, la dette doit plutôt s'analyser suivant toutes ses composantes. Il est donc important de prendre en compte les performances réalisées par le Trésor sur le champ de la dette intérieure. A ce niveau, on constate que la dette passe de 191,5 à 211,6 milliards de DH, soit une hausse de 10,5%. La dette intérieure représente désormais 49,7% du PIB. Les investisseurs institutionnels (banques et assurances), sans doute échaudés, par les contre-performances de 1998 à 2002 ont préféré se réfugier derrière les bons du Trésor. Certes, ils offrent une rentabilité modeste, mais bien plus intéressante que celle de la Bourse. L'Etat a donc pu profiter de taux d'intérêt non seulement plus attractifs qu'à l'international, mais aussi et surtout d'une absence de risque de change. Pour mieux s'assurer d'un arbitrage et surtout par souci de flexibilité, le Trésor a considérablement augmenté son endettement à court terme sur le marché local. Ainsi, le court terme est passé de 17% des encours en 2002 à 27% en 2003, alors que le moyen terme recule de 10 points et que le long terme stagne. En tout cas, le marché local ne cesse de prendre de l'ampleur, au grand plaisir des intermédiaires en valeurs du Trésor. En effet, si les adjudications ne représentaient que 24% de l'encours total du Trésor en 1995, elles occupent désormais 93%. Cette croissance n'a pas pu se faire sans la modernisation du marché des bons du Trésor dont la réforme se poursuit d'ailleurs. En effet, en 2003 plusieurs mesures ont pu entrer en vigueur. L'émission de bons par assimilation sur des lignes futures a été permise avec comme objectif d'améliorer le profil de l'échéancier du portefeuille de la dette intérieure. La nouvelle loi sur la pension livrée a également été adoptée en décembre 2003. Pour ce qui est de 2004, on peut déjà signaler la mise en place d'un système de télétransmission des soumissions aux adjudications. Ainsi à l'image de la bourse des valeurs de Casablanca, la présence physique des IVT n'est plus nécessaire. Ce qui signifie un gain de temps non négligeable, mais aussi et surtout une réduction du risque opérationnel et une sécurisation de l'échange d'informations. D'autres mesures devraient entrer en vigueur au cours de cette année comme la modification de la date de règlement pour les bons à court terme pour la faire passer de j+6 à j+2 seulement. Le plafond des gisements des lignes à court terme devrait également se situer en 2004 à 2,5 contre 2 milliards de DH auparavant. Quant aux lignes à moyen terme le plafond est porté de 3 à 3,5 milliards de DH.